Ce que les neurosciences savent désormais des émotions peut nous aider à combattre la morosité et la déprime post Covid<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Science
Un cerveau vu par tomographie.
Un cerveau vu par tomographie.
©Fred TANNEAU / AFP

Avec le sourire

La neuro-imagerie a permis de réaliser d'importantes avancées dans la recherche en neurosciences et d'en apprendre plus sur nos émotions. Le système émotionnel et le système de raisonnement sont étroitement liés.

Nawal Abboub

Nawal Abboub

Nawal Abboub est une scientifique et une entrepreneure. Elle a obtenu un master en neurosciences et un doctorat en sciences cognitives de Sorbonne Paris Cité, à cheval entre les neurosciences, la linguistique et la psychologie, et est actuellement directrice d'une U.E à l'Ecole Normale Supérieure. Après ses découvertes scientifiques sur le développement du cerveau et son fonctionnement, Nawal Abboub a co-fondé Rising Up, une startup qui déploie des solutions technologiques et pédagogiques pour des enjeux sociaux concrets : développement des compétences, innovation pédagogique, etc

Voir la bio »

Atlantico : Que nous apprennent les dernières recherches en neurosciences sur nos émotions ?

Nawal Abboub : Les émotions ont longtemps été un champ de recherche sous-exploité. Ces dernières années ont vu un grand bond dans la recherche notamment grâce à la neuro-imagerie. On a pu observer l'activité du cerveau en temps réel et mieux comprendre son architecture. On en a appris beaucoup sur le rôle des émotions dans notre vie quotidienne. Celles-ci ont un rôle prépondérant pour nous aider à prendre de bonnes décisions. L’idée d’une prise de décision qu'on a souvent pensée comme rationnelle (« pour prendre des décisions, il faut mettre les émotions de côté ») a été balayée par les neurosciences. On a remarqué que d’un point de vue neuroanatomique, le système émotionnel et le système de raisonnement sont étroitement liés. Cette découverte nous a ouvert beaucoup de portes.

Les émotions que l'on ressent peuvent nous influencer positivement comme négativement. Souvent on s'est rendus compte que quand l'émotion a eu une influence négative sur la prise de décision, c'est que la personne n'a pas su prendre suffisamment conscience de son ressenti et n'as pas pu la réguler . Faire des choix en voulant inhiber l'émotion que l'on ressent, faire comme si elle n'existait pas,  est contre-productif et peut nous amener davantage à prendre de mauvaises décisions.

L’autre découverte majeure se situe au niveau de l'apprentissage. On s'est rendus compte que la curiosité était l'un des moteurs de l'apprentissage. Ce mécanisme est étroitement lié aux émotions : un enfant qui a la bonne réponse en classe ou qui réussit un jeu ressent un sentiment de satisfaction, tout comme les adultes !

À Lire Aussi

Comment les neurosciences remettent en cause ce qu'on pensait savoir sur la culpabilité

D’où viennent nos émotions ? Naissent-elles de stimuli externes ou internes ?

Il y a différents processus. Dans le cas d’un danger imminent (une voiture qui nous fonce dessus par exemple), on reçoit un stimulus de l'environnement extérieur, à la suite de quoi notre cœur va s'accélérer pour permettre à l'adrénaline de monter et à nos muscles de se mettre plus vite en action, ce qui déclenche notre état de vigilance à la fois dans le corps et dans le cerveau.

On peut aussi produire nous-mêmes nos émotions par la pensée. Repenser à un moment triste ou heureux peut avoir des effets sur notre corps. Le cœur bat plus vite ou se serre. On le voit bien sur l'activité cérébrale : quand on pense à quelque chose d'anxiogène, l'amygdale (région de la peur) et le cortex frontal (région de la projection, de l’anticipation) s’activent. 

Comment se servir de ces nouvelles données pour mieux gérer nos émotions ?

Les neurosciences nous rappellent l'importance de prendre en compte le ressenti émotionnel : mieux nous analyser nous-mêmes, savoir pourquoi on ressent ce que l'on ressent. 

On a beaucoup parlé de la fatigue mentale avec la crise sanitaire et le télétravail. Il faut savoir détecter les signaux d'alerte que nous envoie notre cerveau et ne pas les sous-estimer. Après avoir réalisé ça, on peut mettre en place des stratégies et changer ses habitudes pour protéger son cerveau.

Les neurosciences permettent d'avoir un regard plus fin sur nos prises de décision. Ça permet de comprendre comment notre cerveau fonctionne et ça coupe court aux réflexions simplistes du type "fais un effort, tu vas y arriver", "ça ne dépend que de ta volonté", etc.

À Lire Aussi

Mais qu’est ce que la conscience ? De nouvelles études scientifiques tentent d’apporter des réponses au plus vieux mystère de l’Humanité

L’une des découvertes récentes dans les neurosciences est que notre cerveau est plastique. Il se modifie suite au rythme des apprentissages, des expériences et des entraînements. Savoir ce qui se passe en nous se travaille au quotidien et permet de prendre les choses de façon plus sereine et apaisée. 

Quel impact a eu la pandémie sur nos émotions ?

Même si elle semble désagréable, l'émotion de la peur nous a permis de nous protéger contre le virus. Certaines émotions ont bien sûr eu une influence négative. L'isolement social et le climat d’incertitude nous ont aussi envoyé des signaux d'anxiété. La situation ne permettait pas de se projeter ni d'avoir des réponses à nos questions. Ces émotions doivent être prises en compte pour aider ceux qui en souffrent le plus. Il faut s’adapter en conséquence ; par exemple changer les méthodes pédagogiques en ce qui concernent les étudiants ou bien le management dans les entreprises.

Les neurosciences donnent-elles des clés pour savoir ce qui nous rend heureux ? 

C'est une question que la science se pose depuis toujours. Dans la situation actuelle, on voit que les gens ont besoin de se retrouver autant que de se nourrir. C'est un besoin primaire. Les neurosciences ont aussi montré que nous avons besoin des autres pour vivre. Seul, on ne survit pas. On le savait déjà mais cela a été prouvé scientifiquement. Avec le déconfinement, c'est important de recréer du lien, d’échanger sur ce qu'on a vécu pendant cette période difficile et de partager nos émotions.

À Lire Aussi

Des scientifiques découvrent ce qui se passe dans le cerveau d'une patiente sous hypnose

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !