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Taxation du livret A : le coup
de poignard de la Cour des comptes aux promesses électorales
de François Hollande
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Abbération

La Cour des comptes propose de taxer par des prélèvements sociaux de 15,5% les revenus dépassant les 15 300 euros placés sur le livret A. Une proposition qui vise à réconcilier les Français avec les entreprises et les entrepreneurs plus qu'avec la protection sociale.

Marc Fiorentino

Marc Fiorentino

Marc Fiorentino a œuvré pour des banques d'affaires américaines en Europe durant seize ans, puis a créé sa propre société de Bourse, Euroland Finance, et en 2007, un site de conseil en investissement financier, Allofinance.com.

Il est l'auteur de Sauvez votre retraite, paru le 17 janvier 2013 aux éditions Robert Laffont

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Atlantico : Dans son rapport « L'État et le financement de l'économie » publié jeudi, la Cour des comptes propose de taxer par des prélèvement sociaux de 15,5% les revenus dépassant les 15 300 euros placés sur le livret A. Selon ce même rapport, 45% de l'épargne des Français finance des entreprises situées hors de l'Hexagone. Cette mesure peut-elle réorienter l'épargne vers les entreprises françaises par le biais de l'assurance vie, au détriment des logements sociaux financés par le livret A ?

Marc Fiorentino : Le livret A connaît un succès phénoménal depuis le début de la crise. Et l’engouement ne s’est pas démenti avec la barre des 100 milliards de collecte déjà dépassée en 2012. Ce succès n’est pas une bonne nouvelle. Il reflète la peur des Français. Peur de l’avenir, peur du chômage, peur du financement de la retraite. Le livret A est un indicateur majeur d’aversion au risque.

Encourager les Français à investir dans le livret A ou dans les autres livrets défiscalisés est une aberration. Même si une partie des fonds collectés a une fonction de financement social, souhaitable et nécessaire, l’argent investi dans ces produits ultra sécuritaires est détournée de l’économie réelle. Si on ajoute à cela les dizaines de milliards qui sont drainés par l’Etat pour le financement de sa dette, on comprend mieux pourquoi les entreprises, surtout les petites et moyennes, celles qui créent les emplois de demain et font en Allemagne la force de l’économie, n’ont pas accès au financement de leur développement.

Je suis pour une taxation à 75%, puisque ce chiffre est à la mode,  et non 15.5%, sur les revenus dépassant le plafond actuel car je pense que relever le plafond du livret A est une totale absurdité.

Sachant que l'assurance vie est déjà taxée par la CSG et la CRDS, cette proposition est-elle insuffisamment incitative – ou contraignante  pour réorienter l'épargne des Français ? Comment parvenir à améliorer le financement des entreprises ?

L’orientation de l’épargne n’est pas liée à un différentiel de quelques pourcents de fiscalité. L’orientation de l’épargne des Français est liée à la confiance et au discours environnant. Si le taux d’épargne des Français a atteint les 18.6% ce n’est pas parce que le rendement des placements a augmenté, au contraire il n’a fait que chuter, c’est parce que les Français veulent avoir une épargne de précaution. Il faut rétablir la confiance. Dans l’Europe, dans la gestion de notre dette et de notre déficit. Et les épargnants retrouveront, à petites doses, le chemin du financement des entreprises par la Bourse.

Mais il y a également un problème culturel majeur : on ne peut pas être surpris par le fait que les Français n’aiment pas investir dans les entreprises quand les entreprises sont assimilées trop souvent au « Grand capital » et diabolisées. En France remplir son livret A et prêter à l’Etat toujours plus d’argent c’est bien, mais investir dans une entreprise c’est presqu’un crime de lèse majesté.

Cette proposition ne manifeste-t-elle pas un désaccord de la Cour des comptes vis-à-vis de François Hollande, qui a promis un rehaussement du plafond du livret A ?

La Cour des comptes, par cette mesure, réagit à l’aberration que représente le rehaussement du plafond du livret A.  La Cour des Comptes privilégie, et elle a raison, l’investissement productif à la stérilisation de l’épargne, comme elle privilégie la baisse des dépenses publiques aux hausses d’impôts.

Il faut rappeler à tous des règles simples. Pour créer de la croissance, il faut créer des emplois. Pour créer des emplois, il faut créer et développer des PME et des ETI. Pour créer et développer des PME et des ETI, il faut favoriser le financement. Et pour favoriser le financement, il faut créer des incitations pour des investissements dans les entreprises et non pas favoriser l’épargne ultra sécuritaire. Si toute l’épargne des Français va vers les livrets A et les fonds euros des contrats d’assurance vie, nous pourrons mettre la clé sous la porte, ce que font d’ailleurs de nombreuses entreprises.

Par cette proposition, la Cour des comptes envoie un message fort : ne relevez pas le plafond du livret A mais réconciliez les Français avec les entreprises et les entrepreneurs.

Propos recueillis par Oliver Harmant

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