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Ce que le cas Angelina Jolie nous dit de la nette évolution des objectifs de la guerre contre le cancer
©Reuters

Lutte pour la vie

Les actions de lutte contre le cancer se répartissent en deux familles : la guerre globale d'une part, indifférenciée entre les personnes, et l'approche individuelle d'autre part, fondée notamment sur l'étude des prédispositions génétiques. Cette dernière voie est médiatisée par l'actrice Angelina Jolie, qui a récemment subi une ablation des ovaires et des trompes de Fallope.

Philippe Bataille

Philippe Bataille

Philippe Bataille est directeur d'études à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales et directeur du Centre d'analyse et d'intervention sociologiques (CADIS, EHESS-CNRS). Il est également membre du Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin. Ses recherches ont entre autres porté sur le racisme et la discrimination, le sexisme et le féminisme, et plus récemment sur l’expérience médicale et sociale de la maladie grave. Ses travaux actuels suivent ce qu’il advient de la catégorie de sujet dans la relation médicale et de soin. Les recherches en cours suivent des situations cliniques empiriques qui suscitent de si fortes tensions éthiques qu’elles bloquent le système de la décision médicale (éthique clinique), et parfois la conduite de soin (médecine de la reproduction et en soins palliatifs). Son dernier ouvrage est "Vivre et vaincre le cancer" (2016, Editions Autrement).

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Nicole  Delépine

Nicole Delépine

Nicole Delépine ancienne responsable de l'unité de cancérologie pédiatrique de l'hôpital universitaire Raymond Poincaré à Garches( APHP ). Fille de l'un des fondateurs de la Sécurité Sociale, elle a récemment publié La face cachée des médicaments, Le cancer, un fléau qui rapporte et Neuf petits lits sur le trottoir, qui relate la fermeture musclée du dernier service indépendant de cancérologie pédiatrique. Retraitée, elle poursuit son combat pour la liberté de soigner et d’être soigné, le respect du serment d’Hippocrate et du code de Nuremberg en défendant le caractère absolu du consentement éclairé du patient.

Elle publiera le 4 mai 2016  un ouvrage coécrit avec le DR Gérard Delépine chirurgien oncologue et statisticien « Cancer, les bonnes questions à poser à mon médecin » chez Michalon Ed. Egalement publié en 2016, "Soigner ou guérir" paru chez Fauves Editions.

 

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Une approche globale

Atlantico : Sur quels principes cette lutte à destination de l'ensemble de la population se fonde-t-elle ? Est-elle principalement concentrée sur l'étude et le contrôle des effets de nos modes de vie sur la santé ? 

Philippe Bataille: Cette lutte se fonde sur l'image historique du cancer, vu comme un fléau à dimension presque épidémique. Or par certains aspects, cette image est réelle, notamment dans le cas des cancers liés au tabac qui ont une forme épidémique liée à des facteurs de risques identifiés. Cette lutte globale dénonce des expositions, des risques, des modes de vie, des facteurs environnementaux, et elle s'est forgée une base moralisatrice qu'on ne peut pas aujourd'hui condamner. Puis, petit à petit, la lutte contre le cancer a commencé à cibler certains publics, comme étant susceptibles de contracter des cancers : les jeunes et le tabac, les ouvriers et les produits chimiques. On a commencé dans les années 70-80 a cibler les malades potentiels. Aujourd'hui on individualise de plus en plus la lutte, en associant aux facteurs environnementaux le parcours historique et biologique des patients.

Nicole Delépine : Primum non nocere, d’abord ne pas nuire et "il est urgent d’attendre" devrait être inscrit non seulement dans les bureaux des médecins mais dans notre tête à tous… ne serait-ce que pour ne pas se laisser aller à  la médicalisation à outrance de notre société qui transforme tous les bien-portants en malades ! 0n a tous quelque chose qui va de travers et au nom "d’il vaut mieux prévenir que guérir" on entre dans le cercle infernal de la prévention savamment utilisée par la propagande marchande qui depuis déjà longtemps et de plus en plus fait de vous un malade chronique jusqu’à votre mort…  Bingo ! Super le marché de la santé... Mille milliards de dollars cette année dans le monde.

La lutte contre le cancer à destination de la  population de façon globale est plus souvent un effet d’annonce qu’une réalité objective et ne repose pas  toujours sur des études épidémiologiques convaincantes. Le rôle des "cinq fruits et légumes" quotidiens est contesté par des spécialistes de nutrition et cancer qui préfèreraient un régime dit "cétogène" apportant l’essentiel des calories par les lipides tout en réduisant drastiquement les glucides (qu’adorent les cellules cancéreuses) .[1]Plus séduite par cette approche, les études longitudinales sur de nombreuses années manquent pour convaincre les adeptes de la mode 5 fruits et légumes/jour.

Nous avons beaucoup de mal  à convaincre les pouvoirs publics de lancer de grandes études épidémiologiques sur les malades et par exemple sur les enfants cancéreux non suspects d’alcoolisme ou de tabagisme (sauf parfois passif ). Mais encore en mai 2014, la ministre a fait la sourde oreille à la demande des associations se battant pour une meilleure recherche en cancérologie pédiatrique et en particulier en étude des facteurs de risque (Eva pour la vie). On peut supposer que ces travaux n’étant pas rentables à court terme mais sur des décennies, cela n’intéresse pas les politiques qui cherchent des voix.


[1] Le régime cétogène contre le cancer, édtions Thierry Souccar – par U. Kammerer, C. Schlatterer, G Knoll.

Que sait-on justement des effets des modes de vie sur le développement de certains cancers ? Quelles sont les données scientifiques disponibles sur le sujet ? Comment expliquer notamment que tous les fumeurs ne développent par de cancer ?

Philippe Bataille: quand la recherche a mis en avant les facteurs environnementaux dans la formation des cancers, elle a alors mis de côté la recherche sur les données individuelles. D'une certaine façon, on est allé trop vite, sans privilégier l'approche multifactorielle. La recherche actuelle montre que le développement du cancer dépend de chaque patient, et c'est dans cette voie que la recherche se concentre aujourd'hui. Si tous les fumeurs ne développent pas de cancer du poumon, c'est qu'ils n'ont pas forcément de prédisposition pour ce type de cancer, mais cela ne veut pas dire qu'ils ne développeront pas une autre forme de la maladie. 

Donc on commence aujourd'hui à rassembler les données biologiques pour analyser l'évolution du cancer et pouvoir apporter des soins appropriés. La collecte de toutes les données, ce qu'on appelle le Big Data, devrait permettre dans un avenir proche de prédire l'évolution des cancers par des modèles établis et donc de pouvoir apporter la réponse thérapeutique efficace, qui s'est révélée gagnante. Le Big Data permet de faire passer la bataille du préventif au prédicitif.

Nicole Delépine : Il faut distinguer ce que l’on sait et ce que l’on admet de diffuser largement chez la population. Le rôle toxique du tabac n’est quasiment plus contesté, mais l’industrie du tabac a dépensé des sommes fabuleuses pour utiliser des chercheurs bien titrés et renommés censés trouver d’autres causes à l’association cancer-tabac [1] : "Pour les cigarettiers, le risque se concrétise vite. Dès le milieu des années 1980, une trentaine d'Etats américains considèrent que les preuves scientifiques apportées suffisent à bannir la cigarette des lieux publics. D'où une baisse de la consommation. La réaction ne se fait pas attendre. Pour éviter la contagion, les industriels mettent sur pied un réseau mondial de ceux qu'ils nomment dans leurs documents internes les "blouses blanches" : des scientifiques secrètement rémunérés par eux comme consultants. "Le but de ce programme était d'identifier, de former et de promouvoir des scientifiques, médecins ou ingénieurs qui ne seraient pas assimilés à l'industrie par le public", expliquent Joaquin Barnoya et Stanton Glantz (université de Californie à San Francisco), deux des meilleurs connaisseurs des stratégies de l'industrie cigarettière, dans une analyse publiée en 2005 dans le European Journal of Public Health.

En d’autres termes un risque connu est combattu des décennies durant par les lobbies concernés. L’amiante a été détectée comme cancérigène par H Pezerat il y a une cinquantaine d’années mais il a fallu au moins trente ans pour qu’on envisage de désamianter… et encore !

