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Ce qui manque encore aux Républicains pour s’imposer comme le scénario noir d’Emmanuel Macron
©PATRICK HERTZOG / AFP

La possibilité d’une reconquête

Selon un récent sondage d'Opinion Way, Les Républicains obtiennent 15% d'intention de vote pour les élections européennes. Quelle serait la stratégie à adopter pour Les Républicains afin de regagner des voix au sein de l'électorat du Rassemblement National et de LREM ?

Bruno Cautrès

Bruno Cautrès est chercheur CNRS et a rejoint le CEVIPOF en janvier 2006. Ses recherches portent sur l’analyse des comportements et des attitudes politiques. Au cours des années récentes, il a participé à différentes recherches françaises ou européennes portant sur la participation politique, le vote et les élections. Il a développé d’autres directions de recherche mettant en évidence les clivages sociaux et politiques liés à l’Europe et à l’intégration européenne dans les électorats et les opinions publiques. Il est notamment l'auteur de Les européens aiment-ils (toujours) l'Europe ? (éditions de La Documentation Française, 2014) et Histoire d’une révolution électorale (2015-2018) avec Anne Muxel (Classiques Garnier, 2019).

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Atlantico.fr : Le dernier sondage d'Opinion Way, à l'approche des élections européennes qui se tiendront du 23 au 26 mai prochain, accorde un peu moins de 15% d'intention de vote pour le parti Les Républicains. Cependant, une grande partie de l'électorat de François Fillon au 1er tour de l'élection présidentielle envisage toujours un vote LREM aux européennes, et une autre semble être parti vers le FN. Quelle est la nature de ces électorats où LREM d'un côté et le RN entre en concurrence avec LR ?

Bruno Cautrès : Je commencerais tout d’abord par nuancer votre observation. Ce ne sont pas tous les électeurs de François Fillon qui s’apprêtent à voter pour les listes de LREM ou du RN ? C’est même seulement une minorité ! Si l’on prend, par exemple, l’enquête d’intentions de vote réalisée par Opinionway en avril, on voit que 31% des électeurs de François Fillon s’apprêtent à voter pour la liste LR aux européennes, 17% pour la liste LREM-Modem et 4% pour la liste RN. Comme pour les autres électorats, le gros des troupes va surtout s’abstenir (37%) mais le taux d’abstention parmi les anciens électeurs Fillon est beaucoup plus faible que pour tous les autres électorats. Les données disponibles ne permettent pas vraiment se savoir quelles sont les différences sociologiques ou idéologiques entre ces différents segments des anciens électeurs Fillon mais on peut avancer que la partie la plus fidèle aux LR est sans doute celle qui adhère le plus au cœur de cible des LR : économiquement libéraux et culturellement conservateurs (droite catholique traditionnelle). La partie de cet électorat que va voter pour la liste LREM-Modem est sans doute la partie la plus centriste et surtout la plus pro-européenne. Quant à la petite partie du vote voter RN c’est sans doute un électorat captif qui avait voté Fillon en 2017 mais sans soute Le Pen au second tour.

Dès lors, quelle serait la stratégie à adopter pour Les Républicains afin de faire revenir dans leur giron des électeurs partis après l'élection présidentielle soit vers le Rassemblement National soit vers LREM ?

C’est vrai que même s’il s’agit de segments plus petits de l’électorat Fillon que celui qui s’apprête à voter LR, l’enjeu est très important pour LR et pour la stratégie de Laurent Wauquiez. La stratégie actuelle des LR et notamment de leur leader est une stratégie assez bien adaptée à la situation politique actuelle : les LR doivent tenir compte des résultats de 2017. Il s’agit de « bétonner » le socle de leur électorat en prenant appui sur « la droite des valeurs » afin de capter la partie la plus traditionnelle de l’électorat de droite et d’en faire une base ayant vocation à s’élargir. Cet élargissement sera avant tout suspendu aux résultats économiques obtenus par Emmanuel Macron. Si, d’ici un an ou un an et demi, les grandes variables économiques n’ont pas connu d’évolutions positives majeures, les électeurs de droite commenceront à regarder dans le rétroviseur le bilan d’Emmanuel Macron de façon critique. Ce sera notamment sur les questions économiques qui tiennent à cœur des électeurs de droite : les déficits publics, les impôts, le nombre de fonctionnaires. Cette stratégie en deux temps (court terme= bétonner su le socle des valeurs ; moyen terme=attendre Emmanuel Macron de pieds fermes sur l’économie) est celle qui est la plus susceptible de permettre aux LR de ratisser à nouveau sur leur flanc droit. En qui qui concerne leur flanc gauche (les centristes), c’est sans doute un peu tard et un peu compromis.

Au-delà de la nécessité d'avoir un discours économique et social cohérent, est-ce qu'une piste à explorer pour le parti ne serait pas celle d'une meilleure prise en compte des enjeux de notre temps et de l'évolution des sociétés (financiarisation du capitalisme,  numérisation, poids des grandes entreprises de la tech…) ?

Cela ne fait pas de doute. S’inscrire dans les nouvelles questions économiques, sociales et culturelles des enjeux de notre temps et montrer aux électeurs une capacité à être en prise avec les évolutions sociétales est plutôt une bonne chose pour toute formation politique qui veut gagner la présidentielle. Lors de l’élection présidentielle il est toujours plutôt bien vu de montrer aux électeurs une direction d’avenir. Mais pour les LR ce ne sera pas le point essentiel pour 2022…

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