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Un seul tour, pas 3 ! Ces élections à la britannique qui nous sauveraient des mille et un poisons des primaires
©Reuters

Septième République

Les primaires transforment une élection à deux tours en élection à trois tours dont le premier détermine l'issue finale. Parfois, il n'est pas inenvisageable que tout cela devienne un peu compliqué.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Quand on y réfléchit deux minutes (OK, il y a des constitutionnalistes qui y réfléchissent depuis des siècles, ça donne peut-être un peu plus de valeur à leur réflexion qu'à la mienne, mais bon...), il y a quelque chose d'un peu absurde au système français d'une élection à deux tours.

L'idée générale, à la première étape, est de voter pour le candidat que l'on préfère pour de bon. Que l'on soit partisan de la dictature du prolétariat et de la collectivisation des moyens de production, par exemple, et l'on met un bulletin LO, NPA ou Front de gauche dans l'urne. Qu'on imagine, au contraire, qu'on se sentira plus à l'aise dans une France de petits commerçants blancs où la radio ne passe que de l'accordéon-musette et où on fait l'appel à l'église chaque dimanche matin, et on préférera le FN, Dupont-Aignan ou Christine Boutin.

Mais ces candidats-là n'ayant, en principe, il y a tout de même eu quelques tristes accidents dans l'histoire, aucune vraie chance d'entrer à l’Élysée, on se reporte généralement sur le candidat le moins éloigné de sa sensibilité au second tour. La grosse partie des amateurs de kolkhozes se replie donc sur la tête d'affiche PS du moment (Hollande, fort probablement), pendant que les fans du "pays réel" privilégient le type qui contrôle le mieux l'appareil LR (vraisemblablement Sarkozy). C'est ce qu'on appelle "voter utile".

Bien sûr, c'est un peu plus délicat pour ceux qui préféraient miser sur Cheminade, les deux grands partis n'ayant pas de position claire sur la question de la colonisation de la planète Mars, voire pour les blasés qui pensent que, de toute manière, le PS et LR ne sont jamais que les marionnettes jumelles du grand complot libéralo-mondialiste, mais il leur reste toujours le vote blanc ou la pêche à la ligne...

Bref, soit on s'abstient, soit on pousse le candidat que l'on déteste le moins vers la magistrature suprême et on s'en plaint pendant les cinq ans qui suivent (le passage au quinquennat étant d'ailleurs une bonne chose de ce point de vue, se plaindre pendant cinq ans étant moins problématique que de se plaindre pendant sept ans chez les électeurs qui font de l’eczéma somatique).

Avec cette mode des primaires, les choses se compliquent encore davantage. Désormais, on a même carrément un premier tour officieux d'avant le premier tour officiel dont le but est de désigner le candidat PS ou LR qui fera face à Marine Le Pen, sera mécaniquement élu, et fait donc pratiquement office de tour final anticipé (vous suivez ? Vous pouvez relire une seconde fois si ça n'est pas clair).

Du coup, des pro-kolkhoze qui se couperaient un bras plutôt que de voter Hollande dans des circonstances normales envisagent d'aller voter Juppé pour faire barrage à Sarkozy quand des pro-accordéon-musette étudient la possibilité de se pointer aux qualifications PS pour empêcher Hollande de s'offrir un renouvellement de bail.

Les Anglais, qui n'ont pas moins de problèmes que nous mais pas les mêmes, ont plus ou moins répondu à cette question en inventant le scrutin à tour unique et majorité relative : il y a une liste de candidats, les gens votent pour celui qu'ils préfèrent, et bing, le candidat qui remporte le plus de voix décroche le pompon même s'il est minoritaire. On ne peut pas faire plus simple. On ne calcule plus, on ne construit plus de stratégie complexe, mais on vote en conscience plutôt que pour le type qu'on déteste plus que le type qu'on déteste moins.

Ah, et cesse-t-on de faire la gueule pendant les cinq ans qui suivent ? Non, bien sûr, puisqu'on a perdu de toute manière.

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