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Taxe sur les sodas :
une mesurette qui fait pschiiit
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Malbouffe

Taxer les boissons sucrées : c'est l'une des mesures inattendues du plan d'austérité publié la semaine passé. L'objectif semble louable : lutter contre l'obésité. Mais est-ce vraiment efficace ?

Valérie Orsoni

Valérie Orsoni

Valérie Orsoni est experte dans les méthodes de motivation et de coaching. 

Fondatrice du #1 de la perte de poids online LeBootCamp.com, elle est le coach attitré de nombreuses stars et de titres de presse français et américains. Elle a publié La méthode Orsoni aux éditions Reader Digest, Le Sarrasin, tous les secrets de la graine miracle et Un corps de rêve pour les nulsFIRST EDITIONS (1 mars 2012).




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Avec un coût annuel représentant 2% des dépenses de santé en France, soit 4 milliards d’euros,  les maladies directement liées à l ‘obésité sont en pleine augmentation sur notre territoire comme dans le monde entier. Lorsque l’on sait que la croissance de l’obésité est liée en grande partie à un style de vie de plus en plus sédentaire et à l’expansion de la malbouffe, il paraît évident que l’Etat peut, à défaut d’inverser cette tendance alarmante, au moins la ralentir.

Entre éducation des masses et punition, les solutions choisies sont toujours controversées, à l’instar de cette récente mesure comprise dans le plan d'austérité publié la semaine passé : la fameuse taxe sur les sodas et boissons comportant du sucre ajouté, à compter du 1er janvier 2012.

Une goutte d'eau dans un océan de dettes

Le Premier Ministre, François Fillon justifie sa proposition en s’appuyant sur les chiffres de l'OMS, qui indiquent que "l'obésité, qui s'élevait à 8,5% en 1997, atteint désormais près de 15%", soit une progression de plus de 70% en 12 ans.

Les 120 millions d’euros que cette mesure devrait rapporter à la Caisse d’assurance maladie représentent une gouttelette d’eau dans un océan de dettes, et ne provoqueront aucun changement de comportement de la population, puisque son impact ne sera que d’un centime par cannette (passant de 0,79 d’euros à 0,80 euros environ). Même notre actuel ministre de la Santé, Xavier Bertrand, à l’époque ministre du Travail s’était exclamé en 2008, lors des premières discussions sur une taxe nutritionnelle, en ne mâchant pas ses mots : « Cela augmenterait les prix, et je ne suis pas sûr que ça changerait les comportements ».

Cette taxe a donc plus pour vocation de rassurer les marchés, faire croire aux consommateurs que leur santé importe à l’Etat, et rapporter quelques maigres millions d’euros. Quoique ? Et si le consommateur, au lieu de se rabattre sur d’autres boissons et donc de con-som-mer (et de payer des taxes) passait à l’eau ?  Un rêve pieux certes, mais qui aurait le mérite d’améliorer la santé de la population si l’on en croit François Fillon et Nora Bera, Secrétaire d’Etat à la santé. On ne peut pas d’un côté clamer qu’il faut taxer les boissons sucrées pour générer des revenus et vouloir que le consommateur en consomme moins. A moins d’être schizophrène, cela ne fonctionne pas.

L'aspartame : palliatif plus dangereux aux boissons sucrés

Néanmoins, si l’on pousse la mesurette un petit peu plus loin, on réalise bien que les consommateurs qui veulent économiser quelques centimes par semaine vont se rabattre sur les sodas sucrés à l’aspartame, édulcorant de plus en plus remis en question par les professionnels de la santé, à tel point que l’Union européenne a ramené à 2012 l’examen de cet adjuvant.

Si, à l’occasion de cette examen, les risques liés à la consommation de l’aspartame sont dévoilés, prouvés et acceptés une bonne fois pour toute, nous aurons donc passé une mesure de taxation d’un produit favorisant l’obésité (fait sur lequel tous les spécialistes de la santé ne sont pas d’accord) en faveur d’un produit ayant des effets secondaires néfastes sur le plan de la santé publique.  

Pour 120 millions d’euros rapportés, combien d’euros de dépenses maladies devront être déboursées par la CAM pour soigner les consommateurs souffrant de maladies liées à la consommation de l’aspartame ? D’autant que selon une étude indépendante, menée sur une période de plus de 10 ans, par Katherine Appelton, chercheur à l’Université de Belfast, la consommation d’une boisson édulcorée avec de l’aspartame avant un repas augmente la prise alimentaire de 150 calories (à cause de la réaction insulinique due à l’aspartame). [Sic]

Une taxe qui ne prend pas en compte le problème global de la malbouffe

Cette taxe, sortie d’un contexte de lutte contre l’obésité global, n’aura selon toute vraisemblance aucun impact sur la consommation de produits sucrés. Elle diabolise aussi la nourriture d’une façon peu logique en stigmatisant une seule catégorie de produits, et en ignorant des pans entiers de la malbouffe : chips, gâteaux gras, plats tout faits mal équilibrés, pizzas industrielles, frites, etc… Il paraît étonnant que Matignon se concentre uniquement sur les boissons sucrées, sans prendre le temps de concocter un programme holistique qui ne mettrait pas à l’index une seule catégorie d’aliments, traitant les boissons sucrées comme la cigarette ou l’alcool.

C’est pour cette raison que l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA) a durement réagi jeudi dernier, à cette taxe, qu’elle juge (forcément) scandaleuse : « Taxer certaines denrées alimentaires, sur la base d'arguments de santé publique, alors même que ces produits sont autorisés sur le marché, et qu'ils font l'objet de contrôles permanents de la part des autorités sanitaires, est purement et simplement illogique et scandaleux ».

Des solutions à apporter qui vont au-delà d'une simple taxe

Pour fondamentalement s’attaquer au problème de la dette nationale via la santé des français, il est important que l’Etat se lance dans une réelle réforme de la publicité sur les produits sucré et gras, les menus servis en cantine, l’éducation nutritionnelle des enfants (non sponsorisée par des marques ou des lobbies de l’agroalimentaire), les programmes sportifs dans le milieu scolaire et paradoxalement, réduise la TVA sur les fruits et les légumes, à  ce jour de 19% alors que la restauration rapide, souvent constituée de hamburgers, frites et boissons sucrées n’est taxée qu’à hauteur de 5.5%.

En effet, un rééquilibrage des taxes, avec 5.5% sur les aliments sains (fruits, légumes, produits complets), et 19% sur les aliments non indispensables (gâteaux, sodas, bonbons, etc…) pourrait être une solution logiquement acceptable par tous puisque l’effet global sur le portefeuille de la ménagère serait nul.

Enfin, plutôt que d’imposer une taxe régressive non équitable, qui impacte le porte monnaie des ménages les plus modestes, pourquoi ne pas imposer des règles aux industriels de l’agroalimentaire : des teneurs en sucre et graisses réduites, à l’instar de ce qui s’est fait sur les acides gras trans avec succès ?

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