Une réforme pour rien : le gouvernement se refuse à s’engager dans l’immigration économique<!-- --> | Atlantico.fr
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La Première ministre Elisabeth Borne fait une déclaration sur la politique d'immigration à l'Assemblée nationale, le 6 décembre 2022.
La Première ministre Elisabeth Borne fait une déclaration sur la politique d'immigration à l'Assemblée nationale, le 6 décembre 2022.
©JULIEN DE ROSA / AFP

Atlantico Business

A priori, le projet de loi sur l’immigration ne règlera pas le problème qui mine la société française puisque le gouvernement se refuse à s’engager dans l’immigration économique. Et cela pour des raisons politiques très inavouables.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le débat à lAssemblée nationale dhier après midi au cours duquel les députés étaient invités par le gouvernement à débattre de la politique dimmigration a montré très clairement que le gouvernement n’était pas prêt à sengager dans une politique dimmigration économique. Donc il ne fera rien dautre qu’une opération de communication qui ne servira pas à grand-chose. Sauf peut-être à calmer la colère qui monte dans ce pays contre un afflux dimmigrés dont la majorité sont clandestins et que les autorités françaises ne réussissent pas à intégrer rapidement. Doù les désordres, doù la montée dune incivilité croissante dans le cœur des villes, doù les risques de perte didentité. Doù la montée des extrémismes de droite ou de gauche.

En chiffre, le problème est très simple à comprendre. Dans les faits, l’équation est effectivement plus difficile à résoudre. 

1er point : la France parait submergée par des vagues dimmigration quelle ne réussit pas à intégrer, plus de 200 000 immigrés par an.Une très grande partie de ces arrivants ne sontpas éligibles au droit dasile parce quils ne viennent pas dun pays en guerre. Ces immigrés devraient donc être reconduits à la frontière, mais cest tellement compliqué à organiser que beaucoup vont rester sans papier, soit parce quils ont des amis ou de la famille en Europe, soit parce quils sont mineurs (ou se disent mineurs) et finiront par obtenir une couverture sociale minimum. Une autre partie réussira à trouver du travail difficilement, ce qui peut leur entrouvrir la porte de la régularisation.

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2e point : beaucoup de secteurs économiques français sont sous tension. En France, il existe plus de 400 000 offres d’’emplois non satisfaites. Les employeurs ne trouvent pas les candidats pour les occuper. 

Aux vues des chiffres, la situation est très claire et les solutions sont évidentes.

Ou bien on ferme complètement les possibilités dimmigration, mais on se met hors la loi européenne, on ferme les yeux sur des situations sociales et humaines insupportable parce quindignes. Mais on accepte lasphyxie de beaucoup dentreprises qui ne trouvent pas de salariés. Encore plus grave, beaucoup dentreprises se sentent obligées demployer des travailleurs clandestins. Selon les employeurs, il y aurait actuellement 300 000 sans papiers à travailler dans les entreprises privées en France. 

Ou bien on organise les moyens doffrir à ces étrangers doccuper des jobs vacants. Les employeurs sont très preneurs. Dans toute la France et dans beaucoup de secteurs : le bâtiment, la chaudronnerie, les couvreurs, les terrassiers, les conducteurs de bus, le travail agricole, la cuisine, la restauration. Tous ces métiers en tension sont en général assez peu qualifiés, ils sont pénibles, ils sont parfois sales et dangereux et les Français ne se précipitent pas pour les occuper.

Ça peut évidemment être lié au salaire. Les syndicats le disent du bout des lèvres, parce quils savent bien que les conditions économiques, les risques de linflation ne permettent pas de relever les salaires de ce type demplois.

Selon les organisations professionnelles demployeurs,on pourrait au moins reconnaitre la réalité et régulariser les sans-papiers qui ont un travail (300 000 en moyenne) le comble de lhypocrisie de notre pratique est que les « sans-papier » qui ont un job peuvent avoir une carte vitale et donc un accès à lassurance maladie. 

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Bref, quand on interroge les Français, ils avouent ne pas être contre larrivée d’étrangers pour occuper ces jobs puisque les Français nen veulent pas. Mais, et cest là où le bât blesse, ces mêmes Français se plaignent quil y a trop d 'étrangers en France et que cette surreprésentation déséquilibre le logiciel sociétal. 

Du coup, le gouvernement (et même Gerald Darmanin), qui est partisan du « en même temps », fait lautruche et se refuse à trancher en faveur dune véritable immigration économique. 

Limmigration économique na rien dindigne. Ou dinhumain. La France la pratiquée dans les années 60 et 70 pour répondre aux demandes de lindustrialisation automobile notamment.

LAllemagne continue de la pratiquer aujourdhui en régulant limmigration des populations turques qui viennent travailler avec un contrat de travail limité.

Le Canada a installé une politique dimmigration très importante pour répondre à ses besoins économiques et cette politique lui réussit assez bien. Le Canada parvient à satisfaire ses besoins, et à assimiler ses immigrés.

Tous ces pays assument lapplication dune immigration économique et laccompagnent dun véritable parcours dintégration avec la clef, une formation et une éducation de façon, à terme, à ce que les candidats puissent répondre aux conditions dassimilation. A commencer par la langue, les coutumes et le respect des cultures locales. 

Une telle logique ne parait pas imaginable en France, cest du moins ce que craint le gouvernement. Donc, il ne prendra pas le risque politique de heurter tous ceux qui, à gauche, s’abritent sous le parapluie des droits de l’Homme, avec à lappui une pseudo générosité sociale qui fait la fortune des passeurs dimmigrés.Et tous ceux qui, à lextrême droite, protègent lidentité française.

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En attendant, cest lappareil économique qui sappauvrit et le tissu social et civique qui se délite.

Le président de la République a voulu construire une loi ambitieuse et globale, le risque des lois très ambitieuses et globales est de ne pas régler les questions pratiques. Bref, le risque est de fabriquer une loi sur limmigration qui ne servira à rien. Ça ne sera que la 29eme en 30 ans.

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