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Vente d’automobiles : pourquoi le coup de mou de Volkswagen en Europe risque de n’être que passager
©Reuters

Das Auto

Tandis que les ventes de véhicules neufs en Europe décollent, Volkswagen peine à remonter la pente après le scandale Volkswagen. Pour autant, puisque l'achat d'un véhicule correspond avant tout à une question de budget et d'envie, cela pourrait ne pas durer.

Bertrand  Rakoto

Bertrand Rakoto

Automotive Intelligence Strategist.
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Atlantico : Les ventes de véhicules neufs en Europe ont enregistré une augmentation de 13.6% sur les onze premiers mois de l'année 2015. Volkswagen, qui a dû faire face au scandale des moteurs truqués, a vu les ventes augmenter de seulement +2.8% (pour les voitures au logo de la marque). Comment expliquer cette importante différence ? Dans quelle mesure le scandale, révélé au mois de septembre, a-t-il pu y jouer un rôle ?

Bertrand Rakoto : Il faut voir un rééquilibrage des marques sur le marché Européen. Depuis 3 ans, nous faisons face à une reprise hésitante. Pendant le plus dur de la crise entre 2009 et 2011, certains constructeurs européens ont fait le dos rond et ont attendu que l’orage passe en réduisant leurs investissements. Ford a limité ses lancements de nouveaux modèles comme par exemple en retardant de deux ans la commercialisation de la Mondeo qui était pourtant prête. PSA et Renault ont gelé leurs développements de gamme et ont présenté peu de nouveaux modèles. Fiat a reporté ses projets.

Pendant les années de crise, Volkswagen a poursuivi son plan produit en lançant plusieurs modèles et a profité du calme relatif de la concurrence pour mener une campagne commerciale agressive (offres de remises, crédits à taux faibles, etc.) Le constructeur allemand a ainsi vu ses parts de marché en Europe progresser de plus de 2%. La marque est passée de 10,5% en moyenne avant la crise à 12,8% en 2012 pour redescendre à 12,2% sur les 11 premiers mois de 2015. Le groupe a lui progressé de 5% en passant de 20% avant à la crise à 25% aujourd’hui. La baisse des parts de marché de Volkswagen est plus un rééquilibrage des forces entre concurrents qu’autre chose.

Quant au scandale des moteurs truqués, contrairement aux États-Unis où les modèles Diesel ne sont plus disponibles à la vente et donc où Volkswagen risque de perdre le tiers de ses ventes, en Europe le scandale a peu d’effet sur la clientèle. Il faut savoir que l’achat automobile reste à la fois une question de budget et une question d’émotion (design, envie). Dans ce contexte, les rappels ou les erreurs des constructeurs n’ont que peu ou pas d’effet sur les ventes. Les rappels massifs de Toyota en 2010 et de General Motors en 2014 le prouvent également puisqu’ils ont été sans véritable impact sur les ventes, elles ont même progressé dans le cas de General Motors.

A quel constructeur automobile cette forte progression a-t-elle alors profité ? Où se situent les constructeurs français ?

Dans l’ensemble, tous les constructeurs bénéficient de la hausse du marché Européen. Mais ceux qui participent le plus à cette hausse du marché sont les constructeurs qui ont un plan produit dynamique. Ainsi Renault, Peugeot ou Fiat et Jeep sont des marques qui connaissent une augmentation de leurs volumes et tirent leurs parts de marché vers le haut. C’est mécanique, ils reprennent le terrain perdu les années précédentes. Pour Fiat, le crossover 500X tire les ventes tout comme le Jeep Renegade qui partage ses bases.


Les constructeurs français bénéficient de modèles récents qui aident les ventes comme les Peugeot 208, 2008 et 308. Chez Renault, ce sont les derniers lancements qui apportent une bonne croissance des ventes (le Kadjar, l’Espace, depuis peu la Talisman et prochainement la Mégane). Pour Citroën, la marque est en plein repositionnement et le nouveau plan produit tarde à livrer les nouvelles orientations du constructeur. Les marchés où les Français sont fortement présents reprennent des couleurs cette année comme l’Espagne ou l’Italie mais aussi la France. Cependant, la reprise est assez artificielle puisque, pour l’instant, les ventes sont moins dues aux particuliers et plus aux incitations fiscales (pays du sud) ou aux loueurs courte durée (France) qui servent également à écouler des volumes.

Cette dynamique pourrait-elle continuer ? Comment Volkswagen pourrait-il réagir, et avec quelle efficacité ?

La dynamique va se poursuivre tant que l’économie se redresse. Malgré cela, les taux de chômage encore élevés en France ou en Espagne tiennent les ménages éloignés d’un retour à l’investissement automobile. Tant que le taux de chômage ne baisse pas, il sera compliqué de vraiment parler de reprise franche et durable pour les marchés automobiles en Europe de l’Ouest. Les constructeurs qui commercialisent régulièrement des nouveaux modèles sont les plus à même de poursuivre une croissance des ventes, d’où la nécessité de pouvoir étaler dans le temps les lancements de nouveaux produits. Les commercialisations trop rapprochées entraînent des ventes cycliques. 

Volkswagen doit d’abord faire face aux conséquences de sa fraude afin d’en connaître le coût financier. Le constructeur doit également travailler sur lui-même pour améliorer sa rentabilité. Par ailleurs, la gamme va être rationalisée avec une occupation un peu moins forte de l’ensemble des segments. Durant la dernière décennie, Volkswagen avait cherché à être présent dans un très grand nombre de segments et de niche. Il faut maintenant rationaliser la gamme et travailler sur une meilleure maîtrise des dépenses. Ces décisions avaient été prises avant l’affaire de fraude. Le mouvement naturel veut que Volkswagen régresse en termes de parts de marché car il subit les assauts de concurrents mieux armés et qui cherchent à reconquérir leur place sur le marché.

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