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Banania, Bécassine et les mrappeurs du politiquement correct
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Y'a bon ?

Mrap vs Banania. Devant la cour d'appel de Versailles s'est tenu jeudi 24 mars dernier un procès sur la fin du slogan publicitaire "Y'a bon" de la célèbre marque. Un symbole du politiquement correct pour l'écrivain Christian Millau.

Christian Millau

Christian Millau

Grand reporter, critique littéraire notamment pour le journal Service Littéraire, satiriste, Christian Millau est aussi écrivain.

Parmi ses parutions les plus récentes : Au galop des hussards (Grand prix de l'Académie française de la biographie et prix Joseph-Kessel), Bons baisers du goulag et aux éditions du Rocher,  Le Petit Roman du vin, Journal impoli (prix du livre incorrect 2011), Journal d'un mauvais Français (21 avril 2012) et Dictionnaire d'un peu tout et n'importe quoi (Rocher, 2013)

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A Abidjan, Gbagbo l’usurpateur fait tirer au mortier sur les marchés par ses forces spéciales. Au Sénégal, le président (légitime) Abdoulaye Wade risque d’être renversé d’un jour à l’autre. Pendant ce temps, la cour d’Appel de Versailles s’interroge, aux frais du contribuable, sur cette question vitale pour l’avenir de la civilisation : "Y a bon" ou "Y a pas bon Banania" ?

Une France tremblotante et frileuse ?

Le Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples) que préoccupent fort les tragédies du continent africain, a déclenché un tsunami dans la nurserie où l’on s’efforce de transformer en canards sans tête, confits dans le saindoux du prêt à penser, les héritiers de Voltaire, Guitry, Desproges et Coluche.

Les églises se vident mais d’autres s’emplissent de grenouilles de bénitier que les nouveaux dévots de la bien pensance engraissent à la guimauve du conformisme le plus abyssalement débile. Certains ont dit de la France qu’elle était moisie. Je dirais plutôt que tremblotante et frileuse, elle se couvre de lois et d’interdits comme les vieillards se couvrent de petites laines. L’air y devient aussi lourd que dans une caserne et gare à ceux qui feraient mine d’endosser un uniforme de fantaisie. On ne les enverrait pas aux galères – les nôtres, à propulsion nucléaire ayant souvent du mal à démarrer - mais peut être bien qu’en punition, on leur donnerait à recopier cent fois les 30 pages de Stéphane Hessel.

Donc revoilà sur le banc des prévenus notre brave et sympathique tirailleur « sénégalais » de la guerre de 1914 (originaire, en fait, de toute l’Afrique noire) avec sa bonne bouille rigolarde et ses dents plus blanches qu’une défense d’éléphant, qui, à l’heure du petit déjeuner, tendait une cuillère d’un truc au chocolat et à la banane qui nous faisait monter, à moi et à des milliers d’enfants la gourmandise à la bouche. Il a fallu qu’un certain Collectif des Antillais, Guyanais et Réunionnais, relayé par l’impayable Mrap, réclame 650 000 euros – à peine de quoi se payer un cargo de bananes - de dommages et intérêts à la société qui exploite la marque pour qu’on prenne conscience que l’ami Y’a bon était présenté, en fait, sous les traits d’un abruti, tout juste descendu de son baobab et stupidement heureux de sa servitude coloniale. Autrement dit, une victime de l’ex-Empire abhorré, qui a offert à notre belle jeunesse de l’agreste 95 aussi bien que de Neuilly-Auteuil-Passsy "une image dégradante et raciste des personnes de couleur noire, s’exprimant d’une manière primaire et à peine capables d’aligner trois mots en français".

De Banania à Bécassine...

En 2009, le tribunal de première instance de Nanterre, sans doute dans un moment d’inattention, avait envoyé bouler les Révoltés de la banane. Lesquels l’ayant en travers de la gorge, ont remis le couvert au prétexte qu’en dépit de l’accord passé avec le propriétaire de la marque, six produits portant la mention "Y’a bon" avaient été saisis dans une boutique. On imagine l’ampleur du cataclysme sur tout le continent africain et, pire encore, sur nos banlieues connues pour leur sensibilité à fleur de peau. Verra-t-on les veuves noires déposer à leur tour de justes plaintes car, après tout, il est peu agréable quand on est veuve et noire d’être confondue avec une variété d’araignée venimeuse ? Et puis, il y a aussi notre vieux Johnny qui chante l’insupportable "Noir, c’est noir", triste atteinte à la convivialité humaine.

La place, hélas, me manque pour développer comme l’urgence le réclamerait, un autre motif à colère citoyenne. Je veux parler de la Bécassine de notre enfance, encore présente au rayon des BD. Avec cette victime du racisme anti-breton, présentée comme une crêpe au sommet de l’imbécillité, il est temps qu’on en finisse. Le président de l’Association des États de Bretagne, Le Goarnig Kozh, s’est un jour exprimé avec netteté : "Par tous les moyens de propagande de la presse, de la télévision et d’importantes expositions", on a trop longtemps utilisé, comme pour le nazisme et le communisme, tous les appareils d’Etat contre des individus (les Bretons) sans défense, bafoués et humiliés". Banania et Breton, même combat. D’ailleurs, au début du siècle dernier, la gauche française ne disait-elle pas "peuple noir" pour dénoncer l’emprise des curés sur nos frères d’Armorique ? A propos, où se cache donc "le peuple le plus spirituel de la terre" ?

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