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Alerte aux nouveaux variants du Coronavirus : l’Occident peut-il encore échapper à un bilan humain tragique sans adopter les méthodes asiatiques face à l’épidémie ?
©ALAIN JOCARD / AFP

Evolution du virus

Le comité d’urgence de l’OMS se penche jeudi sur les nouveaux variants du coronavirus, qui inquiètent les autorités dans le monde. La persistance du virus favorise-t-elle la multiplication de nouveaux variants, rendant l'épidémie d’autant plus mortelle et hors de contrôle ?

Claude-Alexandre Gustave

Claude-Alexandre Gustave

Claude-Alexandre Gustave est Biologiste médical, ancien Assistant Hospitalo-Universitaire en microbiologie et ancien Assistant Spécialiste en immunologie. 

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Atlantico.fr : Cela fait presque un an que le Covid-19 est arrivé sur notre territoire et l’épidémie ne semble pas perdre en intensité malgré les mesures gouvernementales. Cette persistance du virus sur plusieurs mois favorise-t-elle la multiplication de nouveaux variants, la rendant d’autant plus mortelle et hors de contrôle ?

Claude Alexandre Gustave : L’objectif des mesures gouvernementales n’est pas de mettre un terme à l’épidémie mais uniquement d’en contrôler la vitesse de propagation de façon à rester sous les seuils de rupture du système de soins. C’est une stratégie largement suivie en Occident, « aplatir les courbes ».

Elle conduit à une gestion à coup de « stop & go » avec des bilans sanitaires et économiques parmi les plus sévères du monde.

En ce sens, il n’est pas surprenant que le virus persiste toujours à des niveaux élevés dans la population. Cette situation a bien été résumée dans l’expression « vivre avec le virus ».

Bien qu’un virus ne soit pas un être vivant, il n’en reste pas moins un parasite de cellules vivantes, et dépend de leur machinerie pour se répliquer et se propager.

Il reste donc soumis à deux lois universelles : l’évolution (par accumulation progressive de mutations) et la sélection naturelle (en fonction des avantages que certaines mutations peuvent lui conférer dans un environnement donné).

Chez un seul infecté, des trillions de particules virales sont générées durant le développement de la COVID.

Chacune de ces particules virales a nécessité une réplication virale pour être générée. Or c’est notamment durant cette réplication virale que les mutations surviennent.

Pour le dire simplement, on peut les comparer à des erreurs de recopiage du génome virale. Elles apparaissent aléatoirement au gré des erreurs commises par les enzymes chargées de ce « recopiage ».

Ainsi, ces trillions de particules virales, générées chez un seul infecté, sont autant d’occasions pour le virus d’accumuler des mutations.

Rien qu’en Europe, on compte actuellement des millions d’infectés.

On comprend alors, au vu de ces nombres vertigineux, que chaque mutation théoriquement possible est présente en au moins 1 exemplaire, dans au moins 1 particule virale, chez au moins 1 infecté à chaque instant.

Toutes ces mutations ne sont pas « viables ». Certaines empêchent le virus de s’assembler, d’autre l’empêchent d’effectuer son cycle de réplication… Elles sont spontanément éliminées avec les virus défectueux qui les portent.

D’autres mutations ne se traduisent pas par des changements de structure ou de comportement du virus. Elles sont dites « silencieuses ». Elle apparaissent sporadiquement.

Enfin, certaines mutations aboutissent à des changements de comportement du virus, notamment par modification de sa structure. Il peut s’agir de petits changements ponctuels, de pertes de fragments protéiques entiers…

Selon les conditions, ces changements peuvent conférer un avantage au virus (se répliquer plus vite, gagner en infectiosité, échapper au système immunitaire…). La sélection naturelle conduit alors de tels mutants à se répandre préférentiellement aux autres, et finalement à remplacer les versions antérieures du virus.

En bref, plus on laisse le virus circuler, plus il a d’occasions de se répliquer.

Plus il se réplique, plus il accumule de mutations.

Ainsi, en laissant le virus circuler, on accroît la probabilité de voir émerger des variants dont le comportement change, y compris en notre défaveur.

C’est ce que l’on observe avec les 3 variants qui nous préoccupent actuellement et qui ont vraisemblablement émergé dans des pays où l’épidémie est restée très fortement active :

  • le variant 501Y.V1, B.1.1.7 au Royaume-Uni ;

  • le variant 501Y.V2, B.1.351 en Afrique du Sud ;

  • le variant B.1.1.248 au Brésil.

Que devons-nous retenir des récentes informations que nous avons sur les différentes mutations du virus ? Sont-elles plus mortelles ?

Ce qui est frappant avec les 3 variants qui préoccupent la communauté scientifique, c’est le phénomène de « convergence ».

Ils sont apparus indépendamment dans des régions très éloignées les unes des autres (Afrique du Sud, Brésil, Royaume-Uni), et pourtant, ils ont plusieurs mutations en commun et associées à la même tendance de diffusion rapide et remplacement des versions antérieures du virus.

Ces variants sont donc probablement la manifestation d’une adaptation du virus à l’humain, en acquérant des facultés accrues de diffusion, voire de résistance à son immunité.

Sans rentrer dans un catalogue de mutations, il est important d’insister sur les plus critiques ou documentées.

La délétion H69/V70 correspond à la perte des acides aminés « histidine » (H) et « valine » (V) en position 69 et 70 dans la sous-unité S1 de la protéine Spike.

Cette délétion a été largement médiatisée en lien avec le variant britannique (dont elle n’est pas spécifique), notamment à cause de son impact sur certains tests de dépistage.

Avec certains kits de RT-PCR ciblant 3 gènes du SARS-CoV-2 (gènes S, N et Orf1), cette délétion peut conduire à un profil atypique avec une détection de seulement 2 gènes (N, Orf1) sans détection du gène S. C’est un profil devant faire suspecter une infection par le variant britannique et motiver un séquençage pour le confirmer.

Cette délétion peut aussi mettre en défaut certains tests antigéniques qui ne cibleraient que la protéine S du virus. Dans le cas d’une infection par un variant portant cette délétion, ces tests antigéniques pourraient être incapables de détecter le virus, avec un résultat faussement négatif.

La DGS a établi une liste des tests antigéniques qui contournent ce problème et qui sont désormais les seuls autorisés.

La mutation N501Y correspond au changement ponctuel de l’acide aminé « asparagine » par la « tyrosine », en position 501 sur la protéine S.

Cette position 501 est située dans la portion de protéine S directement impliquée dans la fixation au récepteur ACE2 sur nos cellules. On appelle cette portion « RBD » (Receptor Binding Domain ou Domaine de liaison au récepteur).

Les 3 variants évoqués portent cette mutation.

Elle est particulièrement surveillée car elle semble être associée à une augmentation de l’infectiosité des souches de SARS-CoV-2 qui la portent.

En bref, la protéine S (la clé) existe sous deux conformations (ouverte ou fermée). Pour se fixer  au récepteur ACE2 (serrure), elle doit être en position ouverte.

D’après une étude publiée sur BioRxiv fin décembre 2020, la mutation N501Y semble permettre à la protéine S de rester en conformation ouverte 40% plus longtemps, facilitant ainsi sa fixation à ACE2.

D’après une seconde étude, publiée sur BioRxiv début janvier 2021, la mutation N501Y confère une infectiosité 3,5 fois plus élevée au mutant qui la porte par rapport aux versions « sauvages » (non mutées) du virus.

Quand elle combinée à la mutation E484K, ce gain d’infectiosité devient 13 fois plus important !!!

Plus inquiétant, dans cette même étude, les auteurs ont montré qu’il était possible de voir émerger d’autres mutations capables de conférer une infectiosité 600 fois plus élevée.

Laisser le virus circuler et retarder encore la mise en œuvre de stratégies de suppression virale nous expose donc à l’émergence de souches encore bien plus contagieuses que les variants qui nous préoccupent actuellement et qui semblent déjà très difficiles à contenir.

Pour rassurer, on entend souvent que ces nouveaux variants ne sont pas plus virulents mais seulement plus contagieux.

Une souche plus virulente se caractérise par une létalité augmentée (nombre de morts parmi les infectés).

Une souche plus contagieuse se caractérise par un nombre de contaminés augmenté, sans que sa létalité ne soit nécessairement modifiée.

Intuitivement, on peut effectivement croire qu’une souche plus virulente serait bien plus inquiétante qu’une souche plus contagieuse.

Pourtant, les mathématiques et l’épidémiologie nous prouvent le contraire.

L’épidémiologiste Adam KUCHARSKI a bien illustré ce problème en comparant l’évolution de la mortalité induite par une souche plus virulente ou par une souche plus contagieuse.

Le résultat est sans appel : l’augmentation de mortalité provoquée par une souche plus contagieuse est sans commune mesure avec l’effet produit par une souche plus virulente.

La mutation E484K, évoquée ci-dessus, est également inquiétante du point de vue de l’échappement immunitaire.

Outre un net gain d’infectiosité, cette mutation semble associée à la capacité du virus à échapper à l’action neutralisante des anticorps produits après l’infection par les versions antérieures du virus.

Cette mutation correspond à un changement d’acide aminé « glutamate » par la « lysine » en position 484 dans la protéine S. Là encore, cette position est située dans le « RBD » de Spike.

Plusieurs études on déjà montré que cette mutation était associée à une forte réduction de la neutralisation du virus par les anticorps. En d’autres termes, cette mutation a montré sa capacité à rendre les anticorps inefficaces face aux mutants qui la porte.

Cette mutation n’est pas présente dans le variant britannique, mais elle est retrouvée dans les variants sud-africains et brésiliens notamment.

Ces derniers pourraient donc constituer un problème encore plus grave que le variant britannique, car ils pourraient être encore plus contagieux, voire parvenir à contourner au moins partiellement l’immunité acquise après une première infection ou après vaccination.

Sur ce point, la mutation E484K a déjà montré sa capacité à quasiment abolir les capacités de neutralisation virale par des anticorps monoclonaux (anticorps sélectionnés, ne ciblant qu’une section très précise de la protéine S, parfois utilisés comme traitement curatif par Eli Lilly® ou Regeneron®).

Cette mutation a également montré sa capacité à réduire de plus de 90% la capacité de neutralisation virale par des anticorps polyclonaux produits après l’infection par SARS-CoV-2.

Une étude publiée sur BioRxiv début janvier 2021, montre que cet effet n’était heureusement pas observé pour tous les patients testés, mais tout de même observé chez 6 des 11 patients inclus dans l’étude.

Ce phénomène est préoccupant dans un contexte de déploiement vaccinal d’une part, et de diffusion de ces variants d’autre part.

Pour le moment, nous ne savons toujours pas si ces variants remettent en question l’efficacité des vaccins en cours de déploiement.

Pfizer/BioNTech a publié ses premiers résultats concernant uniquement l’impact de la mutation N501Y sur la capacité de neutralisation virale par les anticorps induits par la vaccination.

Cette étude n’a pas mis en évidence d’impact significatif de la mutation N501Y sur la capacité de neutralisation virale.

Cependant, comme le rappelle l’équipe scientifique de Pfizer/BioNTech, ces résultats ne prédisent rien de l’effet des autres mutations qui sont encore en cours d’analyse.

Les pays asiatiques ont fait le choix d’une politique d’éradication du virus, quand les Occidentaux semblent avoir favorisé une politique de contrôle. Est-il possible de se sortir de cette épidémie sans passer par les méthodes asiatiques qui ont fait leurs preuves (tracing, isolement...) ?

Pour répondre à cette question on peut déjà partir d’un constat simple en comparant les résultats obtenus par les pays qui ont suivi les stratégies de suppression virale, et les pays, comme le nôtre, qui ont cru pouvoir contrôler l’épidémie en limitant sa vitesse de propagation de façon à étaler les cas et décès dans le temps pour éviter la submersion du système de soins (stratégie d’atténuation).

Les stratégies de suppression virale déployées notamment en Extrême-Orient (Chine continentale, Hong-Kong, Corée du Sud, Singapour, Taïwan, Thaïlande, Vietnam), en Océanie (Australie, Nouvelle-Zélande), ou encore au Sénégal, en Sierra-Leone, en Uruguay ou dans les provinces atlantiques du Canada, ont permis d’obtenir des bilans sanitaires anecdotiques, des effets économiques mineurs et éviter une véritable torture psychologique à leur population qui n’a pas eu à subir un sursis permanent de nouvelles restrictions et une peur permanente de l’exposition à des niveaux extrêmes de circulation virale.

Les stratégies de « contrôle » déployées notamment en Europe, Royaume-Uni, Russie, Etats-Unis, Québec, Amérique latine, ont conduit aux bilans sanitaires les plus tragiques, aux effondrements économiques les plus sévères, et aux souffrances psychologiques les plus fortes en raison des tragédies familiales, pertes d’accès aux soins, perte d’activité professionnelle, de revenus… Et aussi par l’absence de perspective optimiste à moyen terme.

On peut également faire le constat qu’avec cette stratégie d’atténuation, nous ne sommes pas parvenus à contrôler l’épidémie quand elle reposait sur des variants viraux bien moins contagieux que ceux qui diffusent actuellement.

Il n’y a donc pas de raison que nous parvenions à mieux contrôler la situation désormais. D’autant plus que la « fatigue pandémique » frappe la population de plein fouet et érode fortement l’adhésion aux mesures barrières et l’acceptation de nouvelles mesures sanitaires.

Sur ces simples constats, on aurait dû comprendre depuis de nombreux mois qu’il est urgent d’instaurer ces stratégies de suppression virale sur le modèle asiatique ou océanien. D’autant plus qu’elles ont incontestablement et magistralement fait leurs preuves, et qu’elles sont déjà largement déclinées dans de nombreux pays (pour plus de 2 milliards d’habitants) et donc facilement adaptables ; il n’y a même pas à imaginer de nouveaux outils mais simplement à importer et adapter des méthodes déjà à l’œuvre.

On peut alors y opposer l’argument du déploiement des vaccins.

Il ne faut cependant pas oublier qu’aucune campagne vaccinale n’ira plus vite qu’une croissance exponentielle des contaminations.

Croire ainsi que la campagne de vaccination évitera le recours à des mesures sanitaires plus restrictives, voire à des confinement totaux, est une erreur.

Avec cette campagne vaccinale, on ne peut arrêter l’emballement épidémique actuel, on peut au mieux préparer le 2ème semestre 2021 en espérant le rendre moins tragique que les mois que nous venons de connaître.

D’autre part, vacciner massivement alors que la prévalence virale est extrêmement élevée, pourrait induire une pression immunitaire supplémentaire et accélérer l’émergence de nouveaux mutants capables d’échapper à cette immunité.

Laisser le virus circuler lui laisse d’innombrables occasions de muter.

Si en parallèle on immunise la population, le virus se retrouve confronter à une pression de sélection immunitaire. Alors seuls les mutants capables de la contourner parviennent encore à diffuser, et progressivement, ils remplacent les autres variants.

On sélectionne ainsi les mutants capables d’échapper à cette immunité.

Ce phénomène vaut également pour l’immunité naturelle obtenue après l’infection.

Plus l’épidémie diffuse, plus cette immunité naturelle s’étend et favorise de la même manière que les vaccins l’émergence de nouveaux mutants capables de lui échapper.

La situation de Manaus (Brésil) en est peut-être l’illustration :

Croire qu’on mettrait un terme à l’épidémie en laissant la population s’infectée, ou bien en la vaccinant alors que le virus circule très activement, est une erreur !

L’OMS l’a encore rappelé en insistant sur la mauvaise compréhension du concept d’immunité collective.

La population peut-être immunisée (naturellement après l’infection ou par la vaccination) contre le virus, mais cette même immunité induit une pression de sélection sur le virus qui finit par acquérir des mutations lui permettant d’échapper à cette immunité.

C’est déjà décrit pour les coronavirus endémiques (comme le Coronavirus 229E, qui évolue progressivement pour échapper à notre immunité.

Les variants dont nous avons parlé (britannique, sud-africain, brésilien…) sont déjà là et diffusent.

S’ils sont capables d’échapper à l’immunité, aller vite dans la vaccination ne les arrêtera pas.

L’urgence était, est et restera donc toujours l’instauration de stratégie de SUPPRESSION VIRALE, qui permettront :

  1. De limiter très fortement le bilan sanitaire, le nombre de décès, la morbi-mortalité au long cours, la pression sur le système de soins et retard de soins/diagnostiques pour les autres malades

  2. De limiter très fortement l’impact économique de la pandémie en arrêtant d’handicaper sans fin l’activité économique du pays

  3. De limiter la circulation virale et ainsi réduire la probabilité de faire émerger des mutants plus contagieux et/ou virulents et/ou en échappement immunitaire, et ainsi protéger l’efficacité des vaccins

L’absence d’adaptation face à la situation est-elle due à une méconnaissance du gouvernement sur le comportement de l’épidémie ? Pourquoi n’allons-nous pas vers une éradication totale de l’épidémie quand finalement toutes les mesures du “vivre avec” ne fonctionnent pas ? 

Il est difficile de répondre.

Une méconnaissance ? Peut-être, l’argument « d’humilité face au virus qu’on ne connaît pas » à souvent été mis en avant dans le discours public tant politique que médical.

Pourtant, pour plus de 2 milliards d’habitants, des outils de maîtrise très efficaces sont pourtant à l’œuvre, et pour beaucoup, ils ont littéralement écrasé l’épidémie depuis des mois.

Si méconnaissance il y a, alors il serait urgent de se rapprocher des pays victorieux pour solliciter leur savoir et leur aide.

Du point de vue de la suppression virale et de l’arrêt des contaminations, notre stratégie d’atténuation prend le problème à l’envers.

La suppression virale voudrait qu’on agisse très fortement, très précocement mais donc très brièvement et localement dès les premiers cas détectés.

Comme on le dit pour un incendie : « 3 secondes = 1 verre d’eau ; 30 secondes = 1 seau d’eau ; 3 min =  les pompiers » !

Avec notre stratégie d’atténuation, nous ne faisons que courir après des courbes épidémiologiques, à suivre des indicateurs lacunaires et tardifs en appliquant une réponse graduée, systématiquement vouée à être insuffisante pour contrôlée l’épidémie et donc menant inexorablement à un brasier général et la nécessiter de tout bloquer.

On peut aussi s’interroger sur l’impact de certaines idéologies qui ont diffusé plus ou moins largement en occident, notamment via la déclaration de Great Barrington.

Les signataires de cette déclaration ont fortement soutenu l’approche scientifiquement absurde d’une protection ciblée des personnes vulnérables (par le confinement ou la vaccination ciblée par exemple), afin de permettre de lever les mesures sanitaires pour le reste de la population qui aurait alors pu reprendre une activité normale tout en s’infectant très largement. L’objectif étant alors double : maintenir l’activité économique tout en promouvant l’immunité collective par infection.

C’est une absurdité sans nom, en tous points :

  • la protection ciblée des personnes vulnérables n’est simplement pas possible si le virus circule activement dans la population. Tous les pays qui ont tenté cela affichent des bilans catastrophiques chez leurs seniors (l’exemple majeur étant la Suède dont les autorités ont reconnu l’échec total de cette approche) ;

  • le maintien de l’activité économique malgré une circulation virale active dans la population n’est pas possible et conduit malgré tout à l’effondrement car l’épidémie génère de toute façon une morbi-mortalité qui désorganise l’activité, les entreprises, et provoque une crise de la demande.

L’exemple type de ce paradoxe est le Brésil, qui a limité fortement les mesures sanitaires de lutte contre l’épidémie et qui n’a pourtant pas évité la faillite ;

  • croire que laisser le virus diffuser dans la population conduit à une immunité collective qui arrête l’épidémie traduit une profonde méconnaissance de ce concept et de la notion de dérive antigénique qui conduit inéluctablement le virus à échapper à l’immunité.

Sans oublier qu’une circulation du virus, même chez les plus jeunes et sans comorbidités, provoque un nombre important de COVID-longues (estimées à 10% des cas) et une morbi-mortalité importante dont on ne mesure probablement pas encore l’ampleur réelle.

On peut également évoquer les aspects culturels et sociologiques, souvent avancés pour réfuter le recours aux stratégies de suppression qui seraient l’apanage des sociétés asiatiques « totalitaires » ou de populations « dociles » voire « soumises ».

L’exemple de la Chine est souvent utilisé pour décrédibiliser la suppression virale. C’est vite oublier que tout le reste des pays qui ont fait ce choix sont des pays démocratiques, incluant l’Australie qui est régulièrement en pole-position des pays avec les meilleurs indices de qualité de vie et d’attractivité.

L’argument du caractère « docile » et « soumis » des asiatiques, outre de tomber dans la caricature, est également absurde.

Ceux qui l’emploient, oublient au passage tous les autres pays ayant réussi la suppression virale hors d’Asie !

On peut aussi évoquer un biais du schéma de pensée construit autour de l’idée d’une ligne de crête entre l’intérêt sanitaire, l’intérêt économique, l’état psychologique…

C’est une erreur. C’est en choisissant de « vivre avec le virus » qu’on handicape durablement l’économie, qu’on favorise l’émergence de mutants, et qu’on inflige une souffrance psychologique prolongée, une « fatigue pandémique » sans fin et sans perspective d’amélioration.

Un exemple assez éloquent se retrouve en Nouvelle-Zélande, pays où deux confinements stricts ont été habilement mis à profit pour atteindre la suppression virale.

Si l’on écoutait le discours tenu en France, on s’attendrait à ce que les néo-zélandais soient au bord du précipice en tous points, excédés par ces mesures et attendant la première occasion pour se débarrasser des dirigeants leur ayant imposé un tel « châtiment » !

Pourtant, la Première Ministre néo-zélandaise, Jacinda Ardern, a été réélue avec un score tel qu’il permet de gouverner sans coalition (une première depuis 1996) !

Les stratégies de suppression virale permettent d’éviter tous ces travers. Il faut cependant s’en donner les moyens, et c’est peut-être une autre raison qui pourrait expliquer qu’on ne s’y engage pas : des ressources insuffisantes ?

De multiples appels ont été lancés aux autorités en ce sens, ils semblent pour l’instant être resté lettres mortes.

Le dernier en date, publié dans The Lancet, décrit une stratégie qui permettrait de reprendre un contrôle durable sur l’épidémie avec une circulation virale la plus faible possible, tout en permettant la réactivation de toutes les activités aujourd’hui à l’arrêt, et en protégeant véritablement la santé des citoyens :

Source 1

Source 2

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