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Santé et rentrée scolaire : ce qu’il faut savoir pour ses enfants en fonction de leur âge
©FREDERICK FLORIN / AFP

Vade-mecum

C'est la rentrée ! Pour qu'elle se passe pour le mieux pour votre enfant, en termes sanitaires et médicaux, voici nos conseils.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Atlantico : A l'occasion de la rentrée scolaire, à quoi doivent veiller les parents, sanitairement et médicalement parlant, pour protéger leurs enfants en fonction des âges ? Quels sont les risques qui guettent les enfants ?

Stéphane Gayet : L'école est un formidable, mais difficile, apprentissage de la vie et il faut avouer qu'elle est le théâtre d'épisodes plus ou moins désagréables pour l'enfant, qui est, pour de longues heures, extrait du cocon familial. Oui, les risques sont nombreux, mais on peut dire qu'ils sont nécessaires à la construction de l'enfant en temps qu'être social.

Un état des lieux complet de la santé à l'école maternelle

Sur le plan sanitaire, c'est dès l'école maternelle, c'est-à-dire avant l'entrée de l'enfant au cours préparatoire ou CP, qu'il faut anticiper les troubles éventuels de santé. Les enfants de 3 à 4 ans bénéficient gratuitement à l’école maternelle d’un état des lieux complet sur leur santé, réalisé par un médecin et une puéricultrice de protection maternelle et infantile ou PMI. Cet état des lieux est l’occasion de réaliser un dépistage sur les plans de l’audition, de la vision et de la denture de l'enfant. Ces professionnels de santé effectuent également une évaluation de son langage et de son développement global. Car il est capital de reconnaître au plus tôt d'éventuels troubles ou retards de l'enfant : une détection précoce permet une prise en charge dès le plus jeune âge et ainsi la mise en œuvre de méthodes correctrices. Aujourd'hui, les possibilités de correction d'un trouble fonctionnel de l'enfant sont réelles, à condition d'entreprendre une rééducation très précoce. Sans quoi l'enfant sera en difficulté d’apprentissage, à l’école comme dans la vie en général. C'est dés la maternelle et au CP qu'il importe de détecter une difficulté quelconque : cette détection peut être réalisée par un professionnel de santé, un professionnel scolaire ou les parents. Cette visite médicale de l'enfant - qui a un caractère obligatoire - justifie une autorisation d'absence de la part d'un employeur, moyennant une convocation officielle. La présence des parents est en effet tout à fait indispensable, de façon à échanger avec les professionnels de santé sur l'alimentation, les rythmes biologiques, le sommeil, la socialisation, la famille ou encore les loisirs. Il est bien sûr indispensable d'apporter le carnet de santé.

Une détection très précoce d'une difficulté est essentielle pour l'avenir

Plus tard, une dyscalculie (difficulté à reconnaître les chiffres et les nombres, à compter et à raisonner avec les chiffres), une dyslexie (difficulté à reconnaître les lettres et les mots, à lire et à écrire) ou encore une dysorthographie (importantes difficultés avec l'orthographe des mots) doivent être reconnues au plus tôt. Or, les enfants sont volontiers cyniques entre eux et quand l'un d'eux éprouve d'importantes difficultés, il est fréquent que d'autres le moquent sans le moindre ménagement. D'où un sentiment de honte chez cet enfant en difficulté qui s'efforcera de masquer son handicap au lieu d'en parler simplement aux professionnels de l'école et à ses parents.

Les infections virales et autres de la petite enfance

Sur le plan du risque morbide (maladies), la petite ou première enfance – c'est-à-dire avant le cours préparatoire ou CP : de deux à six ans – qui succède à la période dite du nourrisson (de la naissance à deux ans) est fréquemment marquée par une succession d'infections des voies aériennes supérieures (rhinopharyngites, stomatites, otites) ou inférieures (trachéites, bronchites et bronchiolites) et d'infections digestives (gastroentérites). Ce sont des infections qui sont généralement dues à des virus et contre lesquelles il n'existe pas de vaccin, hormis le rotavirus (gastroentérite aiguë), contre lequel la vaccination n'est pas systématique, mais discutée au cas par cas. Ces infections virales à répétition de la petite enfance ne sont pas inéluctables, mais leur prévention est tout de même bien difficile dans le contexte de grande promiscuité de l'école maternelle. Et lorsque l'un des enfants est retiré temporairement en raison d'une infection, il a déjà eu le temps de contaminer les autres avant son exclusion.

