Le Conseil constitutionnel aidera-t-il Marine Le Pen dans sa course aux parrainages ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Conseil d'État a renvoyé ce jeudi la QPC posée par la candidate du FN au Conseil constitutionnel.
Le Conseil d'État a renvoyé ce jeudi la QPC posée par la candidate du FN au Conseil constitutionnel.
©Reuters

QPC

Le Conseil d'État a renvoyé ce jeudi la question prioritaire de constitutionnalité posée par la candidate du FN au Conseil constitutionnel. Celui-ci devra trancher : est-ce conforme à la Constitution de rendre public le nom des 500 élus qui offrent leurs parrainages aux candidats à la présidentielle.

Didier Maus

Didier Maus

Didier Maus est Président émérite de l’association française de droit constitutionnel et ancien maire de Samois-sur-Seine (2014-2020).

 

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Atlantico : Le Conseil d'État a décidé ce jeudi de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionalité (QPC) soulevée par le Front national concernant la publicité du nom des élus donnant leur parrainage aux candidats à l'élection présidentielle. De quoi s'agit-il exactement ?

Didier Maus : Depuis 1976, à la différence de la situation antérieure, les noms des parrains, dans la limite des 500 nécessaires, sont rendus publiques par le Conseil constitutionnel. Les autres parrains demeurent anonymes. Madame Le Pen estime que cette publicité est un frein à l'obtention des 500 signatures au motif que les élus concernés ne veulent pas rendre public cette forme de soutien à  sa candidature.

Pour introduire le contentieux, Madame Le Pen a demandé au Premier ministre de modifier un décret du 8 mars 2001. Face à son refus, elle attaque cette décision négative devant le Conseil d'Etat. Il s'agit d'une procédure parfaitement classique. A l'appui de cette requête elle soutient que la loi organique de 1976, qui fonde le décret de 2001, est contraire à la Constitution au motif principal qu'elle est contraire à la liberté de candidature, en particulier aux nouvelles dispositions introduites dans la Constitution en 2008 pour garantir le pluralisme des opinions et la participation équitable des courants politiques à la vie démocratique de la nation.

Il est évident qu'il serait paradoxal qu'un candidat d'extrême gauche puisse participer à l'élection présidentielle et que Marine Le Pen, dont la représentativité politique est incontestable, ne le puisse pas. Le président Sarkozy l'a d'ailleurs reconnu lors de son entretien de dimanche dernier. L'expérience montre que Jean-Marie Le Pen, à une exception près, a toujours recueilli les 500 signatures nécessaires. On ne peut donc exclure qu'il y ait une volonté de faire monter la pression.



La demande de Marine Le Pen a-t-elle une chance d'aboutir ?

Il est impossible de faire un pronostic. Il n'était pas acquis que le Conseil d'Etat renvoie la QPC au Conseil constitutionnel. L'argument tiré de la pluralité des opinions politiques, qui résulte d'une révision constitutionnelle ultérieure à 1976, est intéressant. Pour que Madame Le Pen obtienne satisfaction, il faudrait que le Conseil constitutionnel juge que par elle-même la disposition qui prévoit la publicité des parrains est un obstacle à l'expression de la pluralité des opinions.

Il est, à l'inverse, parfaitement possible de considérer que les élus qui favorisent telle ou telle candidature à l'élection présidentielle doivent l'endosser publiquement, quitte à expliquer qu'ils sont favorables à l'expression vraiment pluraliste de la démocratie mais que ce parrainage n'est pas un engagement à voter en faveur du candidat.

Si la requête de Marine Le Pen aboutit, le Conseil constitutionnel déclarera-t-il la loi du 18 juin 1976,précisant que le nom et la qualité des citoyens qui ont proposé les candidats inscrits sur la liste sont rendus publics par le Conseil constitutionnel, comme contraire à la Constitution ?

Le Conseil constitutionnel n'est saisi que d'un petit morceau de la loi de 1976. Cela ne remettrait pas en cause les autres dispositions de la loi de 1962 modifiée en 1976. Si le Conseil juge que ces dispositions sont contraires à la Constitution il précisera dans son arrêt quelles en sont les conséquences sur l'élection présidentielle de cette année. Les noms des parrains ne seraient plus rendues publics.


Sur l'ensemble des QPC déposées, quelle est la proportion de requêtes ayant abouti ?

Environ 25 à 30% des QPC posées au Conseil constitutionnel aboutissent à une déclaration d'inconstitutionnalité. Ce pourcentage est à la fois raisonnable et significatif de la véritable portée de la procédure de la QPC.


Quel avenir pour les QPC en France ?

L'avenir est ouvert. La QPC, au-delà des décisions d'espèce, est un véritable succès et une vraie refondation d'une grande partie du droit français. Il y a, à la date d'aujourd'hui, plus de 200 saisines du Conseil constitutionnel et plus de 180 décisions ont été rendues. Le succès ne se dément pas. Il est au-delà des prévisions les plus optimistes. La QPC de Madame Le Pen est d'ailleurs une bonne illustration de l'importance de cette véritable révolution juridique.

Propos recueillis par Franck Michel

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