Quand il faut 88 siècles de Smic pour s'offrir un collier de diamants, quand les Suisses ratent le train et quand les nécromanciens font du marketing : c'est l'actualité des montres<!-- --> | Atlantico.fr
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Des années de travail pour rassembler les pierres, les tailler et en faire le collier le plus cher de toute l’histoire de la haute joaillerie internationale (exclusivité Atlantico)…
Des années de travail pour rassembler les pierres, les tailler et en faire le collier le plus cher de toute l’histoire de la haute joaillerie internationale (exclusivité Atlantico)…
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Atlantic-tac

Et aussi : le dandysme de poignet qui tourne le dos aux traditions, le retour des playboys façon Dutronc et l'heure internationale qui n'existe plus depuis 1972…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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FREDERIQUE CONSTANT : Une retardataire élégante et sympathique…

Les horlogers suisses aiment tellement leurs montres qu'ils ont du mal à en imaginer d'autres. Alors qu'Apple lancera son Apple Watch – totalement digitale et révolutionnaire à plus d'un titre – dans quelques jours, la manufacture genevoise Frederique Constant lance une Horological Smartwatch qui se veut une réponse horlogères aux montres connectées qui vont envahir notre quotidien à l'initiative des géants de l'électronique. Lancement héroïque, puisqu'il consiste à greffer un capteur d'activités – développé en partenariat avec une entreprise de la Silicon Valley – sur une montre classique : le bilan énergétique de la journée s'affiche par une aiguille, en pourcentage des objectifs qu'on se fixe, comme une indication horaire analogique (par aiguille). Tout ça pour ça ? Certes, la montre est élégante, mais on peine à comprendre comment les marques suisses espèrent résister avec des fonctions aussi sommaires : rappelons que la montre Whitings, présentée par Atlantic-tac en janvier dernier, offrait déjà un tel traceur d'activités, mais à 150 euros, alors qu'il faudra ajouter un zéro et multiplier le tout par deux pour cette Horological Smartwatch. La prochaine Apple Watch aura évidemment son traceur d'activités, mais on y trouvera de nombreuses autres fonctions qui la rendront totalement indispensable au quotidien, non pour téléphoner (ce qu'un Smartphone fait bien mieux), mais, par exemple, pour des paiements à la place des cartes bancaires ou des alertes sur ses réseaux sociaux. Domage que la Suisse, dont les trains arrivent si bien à l’heure, ait tendance à rater celui de la carpo-connexion (connexion de poignet)…

GRAFF : Même depuis Cléopâtre, le monde n'avait pas connu une telle folie… 

La maison de joaillerie Graff a réussi à rester indépendante depuis sa création au début des années 1960. Le flair de son fondateur, Laurence Graff, l'a conduit à acheter les plus beaux diamants qui passaient sur le marché et donc à devenir le fournisseur de toutes les cours et de tous les super-riches de cette planète. C'est donc très logiquement à Doha, au Qatar, qu'il vient de présenter son collier « Royal Star of Paris », le plus coûteux jamais réalisé dans l’univers de la joaillerie : il est affiché à 155 millions de dollars, soit l’équivalent de ce gagnerait un smicard français qui travaillerait pendant 8 865 années ! Il faut dire que Graff n’a pas lésiné sur les « cailloux », entre un rarissime 107 carats jaune taillé en coussin et un exceptionnel 100 carats de taille poire sans le moindre défaut (il a fallu sacrifier un diamant brut de 225 carats pour arriver à ces 100 carats de perfection). On vous fait grâce des diamants d’accompagnement, dont un seul ferait le bonheur des marques concurrentes de Graff. Ce n’est plus une rivière de diamants, c’est un fleuve de lumière semé d’icebergs comme on n’en reverra plus jamais : on sort ici de l’ultra-haute joaillerie pour aborder le grand art multi-millénaire de la parure inoubliable. Aucune rançon de roi, d’empereur ou de maharajah n’aurait pu atteindre ce fabuleux résultat. Cléopâtre ou la Reine de Saba en auraient rêvé : Graff l’a fait. Profitez-en bien : même à Doha, il faut être au moins de sang royal pour avoir le privilège d’apercevoir ce collier…

URWERK : Le grand frisson d’un nouveau dandysme horloger…

À l’âge des smartwatches, porter une « simple » montre qui se contente de donner l’heure sera bientôt une dandy attitude des plus provocatrices. La jeune marque indépendante Urwerk radicalise cette attitude en cumulant les codes décalés sur son UR-110 Eastwood. D’abord, la mécanique : l’heure digitale (chiffre) s’affiche sur un cube basculant, dont le pointeau parcourt tout au long de chaque heure une échelle de soixante minutes (8 h 18 sur l’image). Ensuite, le boîtier : du titane pour la carrure et de l’ébène de Macassar ou de l’ivoire rose (un des bois les plus rares du monde) pour coiffer la boîte. Le bracelet, enfin : un tweed tout ce qu’il y a de plus authentique, piqué dans les réserves d’un grand tailleur londonien (Timothy Everest) – la montre est livrée avec trois bracelets différents. De l’émotion esthétique à l’état chimiquement pur, avec un grand frisson de dandysme dès qu’on regarde son poignet, pourvu qu’on ait posé sur la table les 120 000 euros nécessaires aux épousailles avec l’UR-110. Les jeunes horlogers indépendants seront-ils les prochains arbitres des élégances ?

FOSSIL : Un style suisse, une identité texane, une vocation planétaire…

On vit une époque formidable ! Autrefois, ce genre de montres était réserve aux vénérables grandes maisons suisses, qui détenaient le secret des belles esthétiques et des jolies complications, malheureusement tarifées avec un certain goût pour le superlatif. Texane d’origine, mais désormais enracinée dans le Swiss Made (avec une vraie manufacture dans le Tessin suisse), la marque Fossil nous propose cette FS-5 GMT à un peu moins de 900 euros. Que demander de plus à une montre, qui n’est certes pas en or (boîtier de 45 mm en acier doré) et qui n’est pas non plus ultra-mécanique (électronique suisse), mais qui a tout d’une grande ? À commencer par l’élégance formelle, la complication utile (second fuseau horaire, repéré par le nom des villes dans un guichet à 6 h) aisée à manipuler par la seconde couronne, une seconde aiguille des heures (pointe rouge) qui tourne sur 24 heures pour un repérage jour/nuit et un superbe verre bombé « à l’ancienne ». Signalons juste à nos copains texans que la notion de GMT (l’ancien Greenwich Mean Time) est obsolète depuis 1972, quand toute la planète avait adopté le signal de l’heure UTC (Universal Time Coordinated), défini à Paris, mais émis de Londres…

TAG HEUER : Dans le style des play-boys des années soixante…

Magistrale façon de compiler les tendances du moment ! Cette TAG Heuer Carerra chronomètre (sur le cadran, on a oublié volontairement le TAG pour parfaire la touche vintage) a tout pour plaire et elle a coché toutes les bonnes cases des tendances de l’année : un boîtier de 39 mm, profilé comme dans les années cinquante, pour plaire aux hommes comme aux femmes, l’indispensable touche de bleu, avec trois touches de rouge pour réveiller l’ensemble, le cadran satiné et légèrement soleillé, la petite seconde à 6 h, visuellement amplifiée par la date, le bracelet perforé des playboys d’avant mai 1968. Si jacques Dutronc avait porté une montre en chantant « les PlayBoys de profession habillés par Cardin et chaussés par Carvil », c’est une Heuer Carerra qu’il aurait choisie. Même le prix semble dater d’il y a quelques années ! S’il manque quelque chose, c’est le mot « Héritage », véritable best-seller de l’offre horlogère 2015.

TRITON : Un batracien qui prenait de haut les plongeuses de Rolex…

Hormis une poignée de collectionneurs, qui s’arrachent une montre toujours cotée autour des 3 000 euros, personne ne se souvenait que la marque Triton, fondée en France en 1963 comme spécialiste des montres de plongée, se vendait plus cher que la fameuse Submariner de Rolex. On la reconnaissait à sa couronne de remontage située à 12 h (blocage par le bracelet, ce qui est très astucieux) et à son étanchéité garantie à 200 m, ce qui l’avait fait adopter par différentes marines militaires (dont la France) et par les plongeurs professionnels. On sait que les horlogers adorent faire parler les morts (nécromancie). Une petite équipe de Français relance aujourd’hui la marque, dans une version mécanique Swiss Made et dans le respect à peu près intégral des codes esthétiques de l’époque : boîtier en table purement vintage (simplement passé de 37-39 mm à 40-41 mm), couronne à 12 h, typographie très spéciale de lunette graduée, date rouge et noire, aiguilles ultra-lisibles. La nouvelle Triton « Subphotique » est étanche à 500 m, avec une valve à hélium pour les remontées sans souci : subphotique est un néologisme pour désigner la zone au-dessous laquelle la lumière totalement disparaît sous l’eau – au-delà des 200 m de profondeur. Le prix de l’exclusivité et de l’originalité n’est pas spécialement câlin (4 900 euros), mais c’est tout de même moins galvaudé qu’une Rolex Submariner ou une Panerai Luminor Marina. Un régal de gourmet, lancé avec une sincérité et presque une ingénuité qui forcent l’admiration…


• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

Lien : http://www.businessmontres.com

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