Ce grave danger pour la démocratie qui se cache derrière l’allergie d’EELV et de ses alliés au Tour de France<!-- --> | Atlantico.fr
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Grégory Doucet maire de lyon EELV Tour de France polémique
Grégory Doucet maire de lyon EELV Tour de France polémique
©JEFF PACHOUD / AFP

Europe Écologie Petits pervers des peuples

Le maire EELV de Lyon, Grégory Doucet, estime que le Tour de France est "polluant" et véhicule une "image machiste". Que révèlent les propos du maire de Lyon ? Une minorité sociologique est-elle en train de mettre à mal l'idée même de la France dont le tour cycliste annuel est un étendard ?

Edouard Husson

Edouard Husson

Universitaire, Edouard Husson a dirigé ESCP Europe Business School de 2012 à 2014 puis a été vice-président de l’Université Paris Sciences & Lettres (PSL). Il est actuellement professeur à l’Institut Franco-Allemand d’Etudes Européennes (à l’Université de Cergy-Pontoise). Spécialiste de l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe, il travaille en particulier sur la modernisation politique des sociétés depuis la Révolution française. Il est l’auteur d’ouvrages et de nombreux articles sur l’histoire de l’Allemagne depuis la Révolution française, l’histoire des mondialisations, l’histoire de la monnaie, l’histoire du nazisme et des autres violences de masse au XXème siècle  ou l’histoire des relations internationales et des conflits contemporains. Il écrit en ce moment une biographie de Benjamin Disraëli. 

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Bruno Durieux

Bruno Durieux

Conseiller au cabinet de Raymond Barre (1976-1981), ancien député (1986-1994), ancien ministre (Santé, 1990-1992 ; Commerce extérieur, 1992-1993), Bruno Durieux est maire de Grignan dans la Drôme. Il est notamment l'auteur de "Contre l'écologisme, Pour une croissance au service de l'environnement", publié aux éditions de Fallois. 

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Simon  Marty

Simon Marty

Simon Marty est journaliste à CNews et Non Stop People. 

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Atlantico.fr : Le maire de Lyon, Grégory Doucet, s'est distingué en prétextant que le Tour de France serait "machiste " et "polluant". Il s'agit du même édile qui quelques jours plus tôt avait refusé de se rendre aux voeux des échevins au nom de la laïcité... avant d'aller le lendemain poser la première pierre sur le chantier d'une nouvelle mosquée. Que signifie ce "deux poids deux mesures" ?

Edouard Husson : On n’est pas dans du « deux poids, deux mesures ». Il s’agit du rejet pur et simple de ce qui fonde la France, à savoir la politique. Non seulement, traiter le tour de France de « machiste » et « polluant » ne veut rien dire sur le fond - pourquoi pas « sadique » et «cancérigène»?  mais cela revient à exprimer une opinion purement personnelle, absurdement personnelle, et à vouloir l’imposer à la société. Cela revient à confondre la responsabilité de maire de Lyon avec un mandat national. C’est nier la vie en commun sur le territoire. C’est nier la mémoire collective française, celle de la « grande Boucle ». Le Tour de France est né en même temps que le sentiment de l’unité national achevée, au début du XXè siècle. En fait Monsieur Doucet déteste la réalité nationale en général, il déteste les origines chrétiennes de la France - Il n’a pas voulu se rendre à Notre-Dame de Fourvière - sans lesquelles il n’y aurait ni liberté ni distinction entre le religieux et le temporel. Il aime l’Islam, religion de fond pré-chrétien, régression par rapport au judaïsme et au christianisme puisqu’elle supprime la distinction entre le spirituel et le temporel. Monsieur Doucet est cohérent puisqu’il est porteur lui-même d’une croyance potentiellement totalitaire, l’écologisme catastrophiste. Ce qui est clair, c’est qu’on est dans la trahison du pacte national et républicain.

