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Dépendance au cannabis, alcoolisme, MST... les retraités y sont de plus en plus sujets.
Dépendance au cannabis, alcoolisme, MST... les retraités y sont de plus en plus sujets.
©Reuters

Old school

Rangés des voitures, les anciens ? Pas tant que ça, d'après une étude britannique. Dépendance au cannabis, alcoolisme, MST... les retraités y sont de plus en plus sujets.

Dan Véléa

Dan Véléa

Le Docteur Dan Véléa est psychiatre addictologue à Paris.

Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur les addictions, dont Toxicomanie et conduites addictives (Heures-de-France). Avec Michel Hautefeuille, il a co-écrit Les addictions à Internet (Payot) et Les drogues de synthèse (PUF, Que sais-je ?, Paris, 2002).

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Atlantico : Le nombre de fumeurs d'herbe aurait été multiplié par 10 chez les 50-64 ans entre 1993 et 2007, selon une étude menée par le King’s College de Londres. En va-t-il de même en France ?

Dan Véléa : A partir du constat clinique, on peut distinguer deux types de catégories :

Les anciens fumeurs, c'est-à-dire la génération des soixante-huitards qui arrive dans cette tranche d'âge aujourd'hui, ou qui continue de fumer de manière un peu plus "soft", avec des concentrations en THC basses, et des substances non transgéniques.

Seconde catégorie : les gens qui ont commencé à fumer vers l'âge de 40 ans dans un contexte de stress, de difficultés économiques et d'évolution professionnelle, et qui trouvent dans le cannabis un palliatif qu'ils n'ont peut-être pas pu trouver dans l'alcool ou les médicaments. Cela ajoute une image cool et branchée.

Ce sont les deux types de seniors et personnes âgées consommateurs de cannabis que je vois en consultation.

A quoi l'augmentation de la consommation de cannabis est-elle due ?

L'augmentation de la consommation de cannabis chez ces populations nous apparaît de plus en plus évidente car c'est un sujet que l'on ose aborder aujourd'hui. Les patients qui viennent en consultation post stress ou post burn-out sont plus à l'aise à l'idée de parler de leur consommation de drogue, qui est une sorte d'amortisseur social et d'adaptation aux pressions de l'existence.

Outre le cannabis, qu'en est est-il de la consommation d'autres drogues chez les seniors et les plus âgés ?

D'un côté, on trouve tout ce qui est illégal : cannabis, cocaïne… tout ce qui est opiacé. L'augmentation peut donc venir du côté festif qu'ils ont connu à une autre époque, et qu'ils ont redécouvert sur le tard. La cocaïne quant à elle est réputée comme étant excitante et comme augmentant les capacités intellectuelles.

L'alcool, dont la consommation est millénaire et mondaine, n'est pas vue de manière péjorative.

Lire à ce sujet : Ces femmes que le cap des 65 ans rend davantage vulnérables à l’alcoolisme

Et il y a le phénomène moins visible mais particulièrement inquiétant de la consommation accrue de médicaments : antidépresseurs, cocktails d'anxiolytiques, somnifères…

Les maladies sexuellement transmissibles seraient également en hausse, avec notamment une augmentation de 50 % d'herpès chez les hommes. Les "vieux" ne seraient pas donc pas si assagis que cela ?

Cela s'explique par un défaut de prévention. Je me souviens que dans les années 2000, la plupart des jeunes avaient un préservatif sur eux, même ceux qui n'étaient pas encore sexuellement actifs, au cas où. Aujourd'hui la prévention a baissé, on ne voit plus aucun spot traitant de la question à la télévision. Et les générations de seniors et de vieux d'aujourd'hui, en plus, n'ont pas été autant sensibilisées.

Le sida a évolué, aussi : certains patients, parmi les premiers contaminés des années 80 et 90, sont toujours vivants grâce à la trithérapie et la quadrithérapie. Nous ne nous trouvons plus dans un contexte de mortalité aussi forte, ce qui amène à un retour des rapports non protégés. Cela pose un problème chez les patients qui ont des soucis d'érection ou des femmes qui sont mécontentes des performances sexuelles de leur conjoint : donc ils abandonnent le préservatif. Entre les MST et le plaisir, il y a un arbitrage à faire, et beaucoup sont prêts à prendre des risques. De plus lorsque vous rajoutez la consommation de substances, les personnes sont désinhibées et ne font plus attention aux messages de prudence qu'envoie le cerveau.

De l'extérieur on pourrait croire qu'arrivés à un certain âge les gens adoptent tous un mode de vie rangé, au contraire, beaucoup persévèrent dans les conduites à risque.

La retraite, et l'inactivité qui peut y être associée, explique-t-elle la recrudescence des comportements à risque chez les seniors et les personnes âgées ?

La retraite n'existera bientôt plus, de toute façon. Humour mis à part, je crois plutôt que c'est l'accumulation de mauvaises habitudes de vie tout au long de l'existence qui cause un épuisement physique à l'arrivée. D'autant que l'arrêt de l'activité professionnelle peut provoquer un passage à vide.

Le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans en cure de désintoxication devrait selon cette étude doubler entre 2001 et 2020…

Les conduites à risque augmentant, c'est compréhensible. Cela peut aussi être expliqué par le fait que de plus en plus de personnes ont conscience du coût social, économique et sanitaire des comportements à risque, et sont donc moins réticentes à demander de l'aide. Cela ne s'explique pas seulement par le fait d'une augmentation de la consommation.

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