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Avec 56% des Français qui ont l'intention de partir cet été, les vacances font de la résistance
©Reuters

Sans compromis

Selon un sondage exclusif CSA / Atlantico, cet été, malgré la crise, plus de la moitié des Français partira en vacances. Ainsi, alors qu'en temps normal les intentions de départ sont de 60%, cette année 56% des Français affirment qu'ils s'en iront.

Jean Viard

Jean Viard

Jean Viard est directeur de recherches CNRS au CEVIPOF, Centre de recherches politiques de Sciences Po.

Il est spécialiste des temps sociaux (les 35 heures et les vacances), des questions agricoles et de l'aménagement du territoire. 

Il est l'auteur de Penser les vacances (Editions de l'Aube, 2007), et Eloge de la mobilité : Essai sur le capital et la valeur travail (Editions de l'Aube, 2008) et plus récemment de : La France dans le monde qui vient aux Editions de l'Aube.

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Atlantico : 56% des Français envisagent de partir en vacances cet été. Est-ce une proportion similaire ou en baisse par rapport aux précédentes années ? Les vacances font-elles de la résistance ? Est-ce une spécificité française ?

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Jean Viard : L'écart est faible avec la norme puisqu'on est d'habitude autour des 60% d'intention de départ. Quand il y a des difficultés économiques, les gens n'ont pas forcément tendance à moins partir, ils vont plutôt partir moins loin, moins longtemps, en faisant moins d'extras. Le fait de partir n'est pas un élément central dans le choix.

Concernant l'idée d'une spécificité, il faut savoir que les gens qui partent le plus en vacances, sont les habitants de l'Europe du Nord, alors que plus on va au Sud, moins on part. Ceci pour une raison simple : le cœur des vacances d'été, c'est un trajet vers la mer. Après chaque pays a sa culture : par exemple les Allemands, soit ils partent à l'étranger, soit ils profitent de leurs vacances pour faire beaucoup de sport. En France, la plus grosse tendance est de faire un voyage en France, pays où la mer est largement présente. C'est logique car c'est une tendance commune à tous de faire le trajet le plus court pour rejoindre l'objet de son désir. Dans le même ordre d'idée, un habitant de Grenoble ne va pas dans les Pyrénées pour faire du ski... Donc, le Français pourra rester en France pour aller dans une mer chaude, là où l'Allemand va devoir faire un voyage à l'étranger. 

L'écart départ/pas de départ entre les cadres et les ouvriers est de 30 points, et celui entre l'Ile-de-France et le reste du pays entre 20 et 25 points, selon les régions. Cette France à deux vitesses qui se dessine, est-elle un phénomène nouveau ? S'explique-t-il seulement par des raisons économiques ?

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Ce n'est pas une situation nouvelle, et il faut bien se rendre compte que la démocratisation des vacances n'est pas un phénomène terminé. Dans les années 50, environ 20% des gens partaient en vacances, on est monté à 60%, mais ce chiffre a arrêté de grimper dans les années 80-90. Pourquoi ? Les deux grands outils de cette démocratisation des vacances ont été soit les fonctionnaires et tout ce qui allait avec en termes de culture collective, soit les grandes entreprises et leurs CE. Or, on a fait le plein de ce côté-là, mais on a du mal maintenant à atteindre l'un des publics les plus fragiles : les femmes seules avec enfant, d'autant que le cœur des vacances reste souvent la famille. De plus, aujourd'hui, on a tellement l'impression que tout le monde part qu'on ne fait plus de grandes politiques de départs en vacances comme avant.

Il y a aussi un effet considérable "grande ville" : quand vous habitez à Paris, quasiment tout le monde part en vacances par besoin de nature. Même dans les périphéries parisiennes, y compris dans les quartiers défavorisés, votre probabilité de partir est plus importante que si vous habitez dans le Massif central.

S'il y a une stagnation du taux de départ, c'est aussi parce que dans toutes les études d'opinion, et pour toutes les catégories, il y a toujours environ 10% des personnes qui ne partent pas en vacances parce qu'ils n'aiment pas ça. Donc, si on enlève ces personnes, et ceux qui de manière plus ou moins ponctuelle ne veulent pas partir en vacances (grosses dépenses dans l'année comme l'achat d'une maison, femme enceinte, ceux qui habitent déjà dans un "lieu de vacances" pour leur retraite par exemple, etc.) le taux maximum de départ en vacances que l'on peut atteindre se situe autour de 80 ou 85%. Ce chiffre est quasiment atteint pour les cadres et les professions libérales. Il pourrait par contre y avoir 20% de départs en plus chez les ouvriers, d'où l'idée que j'évoquais du manque de grande politique favorisant les départs en vacances pour cette population.

Le budget par personne s'établit nettement en-dessous de la barre des 1000 euros. Les vacances en low cost risquent-t-elles de devenir la norme pour de nombreux ménages français ?

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Je suis perplexe sur la capacité des gens à exprimer précisément un budget vacances précis, à part peut-être dans les milieux populaires où, depuis longtemps d'ailleurs, il y a une certaine attirance pour les formule "tout compris."

Ce qui m'a frappé dans votre sondage, c'est que ceux qui dépensent a priori le plus sont les retraités. On voit donc bien dans la question des vacances que le groupe social le plus riche dans notre société, ce sont bien les retraités. C'est essentiel de voir là ce déséquilibre : ceux qui sont le plus prêt à dépenser de l'argent ce ne sont pas des cadres, ce sont des retraités, tous compris dans le même groupe, alors même qu'il y a des disparités de richesses dans cette catégorie. C'est le résultat d'une société où on privilégie les retraités par rapport aux actifs.    

Trois-quart des Français envisagent de partir en France. Choix économique pour des destinations proches, ou réel engouement des Français pour leur propre pays ?

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La France a une particularité tout à fait singulière : c'est le seul pays au monde où il y a plus de touristes (82 millions par an) que d'habitants. Cela veut dire que l'ensemble du pays a été organisé pour les vacances. Les plages sont aménagées, quasiment tous les monuments historiques ont été rénovés... On est le seul pays au monde à avoir sur tout le territoire cette "double peau" avec énormément d'équipements, partout. Les jeunes et les retraités sont plus dans une pratique du "voyage", souvent à l'étranger, mais quand on est dans la logique de la "transhumance", les gens ne sortent pas d'un territoire, la France premier pays touristique au monde, qui est très largement valorisé.   

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