Chine Russie : une alliance de fer ? La réalité est beaucoup plus complexe et voilà pourquoi<!-- --> | Atlantico.fr
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Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping posent pour une photo lors de leur rencontre à Pékin, le 4 février 2022.
Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping posent pour une photo lors de leur rencontre à Pékin, le 4 février 2022.
©ALEXEI DRUZHININ / SPUTNIK / AFP

Alliance opportuniste

Si la Chine et la Russie sont souvent présentés comme des alliés solides, le terme se révèle en vérité excessif et inapproprié. Les rapports entre Moscou et Pékin sont en fait asymétriques et opportunistes, une relation que la guerre en Ukraine illustre parfaitement

Emmanuel Véron

Emmanuel Véron

Emmanuel Véron est géographe et spécialiste de la Chine contemporaine. Il a enseigné la géographie et la géopolitique de la Chine à l’INALCO de 2014 à 2018. Il est enseignant-chercheur associé à l'Ecole navale.

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Atlantico : On dit souvent que la Chine est l'alliée de la Russie. Dans le détail, quelles sont les limites de l'entente entre la Russie et la Chine ? Y a-t-il des limites que la Chine ne souhaite pas franchir dans son soutien envers Moscou ? 

Emmanuel Véron : Le terme d’allié est excessif et inapproprié. Le mot est trop fort et ne donne à comprendre la réalité de l’articulation Moscou-Pékin, qui est une relation singulière, asymétrique et opportuniste, pas une alliance. Il y a un partenariat stratégique qui correspond à des relations importantes dans différents domaines et qui se sont accrues depuis une décennie, corrélativement à l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping et le retour au Kremlin de Vladimir Poutine.

Les relations sino-russes sont articulées par essentiellement trois paramètres :

-        Achats d’hydrocarbures et plus largement de ressources naturelles par la Chine à la Russie.

-        L’achat d’armes par Pékin à Moscou.

-        L’articulation non-occidentale pour peser contre l’occident, en premier lieu les Etats-Unis.

Les limites sont assez claires et la guerre en Ukraine les révèle puissamment. Pékin n’engagera jamais des troupes chinoises au sol aux côtés de l’armée russe dans un scénario de haute intensité, c’est-à-dire la guerre.

Peut-on penser que la position chinoise est une sorte d'équilibre subtil entre l'Occident et la Russie ? Cette position est-elle la plus à même de protéger les intérêts chinois ?

La position n’est pas si subtile, plutôt assez délicate pour la Chine et le pouvoir à Pékin. Il est évident que Pékin savait qu’une intervention militaire se préparait côté russe pour envahir l’Ukraine. L’ampleur et la réalité de la guerre en revanche n’ont pas été si subtilement anticipé par Pékin (ou Moscou). La Chine soutien indirectement son partenaire russe, mais s’inquiète de la mise à l’arrêt des « routes de la soie terrestres » passant par l’Ukraine, la Russie et la Biélorussie. D’autre part, le scénario d’un occident (UE et Otan) amorphe face à l’agression de V Poutine se montre être une erreur d’appréciation fondamentale et recompose d’éventuels scénarios militaires pour Taiwan. 

Ainsi, depuis les premières semaines de la guerre (2022), Pékin se montre à la fois distant mais soutien indirectement son partenaire, Vladimir Poutine, par des moyens assez limités, de peur également que des sanctions économiques s’entendent à la Chine. 


Quelles pourraient être les conséquences pour Pékin si la Chine se rangeait ouvertement du côté de Moscou ? Si elle se rangeait du côté de l’OTAN ? 

Impossible de se « ranger » du côté, c’est à l’opposé de son environnement stratégique et de ses doctrines et de sa culture politique et stratégique. S’il y avait un scénario qui ferait que Pékin se rangerait du côté de Pékin, le régime s’afficherait dans une fuite en avant politique et diplomatique qui décrédibiliserait ses postures mondiales et son économie. Pékin préfère jouer avec la distance géographique du théâtre ukrainien pour ne pas trop s’exposer et espérer une sortie de crise où l’Otan et l’UE ne se renforcent pas. D’autre part, l’affaiblissement de la Russie de Poutine et l’hypothèse d’une Russie après Poutine n’inquiète pas davantage Pékin. Au contraire, une Russie très affaiblie sert les intérêts de la Chine, en termes de contrats, d’accès aux ressources naturelles et de partition de la Fédération de Russie.



Alors que la Chine et la Russie semblaient se rapprocher avant le début de l’invasion russe, la guerre en Ukraine a-t-elle définitivement enterré cette possibilité ? 

A priori non, Pékin évalue ce qu’elle estime être « la bonne distance » dans un affiche international et son degré d’exposition de son soutien à Poutine dans la guerre en Ukraine. L’opportunisme dans les relations internationales n’est pas au point mort.

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