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Après Rama Yade et Henri Guaino, Michèle Alliot-Marie candidate en 2017 : mais jusqu’où ira l’atomisation de la vie politique française ?
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Toujours plus de cavaliers seuls

La multiplication des candidats à la présidentielle et des intentions de ne pas participer à la primaire affaiblit fortement le parti des Républicains. Une situation symptomatique du défaut d'autorité qu'implique une élection nationale à "quatre tours", et qui est loin de solutionner la crise démocratique.

Dominique Jamet

Dominique Jamet

Dominique Jamet est journaliste et écrivain français.

Il a présidé la Bibliothèque de France et a publié plus d'une vingtaine de romans et d'essais.

Parmi eux : Un traître (Flammarion, 2008), Le Roi est mort, vive la République (Balland, 2009) et Jean-Jaurès, le rêve et l'action (Bayard, 2009)

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Atlantico : Selon Le Monde (voir ici), Michèle Alliot-Marie devrait se porter candidate à l'élection présidentielle de 2017. Elle explique ses motivations en ces termes : "Aujourd'hui, on me parle de primaire, de procédures. Cela ne m'intéresse pas, car ce n'est pas au niveau des enjeux." N'est-ce pas le signe d'un déficit d'autorité chez les Républicains ? A quoi celui-ci est-il dû ?

Dominique Jamet : La multiplication des candidatures devrait plutôt réjouir les démocrates, sur le principe. Pour les gens qui aiment la démocratie, il est assez normal - souhaitable, même - qu'il y ait une multiplicité de partis et de candidats. Cependant, il est clair que nous aurions tort de nous réjouir un peu vite du grand nombre de candidats à l'élection présidentielle de 2017 : c'est davantage dû à un délitement de la classe politique et à un morcellement des partis, ainsi qu'à l'absence (tant à gauche qu'à droite) à l'évidence d'homme ou de femme providentiel(le) capable de se dégager et de faire rentrer dans le rang des candidats qui ne pourraient pas aller plus loin, n'auraient pas de chances d'aboutir ou même de se présenter. Michèle Alliot-Marie vient s'ajouter aux candidats, déjà nombreux, des Républicains. Cela reflète plutôt une mauvaise santé du parti Les Républicains. Il s'agit d'un parti qui, pour le meilleur et pour le pire, avait une tradition d'unité et une tradition anti-débat. A l'heure actuelle, comme le PS, ce parti n'est plus caractérisé par l'unité et est le lieu d'une multitude de débats internes de toutes sortes.

D'autant que Michèle Alliot-Marie dit en filigrane que la participation aux primaires n'est que facultative est qu'elle pourrait se présenter même sans passer par là. C'est également ce que dit Guaino. Tant qu'à rompre l'unité du parti, pourquoi respecter la discipline du spectacle que le parti organise ?

Entre les centristes qui ne participeront pas à la primaire de la droite et les candidats qui font cavalier seul, la droite n'est-elle pas dans une position délicate ? Dans quelle mesure cette diversité des modes de candidature pourrait-elle handicaper la droite dans la perspective de la présidentielle 2017 ? Et plus généralement, cette atomisation de la vie politique est-elle conforme à l'esprit de la Vème République ?

Il est évident que nous ne sommes pas du tout dans le cadre des institutions telles que le Général de Gaulle les concevait. L'idée d'un lien direct entre le candidat et le peuple, sans intermédiaire, est fortement battue en brèche.

Si, effectivement, on a le spectacle de candidats qui ne prennent pas la peine de respecter les procédures de leur propre camp ; ou si d'aventure des candidats battus dans une primaire se présentaient tout de même, il est clair que cela ne formerait pas une base satisfaisante pour la droite. A l'heure actuelle, nous constatons bien que les ambitions personnelles (qui demeurent tout à fait respectables, soit dit en passant) prennent le pas sur toutes les autres considérations.

Quels sont les risques liés à l'organisation d'une primaire ? Certains pourraient-ils avoir l'intention de négocier un poste au sein du prochain gouvernement ?

Vous mettez le doigt sur le vice fondamental des primaires. Il s'agit d'une procédure trois fois condamnable.

Une première fois parce qu'il est paradoxal de subordonner l'autorisation de se présenter à une élection à un suffrage censitaire. Il y a déjà les 500 parrainages pour la candidature officielle à la présidence - que je conteste également - mais dans le cadre de la primaire des LR on subordonne cette candidature au soutien de 20 parlementaires, de 250 élus et de 2500 militants la permission de se présenter. Dès le départ, on bride les candidatures libres, spontanées, populaires. Ce sont les candidatures de notables qui émergent.

Une deuxième fois parce que l'on soupçonne que les primaires donnent lieu à des manifestations, à des procédés suspects... A partir du moment où un parti et ses dirigeants prennent en main l'organisation d'une élection, il y a quelque chose qui gène un peu. L'organisation des élections devrait, en principe, être confiée à des autorités neutres. Ce n'est pas le cas.

Une troisième fois parce qu'il est clair que certains négocieront, le moment venu, leur ralliement, leur adhésion ou leur soutien en fonction des votes qu'ils auront recueillis. Cette élection donne lieu à des tractations : on est encore très loin de la simplicité et de la démocratisation auxquels prétendent les défenseurs du système des primaires.

Le risque se pose-t-il de la même manière pour le Parti socialiste, qui organisera une primaire pour désigner son candidat de 2017 ? 

Bien évidemment. Lors de la première primaire du Parti socialiste, on a bien constaté l'instrumentalisation des primaires par Arnaud Montebourg et Manuel Valls, qui ont fait de leurs résultats la base de leurs ascensions ultérieures. Dans un Parti socialiste morcelé où le président Hollande n'est qu'un candidat légitime, on imagine bien toutes les arrières pensées et toutes les manœuvres qui vont présider à l'organisation de cette primaire. Qu'elle se déroule avec François Hollande ou sans lui.

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