Avis aux amateurs de VIe République : dans quel état serait la France si François Hollande n’avait pas les institutions de la Ve pour le protéger ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
On célèbre aujourd’hui, l’anniversaire du référendum de 1962 sur l’élection du président de la République au suffrage universel voulu par Charles de Gaulle
On célèbre aujourd’hui, l’anniversaire du référendum de 1962 sur l’élection du président de la République au suffrage universel voulu par Charles de Gaulle
©Reuters

Mieux que rien

Le 28 octobre 1962, les Français se prononçaient à 62,25 % pour l'élection au suffrage universel direct du président de la République, à l'occasion d'un référendum décidé par Charles de Gaulle. François Hollande peut s'en féliciter : sans cela, il aurait peut-être déjà été contraint à la démission.

David Valence

David Valence

David Valence enseigne l'histoire contemporaine à Sciences-Po Paris depuis 2005. 
Ses recherches portent sur l'histoire de la France depuis 1945, en particulier sous l'angle des rapports entre haute fonction publique et pouvoir politique. 
Témoin engagé de la vie politique de notre pays, il travaille régulièrement avec la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol) et a notamment créé, en 2011, le blog Trop Libre, avec l'historien Christophe de Voogd.

Voir la bio »

Atlantico : La cote de popularité du président François Hollande reste au plus bas en octobre à 23%. Une faiblesse record alors que l’affaire Leonarda a encore mis en avant son manque d’autorité, notamment au sein de la majorité. Dans ce contexte, certains y compris à gauche, s’interrogent sur sa légitimité. François Hollande bénéficie-t-il de la solidité des institutions de la Ve République ?

David Valence : Oui, les institutions de la Ve République jouent le rôle d'un véritable filet de sécurité pour François Hollande. Le Président de la République fait l'effet d'un boxeur cogné du droit par les Français, qui rejettent sa politique fiscale, sa politique pénale et sa politique étrangère (les rodomontades syriennes), frappé du gauche par ses alliés écologistes, gratifié d'uppercuts à répétition par ses propres députés (Pascal Cherki, Malek Boutih) et que seule la force des institutions empêche de disparaître du ring, de basculer directement dans le décor. Dans un régime parlementaire, même a l'anglaise, à l'allemande ou a l'espagnole, son gouvernement aurait peut-être déjà été renversé depuis longtemps !

On célèbre aujourd’hui, l’anniversaire du référendum de 1962 sur l’élection du président de la République au suffrage universel. Cette élection voulu par la général de Gaulle a-t-elle fait progresser la démocratie ou a-t-elle enfermé la France dans une sorte de monarchie présidentielle ?

La réforme de 1962 marque la seconde naissance de la Ve République. En y procédant, de Gaulle entendait donner à ses successeurs, qui n'auraient pas sa légitimité historique, les assises nécessaires à la position d' "arbitre", au dessus des partis, qu'il souhaitait pour le chef de l'Etat. Les institutions autorisaient dès lors une interprétation très souple, selon laquelle le Président de la République pouvait être tantôt réduit à des fonctions régaliennes (en cohabitation), tantôt puissant mais préservé par le "fusible" primo-ministériel. Avec le passage au quinquennat, le système majoritaire a connu une consécration excessive, bien loin des conceptions gaulliennes. Le quinquennat a privé le Président de sa dimension d'arbitre, de figure tutélaire qui incarne la Nation. Nous avons désormais à l’Élysée une sorte de chef de parti avec les pouvoirs d'un super-Président. C'est véritablement une curiosité, pour nos voisins européens, que d'observer ce déséquilibre institutionnel.

François Hollande a souvent été comparé à un président du Conseil de la IVe république. Ces difficultés actuelles sont-elles liées à son incompréhension de la logique de la Ve République ? Paradoxalement, sous un régime parlementaire traditionnel serait-il contraint de démissionner ?

Si nous étions en régime parlementaire, François Hollande aurait déjà été mis en minorité sur plusieurs textes, par une coalescence d'intérêts plus que de convictions évidemment entre communistes, écologistes, socialistes "maximalistes" et députés de droite. Bref, certaines de ses réformes auraient été repoussées par une coalition des gauches radicales et des droites, comme le récent texte sur les retraites. De la à penser qu'il aurait été contraint a la démission... Il ne faut pas s'aventurer trop loin dans la politique-fiction.

La Ve République donne une grande stabilité au pouvoir en place, mais le général de Gaulle prenait soin de légitimer régulièrement son pouvoir par l’usage du référendum. Pour sortir de la crise dans laquelle il est actuellement empêtré, François Hollande devrait-il s’en remettre au peuple ?  

En dissolvant l'Assemblée nationale ? Cela lui ôterait définitivement le soutien des élus de gauche : après une victoire probable de la droite, François Hollande serait si affaibli que Manuel Valls se trouverait en position idéale pour le contraindre à renoncer, au terme de son mandat, en 2017, à l'Elysee, et se présenter a sa place pour les socialistes. Ce serait donc un calcul très, très risqué pour lui ! Quant au référendum, sur quoi porterait-il ? Il risquerait, quel qu'en soit le sujet, de virer au "stop ou encore" pour François Hollande.

C'est bien connu : les Français ne répondent jamais aux questions qu'on leur pose lors des référendums! Je fais, plus simplement, confiance aux Français : ils se saisiront des élections municipales des 23 et 30 mars 2014 pour faire connaître leur sentiment sur le gouvernement de leur pays...

Propos recueillis par Alexandre Devecchio

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !