Cette révolution politico-médiatique que préfigure la déclaration de candidature de Ron deSantis sur Twitter<!-- --> | Atlantico.fr
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Un internaute utilisant Twitter
Un internaute utilisant Twitter
©DIPTENDU DUTTA / AFP

Vers la fin du JT ?

Beaucoup de commentaires ont retenu les difficultés techniques qui ont affecté l’interview entre Elon Musk et le candidat républicain. A plus long terme, c’est un bouleversement de la hiérarchie traditionnelle des médias qui se joue.

Philippe Moreau-Chevrolet

Philippe Moreau-Chevrolet

Philippe Moreau-Chevrolet est communicant et co-fondateur de l'agence de conseils en communication MCBG Conseil.

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Atlantico : Ron DeSantis a officiellement déposé sa candidature pour l’élection présidentielle américaine de 2024… Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cela fait sensation. Le candidat a en effet choisi de ne pas passer par les médias traditionnels, auxquels il a préféré une visioconférence organisée sur Twitter avec Elon Musk. Qu’est-ce que ce choix dit, en filigrane, de l’évolution de la hiérarchie entre les différentes plateformes médiatiques ? Dans quelle mesure cette situation concerne-t-elle également la France ?

Philippe Moreau-Chevrolet : Elon Musk peut en effet lancer un président de la République tout seul avec son propre média. En France, les risques sont moindres pour l’instant. La télévision est encore le média dominant en France car l’électorat concerne avant tout les personnes âgées. En matière de digitalisation, la France est très en retard, même si Éric Zemmour avait déclaré sa candidature dans une vidéo Youtube.

De manière générale, il y a quand même une tendance qui va s’installer durablement avec un grand média américain comme Twitter qui peut pénétrer le débat politique français.

De nombreux email et sms issus de fox news ont montré la peur grandissante de Fox News de se faire dépasser par des médias plus radicaux et des réseaux sociaux. Tucker Carlson a d'ailleurs prévu de se relancer sur Twitter. À quel point les craintes de la chaîne sont-elles fondées ? De quoi témoignent-elles du paysage médiatique ?

On est dans une époque où des acteurs globaux sont en capacité de redéfinir les rapports de force politiques dans bon nombre de pays. Il y a beaucoup de nouveautés à ce niveau-là. Elon Musk a pris Twitter pour en faire un outil des idées conservatrices, ce qui influe sur les débats politiques partout en Occident. Il a d’ailleurs été reçu comme un chef d’État à l’Élysée par Emmanuel Macron il y a quelques jours. C’est une sorte de prise de pouvoir pour lui.

Les craintes de Fox News sont fondées, d’autant que Twitter devient également un média vidéo à part entière. A terme, les médias de ce type pourront abriter des débats politiques et lancer des candidats. Les médias traditionnels pourraient donc disparaître. Ils seraient dépassés par les réseaux sociaux sur l’actualité chaude et par les plateformes en matière de divertissement. C’est une question existentielle qui se pose là pour les médias traditionnels.

Aux États-Unis, la chaîne Fox a basé sa ligne éditoriale sur une forte identité conservatrice. Hélas pour elle, de plus en plus de figures politiques semblent lui préférer les réseaux sociaux. En France aussi, les politiciens apprécient de telles plateformes pour toucher leur public. Dans quelle mesure faut-il penser que cela participe de la radicalisation et la polarisation aujourd’hui observée ?

C’est évident car elle façonne un débat beaucoup plus polarisé qu’avant. Il n’y a plus d’espace commun de débat et cela favorise les candidatures douteuses, comme celle de Georges Santos il y a quelques années. Il se disait pro-avortement, pour les armes à feu et pro-entreprises devant les électeurs républicains, et homosexuel et fils d’immigrés juifs devant les électeurs démocrates. Il avait pu agréger les deux types d’électorat.

En France, nous ne sommes pas dans la même situation. La télévision reste l’espace commun de débat.

À quel point les réseaux sociaux, Tiktok, Twitter et autres sont déjà utilisés, à certains égards, en lieu et place des médias traditionnels ? Dans quelle mesure cela va-t-il s’accentuer ?

Les gens les utilisent comme des sources d’informations, d’autant que les informations sont filtrées, ce qui a beaucoup plus d’impact que les médias traditionnels. Cela correspond à une personnalisation de l’information qui s'accentuera dans le temps.

Faut-il craindre une certaine atomisation de notre vie politique résultant de ce nouveau modèle de fonctionnement ? Quand une figure comme Elon Musk est en mesure de passer outre les systèmes habituels pour lancer ses propres candidats, à quoi faut-il s’attendre ?

On va avoir plusieurs groupes séparés, préfigurant la fin des partis politiques traditionnels. On pourra avoir aussi bien des partis très radicalisés que des partis un peu fourre-tout avec des idées venues de n’importe où pour ne pas choquer l’électorat.

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