Toujours sur le plan infectieux, la gale, les puces et poux font partie des risques de l'école. C'est surtout la gale qui est redoutable : elle est insidieuse, tenace et récidivante. Il faut y penser dès qu'un enfant se gratte les mains, poignets, avant-bras et flancs (localisations fréquentes) : ces démangeaisons (prurit) sont irrépressibles. Il faut agir vite et suivre à la lettre le protocole (on traite les personnes-contacts également). Quant au prurit anal, il doit avant tout faire évoquer une infestation par des petits vers que sont les oxyures. C'est elle aussi une parasitose récidivante, mais nettement plus facile à traiter que la gale.

Sur le plan de la prévention de toutes ces infections : en premier lieu, des ongles coupés à raz et de bonnes habitudes d'hygiène des mains inculquées très tôt à l'enfant.

Le harcèlement moral des enfants à l'école

Le harcèlement à l'école est aujourd'hui fréquent. Un enfant peut être harcelé ou être au contraire harceleur. Dans un cas comme dans l'autre, il faut intervenir rapidement. Il est souvent plus facile de reconnaître tôt un comportement harceleur qu'une situation où c'est l'enfant qui est harcelé. Dans le premier cas, l'enfant est plutôt fier de lui. Dans le second, il a honte et répugne souvent à en parler. Or, ces deux situations sont fort préjudiciables, mais plus la seconde que la première. L'enfant peut également se faire voler (sa montre…) ou se faire racketter quand il a de l'argent sur lui. Un enfant qui se fait voler un objet est parfois habité par le même sentiment de honte qu'un enfant harcelé et pourra dire qu'il a perdu cet objet au lieu d'avouer qu'on le lui a volé.

Plus tard, les risques liés au sexe, au cannabis… mais aussi au tabac

Au collège plus qu'au lycée, les deux risques importants qui menacent l'enfant sont le sexe et le cannabis. Le risque sexuel est varié : un enfant chétif ayant un retard staturo-pondéral et pubertaire pourra être la proie sexuelle d'adolescents (moquerie, exhibitionnisme, attentat à la pudeur, attouchements, pornographie, voire de viol) ; un enfant pubère pourra se laisser entraîner dans des jeux répréhensibles et dangereux pour sa santé. Le risque cannabique est fréquemment sous-estimé. Or, la proportion d'adolescents y ayant déjà goutté en France est terrifiante. Sa dangerosité est maintenant bien montrée, particulièrement sur le système nerveux, et ce n'est pas une drogue douce. Face à ces deux risques (sexe et cannabis), les parents devraient être proactifs. Il est préférable d'anticiper ces deux épisodes plutôt que de se trouver face à leurs dégâts. C'est délicat et il faut une forte détermination pour le faire.

Évidemment, le risque tabagique reste bien présent chez les préadolescents et adolescents. Comme sa prévention est difficile. Une chose est certaine : les tentatives de faire peur à propos des maladies dont les cancers et de culpabiliser l'enfant ne fonctionnent pas. C'est en informant patiemment et de façon répétée, mais sans trop insister que l'on peut espérer avoir une quelconque action préventive.

Concrètement quelles sont les erreurs les plus fréquentes sur lesquelles il faut informer les parents ?

