A qui la faute ? Pourquoi la loi interdisant de fumer dans les lieux publics est de moins en moins respectée <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Consommation
A qui la faute ? Pourquoi la loi interdisant de fumer dans les lieux publics est de moins en moins respectée
©

Clopin-clopant

Cinq ans après son entrée en vigueur, les associations anti-tabac tirent la sonnette d'alarme.

Gérard  Audureau

Gérard Audureau

Gérard Audureau est président de l'association DNF (les Droits des non-fumeurs) depuis 2002

Voir la bio »

Atlantico : Cinq ans sont passés depuis la mise en vigueur de la loi française interdisant la consommation de tabac dans les lieux publics. Le bilan est contrasté : la loi ne serait toujours pas respectée. Pour quelles raisons ?

Gérard Audureau : Il y a plusieurs raisons à cela mais la principale est que les agents chargés de contrôler et éventuellement sanctionner n’interviennent plus du tout. C’est donc logique que la dépendance entraine les gens à commettre de petites infractions qui grossissent au fil du temps, au point de finalement globaliser l’infraction en question.

Qui sont ces agents chargés de sanctionner ?

Chaque secteur a des agents différents qui peuvent intervenir. Par exemple, dans le cadre de la SNCF, ce sont des agents assermentés de la SNCF, mais il y en a un certain nombre qui fument eux-mêmes dans des endroits interdits. Il leur est donc difficile de demander aux gens de ne pas fumer…

Pour le reste des lieux à usage collectif comme les cafés et les restaurants, ce sont les policiers et les gendarmes. Mais malheureusement, ils n’ont pas de directives précises donc ils n’interviennent pas.

Le plus important, c’est dans le cadre de l’entreprise où les inspecteurs du travail sont en charge mais sont très peu nombreux. Il y a donc quasiment aucune intervention. Même quand on donne des conseils ou que des gens se plaignent en appelant un inspecteur du travail, ils ont une réponse négative ou on leur conseille d’aller voir le médecin du travail ; ce qui est ridicule puisqu’il n’a aucune fonction possible en la matière.

Quand les agents de police tournent dans la ville à pied et qu’il passent devant un café en infraction il n’est pas compliqué de rentrer et de dire au patron du café « vous êtes en infraction, veillez à ce que ça ne soit plus le cas demain ou après-demain sinon je serai obligé de vous dresser un procès-verbal »

Pourquoi ne le font-ils pas ?

Ils n’ont pas d’instruction en la matière, leurs supérieurs ne leur donnent pas le conseil de le faire. 

Pour les inspecteurs du travail c’est différent car ils sont très peu nombreux. Mais cela n’est pas une raison pour considérer que le tabac est moins important que le reste de leur activité.

Il y a beaucoup de pays qui ont réussi à faire tomber leur consommation à 8 ou 10 % de la population mais nous sommes à quasiment 30 %. Nous avons donc une marge de manœuvre très importante.

Ce que je critique c’est surtout de laisser rentrer la fumée à des endroits où elle peut causer du tort aux gens qui ne fument pas. Je pousse un cri d’alarme. Partout où on devrait être protégé du tabagisme passif, il y a de plus en plus d’infractions et de contournements de la loi. En France, selon l'Institut Gustave Roussy (IGR) il y a 400 à 500 décès de cancer du poumon liés au tabagisme passif. Mais on sait que le cancer du poumon  ne représente que 30% de la totalité des décès causée par tabagisme. On tourne donc autour d’un millier de personnes qui meurent à cause du tabagisme passif et des centaines de milliers qui ont des maladies liées à cela.

La meilleure solution aujourd’hui serait que les gens qui ne fument pas se prennent en charge lorsqu’ ils sont confrontés au tabagisme passif. Cela permettrait d’être certain que le minimum soit respecté. Quand ils rentrent dans un café où l’on fume il faudrait qu’ils « rouspètent » en disant au patron que ce n’est pas normal, que c’est interdit. De même au travail, et si cela ne marche pas, qu’ils écrivent à l’inspecteur du travail ou à l’association qui va les aider dans leur démarche.

Vous voulez dire que les non-fumeurs sont en partie responsables de la situation ?

Disons que c’est ancré dans les gènes des générations les plus anciennes puisqu’on a vécu pendant un siècle sous la domination du tabagisme roi, où le fait de fumer était quelque chose de très valorisant. Les gens avaient l’habitude de considérer que la tolérance était nécessaire entre fumeurs et non-fumeurs. Ils subissaient donc, sans s’en rendre compte, des méfaits qu’ils ne subissent pas quand ils ont des espaces protégés de la fumée. Comme petit à petit revient l’habitude de fumer dans des endroits interdits, ils sont à nouveau en contact avec la fumée, ces mêmes réflexes reviennent. Donc arrêtez ! Ne vous laissez pas faire! Réclamez !

Que demandez-vous au prochain ministre de la Santé ?

Respecter la loi, respecter les obligations qui dans la loi sont données aux agents de contrôle et qui dépendent de plusieurs ministères d’ailleurs. En ce qui nous concerne, appliquer la loi par rapport aux lieux où c’est interdit de fumer mais également par rapport à un volet très important de la loi Evin qui est celui de l’interdiction de faire de la publicité.

Le problème c'est que la question du tabac est en permanence un problème électoral : les cafés et les débits de tabac sont des acteurs de communication très importants et l’on parle de politique dans ces endroits-là... 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !