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Egypte : Frères musulmans / salafistes : peu importe c'est l'armée qui aura le dernier mot !
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Egypte

C'est dans un contexte politique particulièrement tendu et confus que les Égyptiens ont commencé à participer massivement aux élections législatives. Deux partis islamistes se distinguent lors de ce premier tour, leurs influences sur l'assemblée constituante est cependant loin d'être établie.

Bernard Botiveau

Bernard Botiveau

Bernard Botiveau est directeur de recherche émérite au CNRS. Il est rattaché à l’Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (IREMAM) d’Aix-en-Provence.

 

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Atlantico : Lors du premier tour des élections législatives en Egypte l'ensemble des mouvements islamistes a été crédité officiellement de 65% des voix. Comment expliquer un tel succès ? 

Bernard Botiveau : Ce n’est pas un succès global et homogène. C’est l’addition de deux blocs différents voire antagonistes. Il est indispensable de différencier ces deux listes islamistes.

C’est environ 40% pour les Frères musulmans et 25% pour le parti salafiste, Al-nour.  Nous ne pouvons pas prétendre que 65% des électeurs ont voté islamiste, ce sont deux partis bien distincts.

Le succès des Frères musulmans s’explique à travers leur identification à l’opposition du régime d’Hosni Moubarak. Ils incarnent l’opposition à l’ancien régime. En nombre, les Frères musulmans ont été en première ligne face au régime Moubarak. Ces derniers ont été arrêtés, emprisonnés, jugés et condamnés par les tribunaux militaires notamment. Ils sont populaires et défendent les intérêts des catégories défavorisées, d’où ce succès. Ils ont eu l’occasion de montrer qu’ils étaient sur le terrain à travers leurs actions en termes de travail social.

Le succès des salafistes est différent, ils ont, semble-t-il, un électorat plus jeune. Leurs électeurs manifestent une volonté de changement radical avec l’ancien régime. Leur électorat est constitué d’individus qui refusent autant les militaires, les anciens moubarakiens, que les Frères musulmans. Ils associent les Frères musulmans à l’ancien régime car ils sont perçus comme une formation institutionnalisée. 

Quelle est la différence entre les Salafistes et les Frères musulmans ? 

Dans un cas comme dans l’autre, ils se réclament de la loi islamique de la charia.

Les Frères musulmans sont une confrérie à la fois politique et religieuse. Ces derniers  ont une version codifiée et instituée de la loi islamique depuis une dizaine d’années. Concernant le code de la famille, l’interprétation valable est celle qui a été faite par l’Etat égyptien, adaptée à un système de l’égalité moderne.

Les salafistes prônent un retour aux sources fondamentales que sont le Coran et le prophète, en éliminant tout le travail historique des théologiens et des spécialistes de la jurisprudence islamique dans l’histoire, mais également les codifications modernes. Il faut recouvrer la pureté originelle de l'islam. Ils ne veulent pas d’écran entre la vie des croyants et la tradition prophétique.

Quel serait l'impact d'une arrivée au pouvoir des deux partis pour l'Egypte ? 

Les deux partis vont rentrer dans une assemblée dans laquelle ils vont devoir effectuer un travail parlementaire. Pour le moment, nous ne savons pas combien ils auront de sièges respectivement, les élections n’étant pas terminées et le premier tour n’étant pas complètement achevé. N’ayant pas le résultat définitif nous ne pouvons définir leur représentation au sein de l’assemblée.

Nous pouvons cependant distinguer trois forces principales :

  • Les Frères musulmans,  islamistes modérés.
  • Al-Nour, le parti salafiste.
  • Et le Bloc égyptien, les libéraux. 

Les votes à l’assemblée s’effectueront par alliance avec les Frères musulmans dans certains cas et avec les salafistes dans d'autres cas selon les stratégies politiques. 

Il est indispensable d’attendre la répartition des sièges à l’assemblée, d'observer les relations avec le gouvernement actuel, et enfin la rédaction du texte constitutionnel. Tant que ce dernier n’est pas établi nous ne pouvons pas émettre de pronostics sur le pouvoir égyptien. La situation reste assez floue, il existe une composition pluraliste et ouverte avec cependant une forte pression islamiste.

Il est important de noter que l’assemblée constituante sera en partie formée par les élus de l’assemblée mais pas seulement. Le CFSA ( Conseil Supérieur des Forces Armées) ayant décidé de faire partie à 80% des membres de la constituante, cette mesure ne laisse pas beaucoup de place au parlement. Le pouvoir constituant de l’assemblée sera tout de même limité.

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