Trajet en hélicoptère, Champs Elysées aux couleurs du pays invité... Quand la France cède aux caprices de ses hôtes de marque<!-- --> | Atlantico.fr
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Les présidents Nicolas Sarokzy et Barack Obama.
Les présidents Nicolas Sarokzy et Barack Obama.
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Bonnes feuilles

Spécialiste de l'Asie, Jean-Marie Cambacérès a accompagné plusieurs présidents français dans leur déplacements officiels à travers le monde. De l'évolution du protocole jusqu'aux aux anecdotes insoupçonnées, son expérience est riche en enseignements. Extrait de "Dans les coulisses des voyages présidentiels" aux éditions du Cherche Midi (1/2).

Jean-Marie Cambacérès

Jean-Marie Cambacérès

Jean-Marie Cambacérès est un homme d'affaires et homme politique français spécialiste de l'Asie. Il a exercé des responsabilités dans plusieurs ministères depuis la présidence de Georges Pompidou jusqu'à aujourd'hui. Il a notamment publié Sihanouk, le roi insubmersible en 2013.

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Au sens strict, l’appellation "voyage d’État", avec tout le protocole et le décorum qui s’en suivent, ne s’applique qu’à quelques voyages bilatéraux du président de la République, deux ou trois par an. En sont donc exclus, d’un côté, les voyages du chef de l’État organisés secrètement pour des raisons de sécurité, les voyages dits "de travail", ses voyages privés et les voyages pour des réunions multilatérales (Onu, Union européenne, Otan, G8, G20 ou autres) et même théoriquement les voyages dits "officiels" du chef de l’État ; et, de l’autre côté, les voyages des Premiers ministres, des ministres ou des autres hauts responsables de la République, comme le président du Sénat ou le président de l’Assemblée nationale. 

Cela dit, comme certains points communs existent quand même entre les uns et les autres, nous ne nous interdirons donc pas de citer des événements ou anecdotes intéressants, quelle que soit la qualification formelle du voyage, d’autant plus qu’il y a beaucoup de similitudes entre les voyages officiels présidentiels et les voyages d’État, hormis un ensemble de "signes" plus fastueux pour les seconds. 

Quel que soit le pays, une visite d’État comprend toujours quelques étapes incontournables. En France, par exemple, après l’accueil à l’aéroport, le chef d’État étranger est transporté en hélicoptère jusqu’à l’esplanade des Invalides avec un passage autour de la tour Eiffel, puis il se rend à l’Élysée accompagné par un détachement de la Garde républicaine, à cheval ou à moto. Les Champs-Élysées sont pavoisés aux couleurs nationales du pays honoré. Un dîner d’État est organisé à l’Élysée, dans la salle des fêtes, dont François Mitterrand avait eu la bonne idée de faire percer dix grandes portes-fenêtres côté parc qui permettent à la pièce d’être baignée de lumière naturelle. 

Le président chinois Hu Jintao, lors de sa visite d’État en France du 26 au 29 janvier 2004, avait refusé cet habituel survol de Paris en hélicoptère avec atterrissage sur l’esplanade des Invalides. Dans un passé encore récent, jusque vers la fin du mandat de Nicolas Sarkozy, l’hôtel de Marigny, résidence officielle des hôtes de la République, pouvait accueillir les chefs d’État hôtes de la France. Mais beaucoup d’entre eux avaient déjà depuis longtemps déserté cette belle demeure pour y préférer des "suites présidentielles " dans des palaces parisiens. 

Par exemple, Hua Guofeng, qui a succédé à Mao après son décès en septembre 1976, était venu en France en octobre 1979 pour une visite de six jours. C’était la première fois qu’un président chinois faisait un voyage en Occident. Il séjourna en France d’abord, puis en Allemagne, en Grande-Bretagne et en Italie. Pendant son passage à Paris, il résida à l’hôtel de Marigny, qui était encore la résidence d’État pour les hôtes de marque étrangers. Pour la petite histoire, Hua Guofeng et Valéry Giscard d’Estaing se rendirent à l’Hôtel Neptune, à deux pas de la place d’Italie, dans le 13e  arrondissement, pour déposer une plaque sur la façade de cet établissement où Zhou Enlai, le futur Premier ministre de la Chine, avait vécu quand il était étudiant à Paris dans les années 1920. La plaque est encore visible aujourd’hui. 

En revanche, le président chinois Hu Jintao, lors de sa visite en France en 2009, avait demandé à résider dans la fameuse suite présidentielle de l’hôtel Le Meurice, dont la terrasse de 200 mètres carrés au sixième étage domine les Tuileries et la rive gauche de Paris avec au loin les Invalides et la tour Eiffel, et dont la salle de bains a une fenêtre qui donne sur le Sacré-Cœur. Il y avait déjà séjourné quelques années auparavant lors d’un voyage moins officiel en tant que président de l’École centrale du Parti et avait souhaité y revenir.

Le président Xi Jinping, lors de son voyage d’État en mars 2014, préféra choisir le George V pour des raisons de commodité, vu la proximité avec l’ambassade de Chine sise avenue George-V et voisine du palace éponyme. Le dernier chef d’État à avoir séjourné à l’hôtel de Marigny fut le président libyen, le colonel Kadhafi. Invité par Nicolas Sarkozy, il avait planté sa tente dans le jardin de la résidence. Traditionnellement, il y avait une soirée à l’Opéra de Paris. Cette tradition est tombée en désuétude. 

Dans les faits, les "voyages officiels" des chefs d’État se rapprochent souvent des "voyages d’État" des mêmes chefs d’État. Par exemple, en France, pour un chef d’État, quel que soit le niveau de sa visite, il y aura toujours des gardes républicains dans la cour du palais de l’Élysée, seul le nombre variera. En revanche, c’est seulement pour les visites d’État que la Garde républicaine accompagnera le chef d’État étranger des Invalides au palais de l’Élysée. Lors de son voyage d’État en octobre 1976 en Iran, alors dirigé par le shah Mohammed Reza Pahlavi, le président Giscard d’Estaing avait eu droit à un carrosse non couvert tiré par des chevaux, comme à Londres pour la reine d’Angleterre. 

"Dans les coulisses des voyages présidentiels" de Jean-Marie Cambacérès aux Editions du Cherche-Midi.

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