L'école est une sorte de vie en miniature : elle y prépare, il faut passer par elle

L'école est un groupe social irremplaçable. Elle permet à l'enfant de découvrir et d'apprendre ce qu'est la vie en communauté et de s'y adapter. C'est grâce à l'école qu'il se construit, qu'il se fait peu à peu une place parmi ses semblables et sous la houlette des adultes qui ont été formés à cela. C'est, il faut le reconnaître, une institution vraiment remarquable. Il suffit pour s'en convaincre de se pencher sur les enfants qui sont sortis très tôt du système scolaire et quelle qu'en soit la raison. Les souvenirs d'école comptent souvent parmi les plus marquants chez un adulte qui évoque ses jeunes années. Idéalement, l'institution scolaire s'inscrit en complément de l'éducation donnée par les parents. Évidemment, c'est un idéal et il existera toujours des expériences défavorables et même parfois douloureuses.

Le danger de la surprotection qui est plus néfaste que bienfaisante

L'une des erreurs les plus fréquentes est probablement la tendance à la surprotection. Elle se comprend facilement quand il s'agit d'enfants fragiles, soit physiquement (les enfants dont l'état de santé est faible : infections fréquentes, retard staturo-pondéral, élan vital réduit), soit psychologiquement (tendance au repli sur soi, angoisse de séparation de la mère, difficultés à se défendre). C'est une tendance instinctive qui toutefois ne rend pas service à l'enfant. Il faut la combattre au profit de l'instauration d'un climat de confiance optimal. L'école est un lieu d'apprentissage des déconvenues, des frustrations et des chagrins. Il est essentiel que l'enfant ait totalement confiance en ses parents et en leur possibilité d'intervenir au cas où ce serait nécessaire du fait d'un réel incident.

La relative transparence n'est pas une utopie ; elle est une sécurité

Il est crucial que l'enfant n'hésite pas à dire à ses parents tout ce qui se passe et lui arrive, sans exagération ni dramatisation, de façon aussi factuelle que possible pour un enfant. C'est ce qui lui permet de nourrir un dialogue constructif avec ses parents et contribue à l'installer dans un climat de sécurité, déjà sur le plan affectif en se sentant complètement soutenu, mais aussi physique. Obtenir de l'enfant qu'il nous dise l'essentiel de ce qui lui arrive de bien comme de mal est déjà une ligne de conduite favorable. Il s'agit ensuite de tempérer nos réactions tant dans un sens que dans l'autre en fonction des relations qu'il nous fait : ni compliment excessif ni apitoiement appuyé. L'enfant doit se sentir simplement compris et soutenu fermement, mais aussi responsabilisé.

L'instauration de ce climat de confiance et de transparence (bien sûr relative) permet aux parents d'avoir l'attention attirée dès que quelque chose de sérieux semble s'annoncer. Attention aussi à ne pas pousser les enfants à nous mentir : c'est une question de tact, de sensibilité. Il faut se garder d'être brutal dans le questionnement, il faut préserver l'intimité de l'enfant et du préadolescent (pour l'adolescent, les habitudes sont déjà prises). Les doutes, les suspicions doivent nous inciter à la prudence et à la réflexion avant d'intervenir. Une question abrupte et a fortiori violente peut être très dommageable. Les mères sont souvent plus délicates et fines que les pères qui veulent plutôt affirmer leur autorité.

L'habitus révèle bien des choses : il faut lui accorder une grande importance

L'enfant qui grandit se structure et se forge une personnalité. Notre devoir est d'être attentif à son habitus, c'est-à-dire sa façon de s'habiller, les soins qu'il accorde à son corps, son vocabulaire, en un mot sa façon d'être. Le mot habitus est plus proche du mot habit que du mot habitudes avec lequel il est souvent amalgamé. Or, l'habitus est révélateur de bien des choses : il est un indicateur précieux qu'il faut apprendre à décrypter. Dans ce domaine là encore, les femmes sont plus subtiles que les hommes. Un enfant qui se néglige sur le plan des soins du corps révèle une fragilité et souvent un mal-être. Il faut être très attentif aux signes qui peuvent révéler une consommation d'alcool (haleine, congestion des yeux, une certaine agressivité ou excitation). Sur le plan de la prévention des maladies infectieuses, on peut au moins espérer avoir une action sur l'hygiène des mains : maintenir ses ongles courts et même si possible très courts, se laver les mains après avoir été aux toilettes et avant de toucher de la nourriture et de manger, c'est essentiel.