Bruno Durieux : A en juger par ce que rapportent les médias, cet élu est typique de l’écologisme triomphant. Postures morales, gauchisme décroissanciste, arrogance et mépris des traditions et fêtes  populaires. Le refus du passage de la patrouille de France au-dessus de Lyon, un jugement, en vérité absolument stupide, sur le tour de France, une pose de la première pierre d’une mosquée au lendemain d’un affront gratuit lors des vœux aux Echevins à Fourvière, des déclarations définitives sur  la réduction du trafic international de l’aéroport de Lyon, l’hostilité à la liaison Lyon-Turin, et bien entendu tous les poncifs de la dota écologistes sur le climat, la 5G, et le reste, promet aux Lyonnais une expérience écologiste en vraie grandeur. Mais la part symbolique pourrait  aussi être importante. Car les écologistes au pouvoir peuvent être réalistes et faire de l'électoralisme autant que de l' écologisme. Le cas de Grenoble, comme celui de Paris, montrent leur habileté à soigner leur propre électorat et se faire réélire, au détriment des habitants des quartiers périphériques ou des communes voisines, souvent de milieux modestes. Cependant, à Lyon, les écologistes contrôlent la ville et la métropole, ce qui rendra plus difficile leur politique de défausse économique et sociale sur les collectivités voisines. A suivre!  

En dehors de quelques commentaires indignés, la partie semble déjà perdue dans l'opinion. Pourtant, on parle d'une minorité sociologique qui est en train de mettre à mal l'idée même de la France dont le tour cycliste annuel est un étendard. Pourquoi si peu de réactions?

Edouard Husson : Je serai moins pessimiste que vous. Pourquoi dites-vous que la partie est perdue dans l’opinion? Quelques maires (Rennes, Lyon), élus à la faveur d’une abstention massive, professent des opinions absurdes sur le Tour de France. On se demande pourquoi les médias les relaient. Ensuite, les organisateurs du Tour se sont-ils tournés vers la puissance publique pour faire valoir leurs droits? Y a-t-il eu entrave au bon déroulement du Tour?  Le problème n’est pas tellement dans les déclarations d’un Grégory Doucet, qui va progressivement se ridiculiser. L’impact de ces déclarations n’est rien à côté du fond: le maire de Lyon pourrait bien participer à une dynamique de la « gauche plurielle », telle que la souhaite Lionel Jospin. Et l’on peut imaginer une situation où un cartel des Khmers Verts, des gauchistes et du PS moribond mais opportuniste se qualifie pour le second tour de la présidentielle, contre Madame Le Pen, aux dépens d’Emmanuel Macron. Comme l’abstention serait massive et les prescripteurs d’opinion appelleraient à voter contre Madame Le Pen, on courrait le risque de se retrouver avec un idéologue d’une incompétence totale à la présidence. Cela ne tiendrait pas longtemps mais le pays serait plongé dans une situation chaotique. Les déclarations d’un maire totalement incompétent, fût-ce celui de Lyon, n’ont aucune importance. En revanche, le déni de réalité d’un monde politico-médiatique, qui pourrait amener à une situation d’ingouvernabilité du pays, c’est le phénomène inquiétant et le seul préoccupant. Il faut comprendre ce qui a rendu possible l’élection d’un Doucet. Comment Gérard Collomb a pu perdre la maîtrise des événements?  Comment par son refus d’union des droites, le camp conservateur a pu laisser élire un personnage relevant du Dictionnaire de la Bêtise.

Bruno Durieux : Jusqu’à présent, pour les électeurs, les écologistes servaient de mouche du coche dans les enjeux environnementaux et de qualité de vie, enjeux dont ils se prétendent les seuls représentants crédibles. Leurs succès aux municipales ont provoqué une sorte de sidération dans l’opinion. Ils bénéficient pour quelques mois encore d’une sorte d’état de grâce, que les élections régionales, si elles leur étaient favorables, pourraient prolonger. Pour le moment le pays, curieux et méfiant, les observe. Le rendez-vous politique important pour la mouvance écologiste est évidemment l’élection présidentielle qui est autrement compliquée pour des idéologues opposés à l’économie de marché, à la libre entreprise, en fait à la croissance et au progrès des conditions de vie matérielle; et dont le discours est incompréhensible pour les milieux populaires. Intolérants, souvent sectaires, ils irritent et inquiètent dans les élections à enjeux de pouvoirs réels.

Les dernières élections municipales ont montré qu'une bonne partie de l'électorat des grandes villes soutenait des programmes EELV.  On peine à savoir si il s'agit de véritables convictions, de simples aspirations à un mieux vivre (mais est ce mieux vivre que de devoir se plier aux dictats ultra-écolos?) ou d'un confortable conformisme de circonstance?

Edouard Husson : Une petite partie, nous parlons de minorités. Les maires se réclamant d’une écologie idéologique ont été élus par défaut. Leurs idées - si l’on peut dire - n’arrivent au pouvoir que parce que LR et le PS continuent leur lent déclin. Madame Hidalgo, étiquetée PS, a sauvé son fauteuil de maire en livrant Paris aux écolos. Il faut comprendre pourquoi aucune candidature n’a pu émerger pour faire éclater l’imposture. Pourquoi Madame Dati, dont la candidature pouvait rassembler bien au-delà du PS,  ne s’est au fond pas battue pour être élue maire alors qu’elle avait très clairement, dans les sondages, au mois de décembre, un potentiel de victoire? Comment le si génial président Macron a-t-il pu à ce point rater la conquête de Paris par LREM? Ce qui me gêne, c’est non pas l’incompétence de Madame Hidalgo - elle est connue depuis longtemps - mais l’incapacité de la droite à s’organiser, se structurer, aller rassembler le Paris populaire souffrant et l’ouest parisien. L’incapacité du macronisme à produire autre chose que de la médiocrité héritée du PS ou des politiques de circonstance rassemblant ce qu’il reste d’un « parti de l’ordre » apeuré par les conséquences sociales de sa paresse intellectuelle et politique.  C’est là qu’il faut travailler. 

Bruno Durieux : Il ne faut pas oublier que les dernières élections municipales ont battu tous les records d’abstention. Les nouveaux maires écologistes des grandes villes n’ont été élus dans leur propre ville qu'avec de très faibles pourcentages de voix, rapportés aux nombre des inscrits. Par ailleurs la gauche divisée, LREM affaiblie par la forte impopularité du gouvernement, les vrais gagnants de cette élection sont en fait les candidats de la droite modérée. Pour spectaculaires que soient les résultats de quelques grandes villes, où l’amélioration de l’environnement est un thème plus sensible qu’ailleurs, les écologistes, et notamment EELV, sont loin d’avoir convaincu dans l’ensemble du pays. Leur chance a été de pouvoir rassembler les aspirations d’un électorat de gauche en déshérence et d’un électorat centriste désorienté, dans le moule sympathique de l’écologie ; cette belle science encore trop rarement distinguée de sa version idéologique et politisée, nettement moins séduisante, et qui n’ont rien de commun.  

Bruno Durieux a publié  « Contre l’écologisme, pour une croissance au service de l’environnement » (2019), aux éditions Bernard de Fallois

Que représente vraiment le bilan carbone du Tour de France?

Simon Marty : Le peloton fait-il fondre la banquise? C'est en tous cas ce que semblent penser les mouvances écolo-tendance qui ramènent le rendez-vous le plus populaire de l'année à un bilan carbone. Car c'est bien de lui dont il s'agit, ce "bilan carbone" qui semble au passage carboniser les neurones de certains pisse froid désireux de gâcher l'unique grande fête gratuite, celle de la terre et de la sueur. Celle de la caravane publicitaire et des enfants criant de bonheur lorsque tombent bonbons et mains géantes de voitures rutilantes transformées en chars de parade. La Grande Boucle estivale immuable et enfin (presque) débarrassée de ces ampoules de dopant se retrouve donc devant le tribunal du vert ultra.

Pensez donc. Etudes à l'appui, le Tour laisse en moyenne tout compris une empreinte CO2 de 340 000 tonnes. Enorme? Rien du tout comparé aux 12 tonnes rejetées par chaque Français chaque année! Et ce calcul est sans compter sur le nombre toujours croissant de voitures hybrides sur le Tour…

Alors pour mieux se rendre compte de la "catastrophe écologique" qu'est le Tour, comparons le à plusieurs autres événements.

A commencer par une Coupe du Monde de football . Celle de 2018 en Russie par exemple a dépensé 2,17 millions de tonnes de CO2.

Le feu d'artifice du 14 juillet à Paris émet "modestement" 14,7 tonnes de CO2 (soit un trajet de 67 000 kilomètres d'une voiture à essence).

Un avion de ligne émet en moyenne une tonne de CO2 par passager sur un vol Paris-New York.

Enfin il conviendrait aux pourfendeurs du Tour d'avoir l'honnêteté de reconnaître  que chaque année, l'organisation du Tour distribue sur les routes ainsi que dans les villes de départ et d'arrivée des sacs poubelles afin de laisser les bords de routes les plus propres possibles. 

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