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Grèce : Sarkozy rejette l'idée
d'une mise sous tutelle
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Veto !

Ce ne serait "pas raisonnable, pas démocratique et pas efficace", estime le chef de l'Etat.

(Mis à jour le mardi 31 janvier à 5h50)

Le président français Nicolas Sarkozy a rejeté catégoriquement lundi 30 janvier au soir l'idée d'une mise sous tutelle budgétaire de la Grèce par l'Union européenne, comme proposé par un document du gouvernement allemand qui a provoqué une vive polémique.

"Qu'il y ait une surveillance, c'est tout à fait normal, mais il ne peut être question de mettre quelque pays que ce soit sous tutelle. Ce ne serait ni raisonnable, ni démocratique, ni même efficace", a-t-il dit en conclusion d'un rendez-vous à 27 officiellement voué à la croissance et à l'emploi.

Le chef de l'Etat français a assuré que la chancelière allemande Angela Merkel était sur la même ligne. La mise sous tutelle budgétaire de la Grèce "n'est pas une position qui a été défendue par la chancelière", a-t-il dit.

La proposition controversée, révélée au cours du week-end, émanait du ministère allemand des Finances et a été soumise pour discussion à un forum de hauts fonctionnaires des pays de la zone euro. Elle demande qu'un commissaire européen spécial soit désigné pour surveiller la politique du gouvernement grec, avec droit de veto sur ses décisions budgétaires si elles ne sont pas conformes aux engagements pris par le pays envers ses créanciers. Le document demande aussi que le pays consacre ses revenus "avant tout" au service de la dette, à savoir le remboursement des taux d'intérêts des emprunts.

Le mot allemand Kommissar, historiquement chargé, n'a pas manqué de renvoyer les Grecs aux mauvais souvenirs de l'occupation. Le malentendu dépasse les relations difficiles entre la première puissance créancière de l'Europe et une nation dite "périphérique" qui navigue au bord de la banqueroute depuis deux ans. La controverse s'est imposée à beaucoup comme le révélateur d'un manque de sensibilité allemand au sort de ses partenaires, voire d'une volonté de domination sur le reste de l'Union européenne.

Les plus proches alliés de l'Allemagne ont été les premiers à donner de la voix. Président de l'Eurogroupe, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker a jugé "inacceptable" le projet allemand pour la Grèce. Le chancelier autrichien Werner Frayman l'a jugé "blessant". Français, Britanniques et Néerlandais ne sont pas moins critiques: en privé, ils estiment que l'humiliation est la pire politique vis-à-vis d'un pays qui ne parvient pas à garder la tête hors de l'eau.

Certains s'inquiètent aussi de la déconnexion croissante entre une partie de la classe politique allemande, fière d'avoir sauvé les meubles et de réduire le chômage au plus bas depuis vingt ans, et le reste de l'Europe plongé dans une crise dont il peine à voir le bout.

La question va rapidement revenir sur le tapis. La France n'exclut pas un sommet voué à la Grèce dans les semaines qui viennent. Angela Merkel, elle, veut présenter un plan complet à un Bundestag sourcilleux. En jeu : le déblocage, assorti de conditions draconiennes, d'une seconde aide d'un montant de 130 milliards d'euros. Sans elle, Athènes se retrouverait en faillite.

(Mis à jour lundi 30 janvier à 19h)

En proposant de mettre la Grèce sous tutelle budgétaire de l'UE, la chancelière allemande Angela Merkel n'a pas seulement braqué Athènes mais aussi donné du grain à moudre à ceux qui, notamment à gauche, dénoncent une Europe de plus en plus "à l'heure allemande".

La proposition allemande vise à faire accepter à Athènes un transfert temporaire de souveraineté budgétaire au niveau européen, compte tenu de résultats jugés décevants des gouvernements Papandréou et Papademos à réduire la dette grecque. Révélée au cours du week-end, juste avant le sommet européen de lundi, l'idée a été d'emblée rejetée par les responsables grecs.

Le ministre des Finances, Evangélos Vénizélos, a appelé l'UE à respecter "l'identité nationale" de son pays et le principe d'égalité entre Etats. "Nous avons besoin de plus de démocratie, pas de moins de démocratie" en Europe, a renchéri lundi l'ancien Premier ministre grec Georges Papandréou, dirigeant du Pasok (parti socialiste grec), qui fait partie du gouvernement d'unité nationale au pouvoir. Plusieurs responsables européens ont abondé dans ce sens.

"Vexante", la proposition allemande "n'apporte rien et ne va pas dans le bon sens", a tranché le chancelier social-démocrate autrichien Werner Faymann en marge d'une réunion des socialistes européens à Bruxelles.

"Attention à ne pas blesser plus que nécessaire" le peuple grec, a prévenu le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn. Sans rejeter l'idée d'une mise sous tutelle d'un pays qui "sort durablement des clous", son Premier ministre Jean-Claude Juncker a dit ne pas trouver "très heureux de le faire uniquement pour la Grèce".

La proposition allemande risque de fait d'alimenter un retour perceptible de la germanophobie dans certains pays, à commencer par la Grèce, mais pas uniquement. Elle pourrait être utilisée par ceux qui, comme certains socialistes français, dénoncent depuis plusieurs mois la gestion allemande de la crise de la dette axée uniquement sur la rigueur budgétaire.

Fin novembre déjà, le candidat socialiste à la présidence française François Hollande avait estimé que la chancelière allemande essayait "d'imposer un modèle européen qui n'est pas nécessairement le nôtre".

A sa gauche, Arnaud Montebourg a accusé Mme Merkel de mener «une politique à la Bismarck» en tirant profit de la ruine des autres pays de la zone euro, et le candidat à la présidentielle française Jean-Luc Mélenchon avait dénoncé le «diktat» de la chancelière.

Cela ressemble à un sérieux avertissement. Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des Finances a déclaré au Wall Street Journal que la Grèce pourrait ne plus recevoir d'aides si la Grèce ne mettait pas en place des mesures structurelles.

La zone euro pourrait donc ne pas recevoir les 130 milliards de dollars d'aide annoncé en 2010. De quoi inquiéter Athènes qui pourrait être mise en défaut.

Wolfgang Schaüble a déclaré que l'Europe "était prête à soutenir la Grèce", mais que la Grèce devait "faire un choix".

Ces déclarations interviennent alors que la Grèce a vivement rejeté la proposition de l'Allemagne d'un contrôle européen sur le budget grec. Athènes avait dénoncé ce dimanche "un chantage entre l'aide financière et la dignité nationale."

Lu sur The Wall Street Journal

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