L’exemple actuel est celui des pesticides dont aucune personne sérieuse ne peut nier l’effet cancérigène rapide sur les exposés à grosse dose et certains sur l’ensemble de la population exposée au long cours, c’est-à-dire nous tous . Eh bien que se passe-t-il ? La puissance de Monsanto fait que c’est le vigneron bio qui refuse d’arroser ses vignes quand il n’y en a pas besoin en fonction des parasites, qui est poursuivi en justice ! Et il y a de nombreux exemples de cancérigènes probables ou connus qui sont laissés tranquilles pour ne pas indisposer les lobbies. Il faudrait plutôt un livre que quelques lignes d’un article. Mais pensez aux portables et aux antennes au-dessus des écoles, etc. Alors croyez-vous que l’on mène vraiment une guerre contre le cancer de façon globale ?

Quant au fait qu’on développe ou non un cancer quand on est soumis aux facteurs de risque, cela confirme deux évidences, nous sommes tous différents et nos défenses personnelles aussi, et d’autre part un cancer n’est pas lié à une cause mais bien à un ensemble de facteurs favorables qui à un moment se conjuguent et permettent à la tumeur de se développer .


[1]  La guerre secrète du tabac, la French connection, Le Monde, mai 2012

Quel bilan peut-on faire de cette approche globale, indifférenciée ? S'est-elle montrée efficace ?

Nicole Delépine :  Le bilan est que globalement elle est peu menée par les pouvoirs publics qui sont  sous la pression des lobbies marchands que la prévention  réelle globale ne concerne pas. Supprimer les pesticides, limiter les expositions aux ondes, etc. serait sûrement efficace mais à long terme. Or les cancers ne se développant que lentement.

Philippe Bataille : Cette approche globale a été nécessaire mais a manqué son but : elle s'est révélé nécessaire en informant les population sur les facteurs de risque et en expliquant que nos modes de vie n'étaient pas sans conséquences. On a vu se généraliser l'utilisation de la crème solaire sur les plages, et cela a certainement évité de multiplier les risques. Mais en même temps, elle n'a pas empêché les cancers de se développer : ce n'est pas parce que vous mettez de la crème solaire que vous n'allez pas développer un cancer du sein, et peut-être qu'en essayant de vous protéger de certains cancers, vous allez vous exposer à d'autres formes. L'augmentation continue du nombre de cancers montre dans tous les cas que cette lutte n'a pas été assez efficace, parce qu'elle ne prenait pas en compte l'unicité des individus.

De plus, la dimension moralisatrice de la prévention n'obtient pas la faveur du public, et tend à ne pas inclure la personne qui reçoit le message. Le fumeur sait qu'il prend un risque, mais ça ne le fait pas arrêter de fumer, l'agriculteur connait les risques de son métier, mais il ne peut pas démissionner, et le message s'adressant à tous, la cible ne se sent pas forcément concernée en particulier.

L’utilisation du lexique guerrier a été remise en questions par une étude récente qui montre que les réactions des patients face à ce type de registre langagier étaient plutôt négatives. Comment peut-on expliquer cette réaction ?

Nicole Delépine : On peut supposer que l’expression de guerre en tant que lutte contre le cancer peut être contre-productive dans le cadre d’une prévention plus globale sur les facteurs environnementaux que nous venons d’évoquer. Dans un cas individuel, ce peut être utile pour faire appréhender en particulier aux enfants la nécessité d’utiliser des "armes"  différentes, la chimio, la chirurgie, la radiothérapie pour terrasser l’ennemi. Mais cela est aussi à adapter à chaque patient, dont la sensibilité, comme la tumeur, est unique.

Philippe Bataille : la question du langage est importante dans le processus de guérison, car le patient doit avoir de l'espoir. S'il a le sentiment d'être en infériorité, il va perdre ses forces et ne sera pas en mesure d'avoir une position optimiste, qui compte souvent dans le processus de guérison.

 La guerre individualisée contre le cancer 

Une autre approche consiste à considérer les risques au plan individuel. Sommes-nous tous égaux face au cancer ? Au delà des caractéristiques de l'environnement, existe-t-il des terrains biologiques, ethniques, familiaux qui permettent d'expliquer que se déclarent certains cancers ?

