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Deux grandes institutions seraient à réformer de toute urgence : l’hôpital et l’école.
Deux grandes institutions seraient à réformer de toute urgence : l’hôpital et l’école.
©Ludovic MARIN / POOL / AFP

Bilan 2022

La France est restée bloquée dans des organisations qui fonctionnaient il y a cinquante ans, et refuse d’en changer.

Chantal Delsol

Chantal Delsol

Chantal Delsol est journaliste, philosophe,  écrivain, et historienne des idées politiques.

 

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Rien de nouveau cette année, sinon la poursuite de cet enfoncement de la France dans la déprime, la dette et la pauvreté. Des réformes cruciales seraient nécessaires. Le président Macron avait écrit, avant son élection, un ouvrage qui s’appelait Révolution. Peut-être l’envie de révolution était-elle là, mais en tout cas, surement pas la volonté : rien n’a bougé.

La France est restée bloquée dans des organisations qui fonctionnaient il y a cinquante ans, et refuse d’en changer. On dit que le pays est conservateur, et c’est vrai, si l’on entend par là la force des habitudes, le peu d’adaptabilité. Mais il s’agit surtout de l’incapacité d’abandonner les organisations nées dans les Trente Glorieuses – sécurité partout, statut de la fonction publique, abondance.

Deux grandes institutions seraient à réformer de toute urgence : l’hôpital et l’école. Je ne parle pas de réformettes qui consistent à donner un chèque de Noël ou à rajouter une heure de mathématiques en 4°. Je parle de réformes radicales, qui seraient absolument nécessaires pour sortir le pays de l’ornière. Pour ce qui concerne l’Education Nationale, si l’on voulait échapper à cette médiocrité croissante qui fait de nous le dernier pays du bloc occidental, il faudrait oublier les 18% alloués par la coutume aux établissements privés, et laisser ceux-ci se développer à souhait ; la qualité de l’enseignement et de la discipline s’élèveraient alors de façon vertigineuse, et le public s’effondrerait, mettant à mal le statut des enseignants. Pour l’hôpital : il faudrait embaucher des soignants à la place des bureaucrates. Ici et là, chose impensable : parce que les gouvernants n’ont pas le courage ? pas seulement ; mais surtout : parce que dès que l’on parle de toucher à tel ou tel acquis, la rue se déchaine. L’augmentation de l’âge de la retraite, mesure adoptée par tous les pays occidentaux parce qu’exigée par les circonstances, réforme si essentielle, ne parvient pas à se mettre en place : on craint la rue.

Pourquoi les Français ne parviennent-ils pas à accepter les changements d’époque, les transitions, les adaptations nécessaires ? Nous sommes un peuple idéologue et un peuple gâté. Gâté par la grandeur française, par les trente glorieuses, par un art de vivre que l’on nous envie. Et idéologues depuis 93, particulièrement marqués par le communisme jusqu’au début des années 90, capables de nous donner encore aujourd’hui une extrême-gauche puissante : peuple violent. Il faut voir que ces deux caractéristiques, prises ensemble, donnent un peuple dépressif. La fin du confort n’est pas acceptable pour des idéologues, qui tiennent la réalité pour peu de choses. Et si la réalité les rattrape, ils se révoltent contre elles, et s’érigent en victimes. En France, la victimisation est un sport national. Les citoyens se voient mal aimés par le sort, et les médias ne cessent de les plaindre, ajoutant encore à leurs larmes. Ainsi en arrive-t-on à cette contradiction : le pays vit depuis longtemps très au-dessus de ses moyens, augmente la dette chaque jour, et il est clair que bientôt cette manne irresponsable va cesser de couler ; et en même temps, la population est persuadée de ne pas recevoir assez, de vivre dans la plus grande pauvreté, de devoir se mobiliser pour obtenir enfin ce à quoi elle a droit…

Cette contradiction ne saurait à terme susciter que du malheur. Pour l’instant elle suscite une dépression nationale : pourquoi sommes-nous moins riches qu’autrefois ? pourquoi notre fonction publique se dégrade-t-elle ? pourquoi les élèves ne savent-ils plus lire ? pourquoi notre hôpital perd-il sa réputation ? Hé ! parce qu’il ne suffit pas de camper sur la grandeur – encore faut-il s’adapter aux exigences du temps qui passe. Peut-être la situation réclame-t-elle de travailler plus longtemps, de gagner moins, de limiter la bureaucratie et les statuts, d’accepter davantage de concurrence, de ne plus bénéficier de tous les services publics à foison et parfois gratuitement. La réponse que nous apportons à cette situation, au lieu de retrousser nos manches, est de sortir nos mouchoirs pour pleurer et de bloquer le pays. Et nos gouvernements, qui ont à coup sûr conscience de la situation, ne savent pas comment réformer un pays dans lequel la moindre réforme provoque la menace de la rue. Il est probable que devant l’incapacité à nous réformer, nous serons rattrapés par la misérable nécessité : un jour, la pompe à endettement cessera de fonctionner. On peut dire que d’année en année, la seule nouveauté est le rapprochement inexorable de cette issue fatale.

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