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TNT : six nouvelles chaînes, qu’est ce que ça change ?
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Zapping

Ce mercredi, 6 nouvelles chaînes gratuites viendront compléter l'offre TNT.

Paul-Antoine Solier

Paul-Antoine Solier

Paul-Antoine Solier est responsable du développement d’une société de production de télévision. Il est diplômé de l’EM LYON et titulaire d’une maîtrise de Droit Public à l'Université Paris II.

Pour le suivre sur Twitter, c'est ici.

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Atlantico : Après D8, six nouvelles chaînes débarquent sur la TNT ce mercredi. Que peut-on en attendre ?

Paul-Antoine Solier : Du point de vue des téléspectateurs, 6 nouvelles chaînes gratuites en temps de crise, c’est toujours ça de pris ! Pour ma part, je trouve que la répartition éditoriale a un sens : deux chaînes "découverte" (RMC Découverte et 6TER), une chaîne fiction (HD1), une chaîne féminine (CHERIE 25), une chaîne sport (l’EQUIPE HD) et une chaîne diversité (NUMERO 23), ce sont des thématiques qui n’étaient jusqu’à présent accessibles que sur les bouquets payants (Eurosport, Teva, Voyage, Planète etc…).

Ce type de chaînes pratiquent généralement beaucoup la rediffusion et proposent peu de programmes. Quel en est donc l'intérêt ?

Il est normal pour une chaîne de commencer "petit".  Les téléspectateurs vont mettre un certain temps à identifier ces nouvelles chaînes, seul 1 Français sur 2 est au courant du lancement. A quoi bon investir beaucoup d’argent dans un programme qui n’aurait aucune visibilité et qui passerait complètement inaperçu ? L’enjeu pour ces nouvelles chaînes est d’abord de se faire connaitre. Leur ligne éditoriale doit être cohérente pour installer progressivement leur identité. Certes, les grands groupes vont piocher dans leur catalogue et ils auraient tort de s’en priver. Un téléfilm unitaire diffusé une seule fois sur TF1 en prime time est tout à fait rediffusable sur HD1. De plus, on remarque qu’il y a une vraie demande de rediffusions de la part des téléspectateurs. Les "rediffs" de vieux épisodes de Navarro, de Sœur Thérèse.com ou de Nestor Burma battent des records d’audience sur les chaînes TNT actuelles. En rediffusant, les chaînes s’appuient sur des marques déjà connues des téléspectateurs.

Les nouvelles chaînes parient également sur les acquisitions de documentaires et de fictions étrangères. Ainsi, RMC DECOUVERTE a acquis des documentaires spectaculaires "à l’américaine", inédits en France. A ce titre, la chaîne NUMERO 23, qui est la seule à ne pas pouvoir se reposer sur la puissance d’un grand groupe, tire particulièrement bien son épingle du jeu en faisant l’acquisition de séries originales, qui sont des cartons d’audience à l’étranger et qui sont encore peu connues en France (comme Push Girls ou Les bracelets rouges). On ne peut donc pas dire que ces nouvelles chaînes feront du réchauffé. C’est bien sûr toujours mieux de faire du "neuf", surtout pour la filière de production française, mais si personne ne regarde, cela ne sert pas à grand-chose. Le CSA leur impose un quota de productions "fraîches" donc ces nouvelles chaînes constitueront à terme de nouveaux débouchés pour les producteurs.


Après le lancement de la Star Academy sur NRJ12,  le célèbre télé crochet La Nouvelle Star a fait mardi son retour sur D8. Est-ce véritablement une opportunité fabuleuse que de reprendre ces concepts ayant si bien fonctionné sur les grandes chaînes ?

C’est encore une question de marque. Plus il y a de chaînes, plus les marques sont importantes. Lorsque les téléspectateurs ouvrent leur programme TV, il faut que l’intitulé de l’émission soit très attractif et très clair. Des marques aussi identifiées que Star Academy  ou Nouvelle Star sont des puissants atouts. Attention toutefois à ne pas décevoir les téléspectateurs. Les budgets TNT sont inférieurs à ceux des chaînes historiques et la valeur de production ne doit pas paraitre "cheap". Un pari que semble avoir réussi NRJ12, le retour de la Star Ac’ a fait un carton. NRJ12 a su s’approprier le format en jouant sur le casting des candidats et des professeurs. Cela correspond bien à l’identité de la chaîne, c’est différent de la version TF1 sans pour autant être décevant. Bien joué ! Pour la Nouvelle Star sur D8  l’exercice est à mon sens plus compliqué. L’émission n’a disparu que depuis deux ans, il y a moins d’effet nostalgie et la comparaison est plus facile car c’est encore "frais" dans la tête des téléspectateurs. De plus, la mécanique de la Nouvelle Star est plus rigide, il s’agit d’un télé-crochet en entonnoir classique, il est donc plus difficile d’apporter la touche D8. Mais il semble que la chaîne assume cette continuité avec l’émission de M6 en faisant appel à certains jurés des saisons précédentes. Nous verrons si c’est payant !

Nonce PAOLINI, le patron de TF1 a déclaré  "Je ne suis pas sûr que cela soit un progrès industriel et économique ! ". La ministre de la Culture ne semble, elle aussi, pas très enthousiaste, pourquoi ?

Il est clair que pour les groupes audiovisuels historiques, cela n’est pas une bonne nouvelle. La télévision gratuite est financée par la publicité (ou par la redevance) et le "gâteau publicitaire" n’est pas extensible à l’infini. Il sera même en recul l’année prochaine. Même si ces grands groupes profitent de ces nouvelles fréquences, cela fragilise la maison mère, en termes de recettes et d’audiences. Depuis le lancement de la TNT il y a sept ans, seule M6 est parvenue à augmenter ses parts de marché, les autres ont vu leurs audiences s’éroder. Mais au-delà du nombre de chaînes, c’est l’ensemble du secteur audiovisuel qui doit se réinventer. En France, on a souvent tendance à surprotéger nos industries culturelles sous couvert d’exception française. On a vu le résultat pour l’industrie du disque. Avec l’avènement de la télévision connectée, les diffuseurs et les producteurs disposent d’une formidable opportunité de revoir leur modèle économique afin d’être moins dépendants du spot publicitaire. L’audiovisuel est par ailleurs un secteur fortement mondialisé. Chaînes et producteurs français doivent faire équipe pour développer des documentaires, des fictions et des formats exportables. Les créations originales de Canal+ font déjà le tour du monde. De même Luc Besson qui a fait son entrée dans la fiction télévisée ne devrait pas se contenter de l’hexagone. Aujourd’hui nous devrions plutôt parler "d’exception culturelle européenne". Par exemple, le producteur Dominique Ambiel lance prochainement La Chartreuse de Parme, une coproduction franco-italienne dont le budget n’aurait jamais pu être bouclé sans ce partenariat binational, tant les téléfilms d’époque deviennent trop chers à financer pour une seule chaîne. Le patrimoine culturel et l’histoire de l’Europe constituent une source d’inspiration intarissable dont les thèmes intéressent par définition plusieurs pays.

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