Nicole Delépine : Au-delà de quelques types de cancers familiaux exceptionnels (comme les familles de cancer médullaire de la thyroïde par exemple) ou de familles avec susceptibilité familiale génétique, rares également, chez lesquels on peut voir des cancers des os et des tumeurs cérébrales chez les enfants et des cancers du sein chez les mères, la fréquence globale des cancers familiaux est inférieure à 10  % et les cliniciens savent diagnostiquer ces familles à risque. Pour les autres c’est difficile et parfois on dit que telle femme a un risque doublé de faire tel cancer par rapport à la population moyenne, et cela va parfois vouloir dire 8 pour un million au lieu de 4…

Comme vous le suggérez, chacun est différent et les conditions de vie le sont aussi et donc même avec des risques théoriques semblables en admettant qu’on sache le faire, la probabilité de sortir ou non de ce cancer sera variable. Parce qu’un cancer ne survient comme on l’a souligné que par la coexistence de plusieurs évènements. C’est aussi pour cela que le traitement isolé d’une molécule ciblée sur une anomalie génétique ne peut pas marcher à grande échelle  (il peut y avoir des cas particuliers ) car la tumeur a nécessairement plusieurs mutation . Comme Google, si un circuit web ne marche pas, il prend une autre route, comme vous aussi sur l’autoroute…

Philippe Bataille : L'histoire du cancer est une histoire de l'inégalité. Nous ne sommes égaux ni face au risque de développer un cancer, ni face au risque d'en guérir, ni face à la rapidité de la mortalité. Jusqu'à il y a encore une dizaine d'années, on associait le développement de certains cancer à des problèmes personnels, un vide affectif, une pression morale, on parlait de psycho-oncogenèse. Aujourd'hui on a un peu abandonné ce champ d'étude dans la formation des cancers, sans l'écarter dans le processus de soin. Aujourd'hui on s'appuie plus sur des études biologiques et la prédiction du cancer, et l'enjeu est de pouvoir éviter les amputations ou l'ablation des organes, qui ne doit pas être une approche normée dans la prévention du cancer.

Quelles études scientifiques viennent conforter cette approche ? Où en sommes-nous de la recherche, notamment génétique, sur le sujet ?

Philippe Bataille : La recherche génétique permettra d'ici 4 ou 5 ans de dire qu'il y a une transmission du risque de la pathologie par la voie génétique. Ce sera aussi une avancée dans la compréhension du développement propre à chaque individu du cancer, et donc dans la réponse individuelle à apporter pour combattre la maladie. Aujourd'hui, les études ne sont pas assez précises pour établir des réponses définitives, mais la recherche avance beaucoup sur ces sujets. Pour le moment, les études portent essentiellement sur les moyens de prévenir les rechutes, d'accéder à une guérison définitive. 

Nicole Delépine : La recherche tout venant sur les profils génétiques de la population est pour moi une escroquerie pour  la marchandisation du corps humain ou un fantasme d’illuminés qui veulent nous faire croire que l’homme qui vivra mille ans est déjà né. Rêve, manipulation, argent, folie ? Peu importe. En tous cas pour la grande majorité de l’humain normal souhaitant vivre sa vie sans plus, il faut se protéger de ces études systématiques qui ne serviront pas à vous guérir mieux mais par contre pourront être utilisées par vos assureurs pour augmenter vos primes si on vous trouve un gène prédisposant à tel ou telle maladie. Soyez-en sûr, on en trouvera !

Le fait d'accepter cette inégalité des profils individuels permettrait-il d'adopter une approche plus efficace dans la lutte contre le cancer ? 

Nicole Delépine : Dans l’état actuel des choses, absolument pas, à l’exception des quelques familles à cancers qui ne sont pas plus que quelques centaines en France. Je ne sais pas si c’est la cas d’Angelina Jolie mais étant donné l’influence qu’elle a sur beaucoup de  femmes dans le monde, je ne pense pas que la médiatisation de son vécu médical soit une bonne chose.

Philippe Bataille : Cela permetrrait évidemment d'adopter une approche plus efficace. C'est là le but affiché des nouvelles recherches. L'utilisation des données, du Big Data, sera sans nul doute un outil efficace dans la lutte contre le cancer, car il permettra de comprendre les risques auxquels chaque individu est exposé. Donc au lieu de donner une réponse globale qui peut manquer sa cible et engendrer des effets secondaires, on pourra apporter très exactement la solution thérapeutique efficace.

Faut-il repenser le dépistage et le suivi des patients ? Dans quel sens ? Avec quels outils ? Et avec quels gardes fous ?

Philippe Bataille : Si on peut prédire le cancer et le détecter en amont, c'est nécessairement un progrès. Mais nous n'en sommes pas encore là, et il est trop tôt pour penser aux conséquences que cela pourrait avoir dans les systèmes mis en place pour prévenir l'apparition du cancer, d'autant que la participation active des malades d'aujourd'hui est nécessaires au succès du Big Data.

Nicole Delépine : Il faut arrêter de penser que le "dépistage" permet de guérir plus de personnes, idée qui traîne depuis les années 1930 quand les radiothérapeutes voulaient occuper les dames bénévoles qui s’occupaient des cancéreux dans les mouroirs et qu’ils ont fondé la ligue contre le cancer [1]. Ne pouvant  leur donner de soins à faire ils leur ont donné "la prévention"  et  depuis personne n’a démontré que ce concept sauvait des vies . Par contre il ne faut pas confondre avec le "diagnostic précoce" qui, lui, est  important dans beaucoup de cas. Ne pas laisser traîner un symptôme anormal relève du bon sens ; il faut en parler à son généraliste qui jugera si on peut "attendre et voir", ou s'il faut faire des investigations.

Les expériences des dépistages systématiques comme celui du cancer du sein en France ont montré leurs limites. Ils coûtent deux milliards d’euros annuels et les études scientifiques sérieuses ont démontré qu’ils ne sauvent ni vie, ni sein (autant voire plus de mastectomies) et ont fait passer des milliers de femmes du côté des malades alors qu’un bon nombre n’aurait jamais eu de cancer clinique. Idem pour le cancer de la prostate où même les autorités n’osent plus recommander le dosage du PSA systématique .

Il faut s’opposer de la façon la plus ferme à  la généralisation des dépistages génétiques et à la mise à disposition des assureurs des données médicales. Ce grand danger est dénoncé comme un des risques majeurs de la loi santé en cours de discussion. Aucune percée n’a jamais été démontrée pour les soins du patient et la perte du secret médical, la possibilité du partage des données entre employeur, assureur, etc. est une atteinte à la liberté individuelle garantie par la Constitution. Il faut se battre avec force contre ces mesures antidémocratiques .

Laissez-moi conclure avec quelques phrases de l’excellente tribune du jour du "docteur du 16" qui anticipait vos questions manifestement. Comme l’écrit si bien le "docteur du 16" sur son blog et remet au centre de nos commentaires la gravissime loi de santé en discussion, qui menace la liberté de soigner, la liberté thérapeutique et le secret médical.
Extrait du jour :

"La médicalisation complète de la société.
Marisol Touraine la souhaite, et elle l'associe au néo libéralisme spirituel (Chacun fait ce qu'il veut, veut, veut...) dont l'Eglise de Dépistologie est un des symboles, l'Eglise de Dépistologie qui a comme dogme que tout organe doit être exploré, que tout incidentalome est un bienfait du ciel, que toute "lésion" et/ou comportement "anormal" doivent être pris en compte au risque d'inquiéter à tort, de diagnostiquer à tort ou de sur diagnostiquer ou de sur traiter parce qu'il faut faire plaisir aux industriels de la mammographie, aux industriels de la cancérologie, aux industriels de l'hospitalologie ou de la clinicologie, aux industriels de la cardiologie qui ne peuvent envisager un patient sans le bilanter lourdement, sans le traiter lourdement... Mais Marisol Touraine est aussi la porte-parole du lobby santéo-industriel qui combat, au nom du fameux néo-libéralisme parfois libertarien, les sociétés non savantes de Préventologie : la collusion avec les lobbys n'a pas de frontière connue, pour elle.

Sa volonté d'être in, de participer au mouvement mondial de la croissance ininterrompue, ici de la médicalisation du monde, de la médicalisation des comportements (traiter les déviants), de la médicalisation de la prévention, de la généralisation du dépistage et de la non mise en oeuvre de la prévention, elle n'en connaît rien, elle est seulement un instrument bienveillant et les mafieux n'ont pas besoin de lui mettre une arme contre la tempe, elle le fait de bon coeur
Il nous manque un Balzac pour raconter cette société et ses Illusions perdues etc. etc."

Toute la lettre est aussi savoureuse et je ne sais pas s’il nous manque un Balzac car le docteur du 16 décrit très bien ce milieu soumis à la finance, à la propagande, à la manipulation des plus faibles par les riches et puissants qui font semblant de leur vouloir du bien .


[1]  Naissance d’un fléau par Patrice Pinel, éditions métaillé (histoire de la lutte contre le cancer en France 1890-1940).

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