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Baby sitting : comment fixer le salaire de sa nouvelle nounou
©Reuters

Bonnes feuilles

Dans Splendeurs et misères du baby-sitting, Brigitte Hemmerlin et Caroline Pastorelli parviennent à dépassionner la recherche d’une nounou grâce à un récit mêlant enquêtes et témoignages, conseils avisés et solutions salutaires. Extrait de "Splendeurs et misères du baby-sitting", publié chez Calmann-Levy, 2014 (1/2).

 Brigitte  Hemmerlin

Brigitte Hemmerlin

Brigitte Hemmerlin a été avocate au barreau de Paris de 1978 à 1981. Elle est aujourd’hui journaliste et écrivain.

 

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 Caroline  Pastorelli

Caroline Pastorelli

Caroline Pastorelli est journaliste et mère de famille.

 

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18 février 2014. France 2 diffuse dans l’émission « Infrarouge » un documentaire réalisé par Cyril Denvers, Caroline Ibos et Albane Jochaud du Plessis, et consacré aux nounous. À cette occasion, ils interviewent longuement la très médiatique Sylvie Fofana, fondatrice – entre autres – de l’Association nationale des nounous d’Îlede- France, devenue depuis un syndicat. Pour cette jeune femme venue du Mali, mère de deux petits garçons restés en Afrique, et nounou elle-même dans les beaux quartiers, un seul but. Permettre à ses « soeurs » d’exercer leur métier dans de bonnes conditions. Pour cela, elle n’hésite pas à faire le tour des parcs, pour les rallier à sa cause, avec un seul message : « L’union fait la force. » Et les nounous se pressent en nombre dans le petit local où elle les reçoit, les écoute et leur donne des conseils. Horaires, tâches diverses, conflits et bien sûr rémunération, tout y passe. « Moi, explique une nounou, ma patronne me donne 700 euros pour un travail à temps complet. Tout ça parce que je n’ai pas de papiers… » « Et moi, ajoute une autre, elle refuse de me donner des congés. Elle dit que c’est inclus dans le salaire. »

« Je les écoute et je leur réponds : il faut aussi que nous connaissions nos devoirs, clame Sylvie Fofana. Mais il faut avant tout que nous connaissions bien notre convention collective, pour pouvoir défendre nos droits. »

Et pour ce qui concerne le salaire, la convention collective 1 est d’une clarté absolue. En cas de garde simple, la nounou à domicile doit être rémunérée, a minima, sur la base du Smic horaire : 9,53 euros bruts, soit 1 658,22 euros bruts pour quarante heures par semaine – à cette somme s’ajoutent, ne l’oublions pas, le remboursement à 50 % des frais de transport et des éventuelles indemnités kilométriques, sans oublier les congés payés.

Que se passe-t-il si votre nounou fait des heures supplémentaires ? Les huit premières (entre quarante et quarante-huit par semaine) doivent être payées avec une majoration de 25 %. Au-delà, elles seront payées avec une majoration de 50 %. Mais attention. Pour calculer le nombre de ces heures supplémentaires, il faut tenir compte du concept d’« heures de travail effectif » et d’« heures de présence responsables ». Prenez votre souffle, ce qui suit est ardu, mais nécessaire.

« Les heures de travail responsables sont celles au cours desquelles la nounou peut utiliser son temps pour ellemême, tout en restant prête à intervenir s’il y a lieu, ex-plique Jean-Pascal Brisson. Il peut s’agir par exemple de la sieste des enfants, ou du temps pendant lequel ils jouent seuls. »

Bon. Ça va. Jusque-là vous suivez.

« Une heure de présence responsable équivaut à deux tiers d’une heure de travail effectif. En gros on peut considérer que pour cinq heures de garde on compte maximum trois heures de présence responsable et deux heures de travail effectif, soit quatre heures de travail effectif en tout. »

Nous vous sentons perplexe. Pour mieux vous éclairer, prenons un deuxième exemple. Lorsque vous l’aurez embauchée, Jennifer, Maryam ou Fanny sera présente chez vous de 9 heures à 18 heures. Elle travaillera donc quarante-cinq heures par semaine. Mais son contrat prévoira trois heures de présence responsable par jour, soit quinze heures par semaine. Ces quinze heures, auxquelles s’applique un coefficient de deux tiers, sont donc équivalentes à dix heures de travail effectif. Quarante heures de travail effectif devront donc être versées, pour un temps de présence de quarante-cinq heures. CQFD

