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Bidenomics : quel impact pour l’économie d’un (éventuel) président démocrate ?
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J-4

Donald Trump ou Joe Biden ? Le verdict approche, et bien malin qui pourra prédire l'issue de l'élection américaine. Autre prédiction ardue : celle de l'impact qu'aurait l'élection du candidat démocrate sur le plan économique.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Joe Biden Président des États-Unis : nous n’y sommes pas, bien sûr. Qu’en attendre ? Bien malin celui qui pourrait y répondre de manière « chiffrée », si cela se produit. Pourquoi ? Parce que le site officiel du candidat Biden ne nous dit rien sur les effets d’ensemble de ses plans. La preuve : ouvrez le site qui va vous demander des dons de 15 à 100 000 dollars. Passez cette page et allez vers Joe’s Vision. C’est alors que vous allez trouver ces plans : « contre le COVID-19 », « pour mobiliser le talent et le cœur américain pour créer une force de soin et d’éducation du 21ème siècle ». Il y a aussi d’autres plans : pour la santé, le climat, l’égalité des femmes, l’égalité des races, la fin de l’épidémie de « violence des armes », la fin de la crise des opioïdes, le logement, la communauté catholique, américano-musulmane, juive et ainsi de suite. 52 thèmes, au total, à cette date, avec des engagements très généraux et des chiffres de dépenses et parfois de taxations (assez vagues), mais aucune synthèse – selon nous !

Voter pour Joe Biden, comme pour Donald Trump d’ailleurs, ne semble donc pas une affaire de PIB, d’emploi, d’inflation, de déficit budgétaire et extérieur, avec un « programme chiffré qui boucle », comme en France, mais surtout de lutte contre le virus et d’empathie. Bien sûr, il y a une « vision » chez Biden : recréer la classe moyenne, augmenter le salaire minimum à 15 dollars l’heure, mener une économie verte qui créera 10 millions de nouveaux emplois, innover, permettre à chaque étudiant d’avoir les compétences pour obtenir un « bon emploi du 21ème siècle », et ainsi de suite. Les milliards de dépenses vont donc s’ajouter, avec un effet « relance de la demande » comme on dirait ici, suite aux hausses de bas salaires et à la reprise escomptée de l’emploi, mais avec la remise en cause de certaines baisses d’impôts (sans beaucoup de précision, notamment sur les délais) et une remontée des impôts sur le revenu à partir d’une réforme fiscale dite « de bon sens » (sans plus de précisions, là aussi).

Pour avoir des données agrégées, il faut aller ailleurs, au Committee for a Responsable Federal Budget où l’on voit que tous ces plans, qui donnent 800 propositions, pourraient faire monter la dette publique (hors dépenses anti-COVID-19) à 127% du PIB en 2030. Ce qui est intéressant, c’est que ce même organisme indépendant parle d’un ratio dette/PIB à 125% pour le Programme Trump ! Tout ça pour si peu ! En fait, le programme Trump veut continuer à baisser les impôts (pour 1,7 trillion sur 2021-2030) tandis que Biden les monte de 4,3. Ces ressources nouvelles permettent ainsi à Joe Biden de financer plus l’enfance et l’éducation (2,7 trillions contre 0,15 pour Trump), les soins (2 trillions contre 0,15) et les infrastructures (4,5 contre 2,7). En fait, le programme Biden est plus social en dépenses avec plus d’impôts sur les entreprises (de 21 à 28%) et les « riches » (plus de 450 000 dollars de revenu, de 37 à 39,6% plus une taxe sur les plus-values qui passe de 20 à 39,6% pour un couple gagnant plus d’un million de dollars). Joe Biden dépense plus que Trump pour le social mais, à l’échelle française, il ne taxe pas beaucoup plus fort : c’est le déficit et la dette qui paieront (ce qui n’est pas loin de la philosophie trumpienne, sauf que lui taxe moins !). Tout cela est donc chiffré, mais pas par chaque candidat !

En fait, ce qui intéresse les Américains, ce ne sont pas ces « gros chiffres ».

 C’est d’abord le plan COVID-19, avec une équipe plus puissante sous la responsabilité du Dr Fauci, plus écouté peut-être et sûrement pas contredit, pour avoir des vaccins au plus tôt, et surtout des plans de soutien très importants, 3 trillions de dollars en moyenne contre 2 au plus avec Trump, pour sortir de la crise actuelle de l’emploi. La reprise du troisième trimestre n’efface pas la perte du deuxième. L’économie est toujours 3% au-dessous de son niveau d’avant le virus et elle fléchit à nouveau. Sans aide aux chômeurs, surtout ceux qui avaient un bas salaire, la remontée des cas de COVID-19 peut être catastrophique : c’est là que Joe Biden est attendu,

Ce sont ensuite les mesures sur les régulations, assouplies avec D. Trump pour l’emploi surtout ou la pollution, qui seraient revues en sens inverse par Biden, protégeant plus l’emploi.

Bien après sans doute, sont attendus les appels téléphoniques à Angela Merkel, Emmanuel Macron, Boris Johnson, Justin Trudeau, pour renouer les liens et à Benjamin Netanyahu, pour les maintenir.

Nécessaires seront les appels à Xi Jinping et à Vladimir Putin, pour mettre en place des relations « modifiées ». Nombre d’experts se demandent en effet si XI Jinping ne pourrait pas tester la réactivité de Joe Biden, par exemple en mer de Chine ou à Taïwan.

Quant aux hausses d’impôts, elles viendront, mais plus tard, quand l’économie ira mieux. C’est ici que Joe Biden aura à gérer d’éventuels problèmes avec « sa gauche », mais tout dépendra de l’importance de son éventuel succès.

Bref, Biden Président, c’est surtout une question de soutien à l’économie à très court terme, pour sortir de la trappe du COVID-19. Le reste importe bien sûr, ensuite, pour consolider la reprise, puis le leadership américain, mais c’est plus loin.

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