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Spoil system à la française, selon le gouvernement, tout est désormais en ordre. Mais avec quel résultat ?
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Renouvellement

Le gouvernement a annoncé être parvenu au terme du passage en revue des directeurs d’administration centrale en décrivant un « appareil d’État désormais stable et mature ». Ceux qui ont été remplacés, ceux qui sont restés, que retenir des choix effectués ?

Jean-Marc Boyer

Jean-Marc Boyer

Jean-Marc Boyer est diplômé de Polytechnique et de l’Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE). Il a commencé sa carrière en tant que commissaire contrôleur des assurances puis a occupé différentes fonctions à l’Inspection Générale des Finances (IGF), à la Commission de Contrôle des Assurances et à la direction du Trésor. Il est cofondateur de GLM et de la Gazette de l’Assurance.

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Atlantico : Conformément à la promesse de campagne Emmanuel Macron, "d’ici la fin 2017, les directeurs d’administration centrale et les principaux dirigeants des organismes publics seront nommés ou confirmés au terme d’une procédure transparente, après revue de compétences et entretien". Le spoil system à la française, concernant la revue des 250 principaux postes de la République, a eu lieu au cours des premiers mois de la présidence. Quel bilan peut-on faire de ce "spoil system", que signifie-t-il d'un point de vue politique ? Que disent "politiquement" les choix réalisés ? 

Jean-Marc Boyer : Le « spoil system » est hérité des USA, où l’on récompense ceux qui ont aidé la campagne, ce qui revient à privilégier la connivence plutôt que la compétence. C’est un contre sens de terminologie de se référer ainsi à de telles pratiques pour un gouvernement qui prône la morale.

C’est très classique de placer des personnes de réseaux proches et de renvoyer des ascenseurs. Par exemple, le président du conseil de surveillance de la Caisse des Dépôts a choisi pour nouveau Directeur Général celui qui l’avait longtemps financé.

Mais à chaque fois, la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) semble par sa bénédiction éteindre les polémiques relatives aux nominations. Politiquement, E. Macron a réussi à verrouiller les pouvoirs, en regagnant même en popularité.

En quoi ce renouvellement en est-il véritablement un ? Quels sont les fondamentaux qui restent inchangés et ceux qui peuvent révéler une véritable différence ? 

Jean-Marc Boyer : Il ne s’agit pas tant d’un renouvellement que d’un rajeunissement. Les personnes nommées ont été formées sur les mêmes moules anciens, qui ont fait preuve de leur inadéquation depuis 50 ans. Les nouveaux dirigeants étant plus jeunes, cela signifie plutôt que le renouveau du logiciel du fonctionnement de l’Etat est repoussé d’autant. 

Il s’agit pour l’essentiel d’opportunismes de carrière bien compréhensibles. Par exemple, le Secrétaire Général pour l’Investissement est un ancien filloniste, qui devra investir dans le secteur privé, dans lequel il n’a pas d’expérience.

« L’appareil d’Etat est stable et mature » affirme le gouvernement. Les postes ont au contraire beaucoup bougé, comme d’ailleurs promis durant la campagne présidentielle. Les nominations ont également permis de rajeunir les dirigeants et non pas de gagner en maturité. On ne saurait en vouloir au Premier ministre pour ce déni façon « post vérité », puisque toutes les décisions se prennent à l’Elysée.

Le plus inchangé, c’est qu’il faut que « tout change pour que rien ne change », comme écrivait G.T. di Lampedusa décrivant l’inéluctable déclin d’une aristocratie, ici administrative.

Qu'est-ce que la République et les Français gagnent et perdent d'un tel renouvellement ?

Jean-Marc Boyer : La République y perd au sens où il s’agit surtout d’une couche supplémentaire de l’aristocratie d’Etat, par opposition au peuple.

Les Français auraient gagné au respect de la promesse de transparence et de compétence. Constatant l’inverse en pratique, la grogne est audible dans les réunions d’En Marche, et suscite des démissions en masse.

Les « nouveaux » hauts fonctionnaires ont encore l’ancien état d’esprit d’existence par la dépense publique, et par la contrainte fiscalo-administrée. Dans un tel contexte, comment imaginer que la réforme de l’Etat (CAP 2022) puisse donner plus de résultats que les Bérézinas de la RGPP et de la MAP ?

Ce sont les Français de demain qui paieront les excès actuels de dépense publique.

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