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Capitalisme alternatif : Mondragon montre l'exemple
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Feu !

Coopérative basque de grande ampleur, Mondragon multiplie les bons points tant sur le plan économique que sur la gestion de son personnel. Voilà qui pourrait donner d'avantage de crédibilité à une nouvelle forme de capitalisme.

Jean-Philippe Larramendy

Jean-Philippe Larramendy

Jean-Philippe Larramendy a été banquier chez Lazard dans les années 80, puis DG d’EDF Capital Investissement dans les années 2000.
Il défend actuellement avec force le capitalisme coopératif, notamment dans le pays basque qu'il affectionne particulièrement.

Il est l'auteur d' Etre basque aujourd'hui .

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Le capitalisme coopératif peut-il constituer une réponse crédible à la crise du capitalisme financier ? Beaucoup d’entre nous ont tendance à penser qu’il s’agit d’une solution marginale voire utopique face aux défis d’une économie mondialisée et compétitive. Les clichés sont nombreux et on réduit souvent les coopératives à l’agroalimentaire, à l’artisanat ou à la reprise par leurs salariés d’entreprises en difficulté.

 Il existe pourtant tout près de notre frontière, au creux d’une vallée du Pays Basque espagnol, un succès coopératif  impressionnant. Il s’appelle Mondragon. Créé en 1956 par un prêtre espagnol, le groupe Mondragon est devenue la première coopérative du monde, avec 85 000 employés, des implantations dans 60 pays et un chiffre d’affaires de 14,7 milliards € en 2009. A titre de comparaison, la totalité des SCOP françaises représente à peine 4 milliards d’euros et comptent deux fois moins d’employés. Les coopératives du groupe Mondragon occupent des positions de leaders européens et mondiaux dans l’industrie (l’électroménager de Fagor-Brandt), la distribution (le réseau espagnol de supermarchés Eroski) et la finance (le groupe détient sa propre banque coopérative).

 Quel est le secret de cette entreprise pas comme les autres qui résiste  aux difficultés économiques graves que connait l’Espagne ? Depuis sa création, le groupe basque est resté fidèle à une vision de l’entreprise à la fois humaine et adaptée aux enjeux de l’économie de marché, alliant éthique sociale et esprit d’entreprise, ancrage locale et vision globale.

La démocratie au coeur du système

 Les travailleurs-associés sont chacun propriétaires d’une part égale du capital de l’entreprise. Une gouvernance démocratique (un homme = un vote) et une hiérarchie « du bas vers le haut » leur permettent de participer pleinement aux décisions. Chaque mois, les employés se réunissent par groupes de 40 autour d’un membre de la direction pour faire un point sur l’activité et les projets. Autre particularité : un écart des salaires de 1 à 6 maximum dans la plupart des coopératives du groupe. Concrètement, une caissière d’un supermarché Eroski gagne seulement 6 fois moins que le président. En France, dans les entreprises du CAC 40, l’écart moyen est de 1 à 200…

Pour faire face à la concurrence internationale, Mondragon privilégie l’investissement productif et de long terme. 30% au moins des bénéfices des coopératives sont collectés via des fonds intercoopératifs pour financer la formation (Mondragon dispose de sa propre université de 5000 étudiants), dix centres de R&D, le développement international et la restructuration des coopératives éventuellement en difficultés.

Gestion de crise exemplaire

Mais c’est surtout la crise qui met en évidence les atouts de ce modèle unique. Au sein du groupe Mondragon, l’emploi n’est pas une variable d’ajustement. D’ailleurs, le licenciement de travailleurs-associés est interdit par les statuts. Quels leviers reste-t-il alors face à une chute de l’activité ? Des efforts extrêmes d’adaptation dont la force est qu’ils sont consentis et partagés par tous. Dès 2008, les employés de Fagor ont décidé collectivement de baisser leur rémunération de 15%, un sacrifice valable pour l’ouvrier comme pour le président. Dans les supermarchés Eroski, tout le monde a accepté d’augmenter son temps de travail de 10% pour la même rémunération. Autre levier face à la crise : les employés des coopératives en difficulté sont dirigés vers des coopératives du groupe plus prospères. Cette stratégie a réussie puisque en pleine crise  (exercice 2009 et 2010)  le groupe basque a dégagé des bénéfices importants; en 2011 il multipliera les implantations en Chine, en Inde et dans les pays du Golfe.

Mondragon en est la preuve : professionnalisé mais fidèle a ses valeurs, le modèle coopératif, trop souvent dédaigné en France, dispose bel et bien d’un très fort potentiel. A ce titre, il mérite d’être considéré, étudié et, surtout, encouragé pour faire mentir l’adage « vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà ».

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