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Après la finance, le libre-échange : et François Hollande tenta de nous faire croire qu'il était devenu un opposant farouche au traité transatlantique
©Reuters

Paroles, paroles, paroles

La posture de François Hollande contre la signature du TTIP se heurtera à la détermination d'Angela Merkel. Et comme pour bon nombre de sujets, la France finira par s'aligner sur l'Allemagne.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Atlantico : François Hollande a refusé que le Traité transatlantique fasse partie des sujets abordés à l'occasion du G5 qui a eu lieu à Hanovre. Plusieurs de ses proches, dont Jean-Christophe Cambadélis, ont laissé entendre à cette occasion que la France pourrait refuser de signer un tel traité. Quelle crédibilité accorder à cette hypothèse ?

Eric Verhaeghe : La menace vaut son pesant de cacahuètes. Tout le monde sait en effet que Merkel et Obama jouent une partition à deux pour pousser l'Union européenne à signer rapidement le traité transatlantique. Cet empressement est accru par la possibilité d'une victoire de Trump aux élections. Trump a d'ores et déjà annoncé qu'il remettrait en cause le libre-échange et les grands accords transcontinentaux. Les défenseurs du TAFTA peuvent donc se faire du souci sur l'avenir du traité dans l'hypothèse où il ne serait pas signé avant la fin de l'année, c'est-à-dire avant la fin du mandat d'Obama. Les grands coups de moulinet de François Hollande contre la signature se heurteront donc à la détermination allemande à signer. Quand on se souvient des innombrables ralliements de François Hollande aux positions de Merkel, après les mêmes coups de moulinet dans l'air, sur tous les sujets, on peut donc être rassurés : après quelques déclarations "don quichottesques", le gouvernement français se ralliera à la signature du traité. Bien entendu, on aura droit à quelques communiqués victorieux parce qu'une ou deux virgules auront changé de place, mais, sur le fond, rien ne changera et la France fera comme l'Allemagne lui dira de faire. 

Pendant sa campagne de 2012, François Hollande avait déclaré : "Mon ennemi, c'est la finance." Depuis, force est de constater que cette posture avait surtout pour objectif de lui assurer les suffrages d'une gauche antilibérale. François Hollande miserait-il sur une stratégie similaire en s'appuyant sur un très improbable refus de signer le TTIP ?

Probablement, à cette différence près que le traité devrait être adopté d'ici à la fin de l'année, c'est-à-dire avant la présidentielle. L'exercice sera donc assez difficile à gérer pour François Hollande, dans la mesure où il devra expliquer pourquoi il finit par signer ce traité après en avoir dit pis-que-pendre. Il devra donc apporter de sérieux arguments pour expliquer son refus de signer dans un premier temps, alors que la France ne s'est pas illustrée jusqu'ici par son farouche engagement contre ce traité. Dans l'hypothèse où il voudrait ensuite se rallier à la signature, le même travail d'explication devra être fourni, mais cette fois dans un sens inverse. Il n'est pas du tout assuré qu'une simple logique de posture dans ce dossier soit politiquement payante. Toute la difficulté est là. Penser que le jeu en vaille la chandelle relève probablement de l'erreur d'analyse. 

Quelles sont les conséquences politiques de ce type de postures ? François Hollande peut-il de nouveau être élu grâce à des voix de gauche antilibérale ou les électeurs vont-ils lui faire payer cher son renoncement à combattre la finance, et son vrai faux veto sur le traité transatlantique ?

François Hollande a ce fonctionnement curieux qui consiste à changer en permanence de position sur les dossiers. C'est la fameuse synthèse hollandaise, qui consiste à dire tout et son contraire pour se fâcher le moins possible avec l'opinion publique. Hollande a l'illusion que cette technique qui lui a permis de tenir le Parti Socialiste pendant des années (parce que le Parti Socialiste fonctionne comme ça) constitue une méthode satisfaisante de gouvernement. Mais sur ce point, on peut se souvenir des propos de Cécile Duflot dans son ouvrage après sa sortie du gouvernement : "A force de vouloir être le président de tout le monde, il n'est le président de personne". Une grande part du discrédit qui pèse sur François Hollande tient à cette méthode : la fonction présidentielle telle qu'elle est conçue par les Français suppose des prises de position claires et une forme de constance dans l'action. Avec François Hollande, les Français ont plus que jamais le sentiment d'une vacuité du pouvoir et d'une référence permanente à des changements de pied qui rend l'action illisible et imprévisible. Les conditions dans lesquelles la loi El-Khomri a été propulsée sur le devant de la scène l'ont confirmé : les réformes apparaissent systématiquement comme le résultat de calculs à la petite semaine où l'inspiration politique est totalement perdue. 

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