Mais, nous direz-vous, vous n’avez pas un enfant, mais deux, ou même trois. Vous ne souhaitez pas une garde simple, mais une garde partagée. Vous voulez faire garder votre enfant à mi-temps seulement – ou deux jours par semaine. Et si vous souhaitez des gardes de nuit, sur quelle base la nounou sera-t-elle payée ? Dans tous ces cas de figure, et nous pourrions en imaginer bien d’autres, le calcul du salaire de votre nounou sera modifié, à la hausse (pluralité d’enfants) ou à la baisse (gardes de nuit, gardes partagées). Cela étant dit, ne l’oubliez pas, quel que soit le salaire que vous verserez, il vous faudra payer, aussi, des charges sociales. Pour évaluer leur montant, vous pouvez faire une simulation sur de nombreux sites Internet. Citons, entre autres, celui de la Fédération nationale des particuliers employeurs (Fepem), Parents employeurs zen, et bien sûr Pajemploi, offre de services du réseau des Urssaf, la bible en la matière…

Il ne vous a fallu que quelques minutes pour faire votre calcul. Et vous voilà désemparée, face à la somme que vous allez devoir débourser pour cette très chère garde à domicile. Pas de panique. En tant qu’employeur, vous allez bénéficier d’aides substantielles. Ainsi la Paje, émanation de l’Ursaff, vous aidera-t-elle à payer votre garde d’enfant à domicile en vous versant un « complément de libre choix de garde ». La Caf, de son côté, financera sous condition une partie des cotisations sociales, jusqu’aux 6 ans révolus de vos enfants. Enfin, tous les parents employeurs de nounous bénéficient d’un crédit d’impôts 1. Et si vraiment nous ne vous en sortez pas, vous pourrez toujours, plus tard, opter pour une garde partagée, qui divisera le salaire de votre nounou par deux (voir 2e partie, chapitre 2)…

Récapitulons. Vous avez mené à bien votre entretien préalable. Vous avez annoncé à Jennifer, Maryam ou Fanny qu’elle était embauchée. Vous avez fixé le montant de son salaire a minima – mais vous l’avez assurée que, si elle vous donnait satisfaction, vous l’augmenteriez d’une centaine d’euros, passé la période d’essai. Il est tard. Vous discutez depuis des heures. Vous sentez qu’elle aimerait prendre congé, et vous ne seriez pas fâchée vous-même de retourner vaquer à vos occupations du week-end. Pour autant, prenez la peine d’établir le contrat de travail qui va vous lier. Et, surtout, ne le bâclez pas. Car ce document constitue la base même de votre relation future, et chacune de ses lignes doit être pesée… Pour commencer, votre identité complète (nom, prénom, date et lieu de naissance) et celle de votre nounou doivent être indiquées. N’omettez ni vos téléphones respectifs, ni son numéro de Sécurité sociale, ni celui de sa carte de séjour, si elle est étrangère, ni le numéro d’immatriculation éventuel de son véhicule. Prenez ensuite soin de détailler les termes du contrat : date du début de l’accueil, durée de la période d’essai, horaires, périodes de repos hebdomadaires, salaire, indemnités diverses, des jours fériés aux absences, congés payés, conduite à tenir en cas de modifications éventuelles, références aux différents articles visés du Code du travail et de la convention collective. Faites précéder vos signatures de la mention : « lu et approuvé ».

Vous pouvez, si vous le souhaitez – et c’est souhaitable –, ajouter une annexe précisant, dans le détail également, toutes les consignes que vous voulez faire respecter, mais aussi les tâches que vous voulez déléguer. En la matière, il n’y a qu’une seule règle. Formaliser le plus de choses possibles, et ne pas se dire « elle a l’air super, cette nounou, on verra bien plus tard »…

Enfin, pour clore ce chapitre, maître Jennifer Deroin, avocate spécialisée dans les contrats de travail, nous énonce les pièges à éviter au moment de leur rédaction. Les voici :

– Penser à distinguer les clauses « informatives » telle que celle relative au lieu de travail.

– Bien décrire les missions de la salariée, même s’il ne s’agit pas d’une liste exhaustive, en particulier celles concernant l’équilibre alimentaire, les sorties, la possibilité de donner les bains, la propreté de l’environnement des enfants, les questions liées à la sécurité telles que l’autorisation de conduire les enfants en voiture ainsi que l’interdiction pour la nourrice de faire pénétrer des tiers au domicile des employeurs. – Mentionner les services d’urgence à contacter ainsi que les coordonnées du pédiatre.

– Contractualiser ou non les heures supplémentaires.

– Savoir si on souhaite annualiser ou non le temps de travail. Dans la plupart des contrats, le temps de travail est annualisé et le taux horaire fixé sur une base de 151,67 heures par mois, y compris pour le calcul des heures supplémentaires.

– Établir une clause de protection du droit à la vie privée de la famille qui interdit la diffusion d’images et exige la discrétion de la salariée.

Extrait de "Splendeurs et misères du baby-sitting", de Brigitte Hemmerlin et Caroline Pastorelli, publié chez Calmann-Levy, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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