Enfin, concernant la couverture vaccinale et les vaccinations, l'institut IPSOS dans un sondage datant de 2017 démontrait que 17% des Français pensent que les vaccins peuvent provoquer l'autisme chez les enfants. Seuls 35% jugent que cette affirmation est fausse, près de la moitié étaient indécis. Concrètement quelles peuvent être les conséquences de ces croyances sur la santé des enfants ?

Cet exemple est significatif d'une tendance sociétale que l'on peut qualifier d'inquiétante. Tout le monde ou presque est connecté à l'internet. Cette connexion est de plus maladive chez certains qui ont les yeux rivés sur l'écran de leur téléphone mobile ou de leur tablette dès qu'ils le peuvent. Le spectacle qu'offrent les rues et les espaces publics est édifiant. Il y a bien sûr les textos en série (il suffit d'observer la mimique du sujet pour deviner le ton du message), mais aussi la navigation de blogue en blogue, de site en site, au gré des newsletters ou autres courriels d'information. Or, étant donné que l'on constate une accélération des rythmes de vie et une véritable frénésie pour la rapidité, il est de plus en plus fréquent de survoler les articles et autres textes : on lit un titre et les toutes premières lignes, on survole un résumé ; ce n'est même plus de la lecture en diagonale, c'est du papillonnement qui est devenu une pratique normale. Il n'est dans ces conditions plus possible de connaître quoi que ce soit de façon approfondie ni même sérieuse. Il est de plus en plus fréquent que des lecteurs commentent un article à la simple lecture de son titre, ce qui est aberrant.

Il résulte de cette tendance à la superficialité une connaissance plus que rudimentaire de bien des choses. Ce qui n'empêche pas tout un chacun de se forger une opinion et même de la faire connaître à qui veut l'entendre. En parodiant ce très regretté Michel Colucci, qui a écrit et dit "Il a des idées sur tout, il a surtout des idées", on peut dire de ces individus "Ils ont des avis sur tout, ils ont surtout des avis". C'est ainsi que l'on fait maintenant des sondages sur beaucoup de domaines : êtes-vous pour ou contre les organismes génétiquement modifiés ou OGM, les éoliennes, les poissons d'élevage, la climatisation, les loups, les ours, les vaccins, les moteurs diesel, les antibiotiques… alors que chacun de ces sujets est d'une grande complexité, complexité si grande que même les experts ont du mal à en exprimer une synthèse claire et nette.

Les vaccins sont les médicaments dont le rapport bénéfices sur risques est le très loin le plus important. Ils ont permis de sauver énormément de vies humaines. Étant donné que tout médicament a des effets secondaires, ils ont les leurs. Ils ont pu être responsables de certains accidents graves, c'est indéniable. Mais ils sont très rares.

On ne connaît pas la cause précise de la sclérose en plaques (SEP), de l'autisme, ni de la maladie d'Alzheimer. Les chercheurs ont beaucoup de pistes de recherche et leur travail à faire est immense. Mais la littérature scientifique est très abondante et ce serait folie que de croire que tout n'est que mensonge et manipulation. Il n'y a pas de raison scientifique pour croire que des vaccins peuvent provoquer l'une ou l'autre de ces maladies.

Toujours est-il que les fausses croyances sur la santé des enfants sont plus que dangereuses : les enfants morts de la rougeole ou du tétanos sont un scandale, puisque les vaccins contre ces maladies sont très efficaces.

Aujourd'hui plus que jamais, chacune et chacun doit être critique vis-à-vis de tout ce qu'il entend et de tout ce qu'il lit. Tout un chacun n'est pas légitime pour parler de n'importe quoi et il est essentiel de vérifier les sources et les crédits de toute information. Surtout pour la santé de nos enfants. On ne peut pas jouer à la loterie avec leur avenir sanitaire.

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