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©JOEL SAGET / AFP

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Les maladies d'hiver ont le même chemin de transmission que le Covid. Quelles leçons tirer du Covid pour mieux appréhender ces virus de saison ?

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Atlantico : Les maladies de l’hiver sont de retour, et le Covid est toujours dans l’air. Qu’est-ce qui, dans nos réflexes pris pour lutter contre le Covid peut nous permettre de plus facilement faire face aux maladies saisonnières ?

Antoine Flahault : Ce que l’on appelle « les maladies de l’hiver » sont pour la plupart des maladies dues à des virus respiratoires, au premier rang desquels nous plaçons habituellement celui de la grippe, mais pas seulement. Ces virus partagent tous d’être à transmission aérosols, par les microgouttelettes contaminées de notre respiration. Dans la rue, ces aérosols sont quasi instantanément dilués dans l’atmosphère et ce n’est visiblement pas la rencontre avec quelques virus qui nous contamine mais bien davantage le fait de rester pendant plusieurs heures dans des locaux fermés, mal ventilés en présence de personnes contaminées. Avec 12 mouvements respiratoires par minute, nous nous infectons plusieurs fois de suite lors d’un séjour un peu prolongé dans une pièce en restant dans un nuage d’aérosols contaminés. Il faut aussi envisager parmi les maladies de l’hiver les gastroentérites dues le plus souvent à des virus à la transmission manuportée. Le lavage des mains est alors préconisé pour réduire les risques de transmission.


A quel point ces maladies saisonnières sont-elles, comme le Covid, principalement transmises par aérosols ?

Antoine Flahault : Concernant le coronavirus responsable du Covid-19, malgré plus de 635 millions de cas rapportés dans le monde à ce jour, il reste très exceptionnel que d’autres modes de transmission que la seule voie aérosol soit invoquée. La voie aérosol semble donc quasi-exclusive dans la transmission du COVID-19. Si donc on s’attelait à réduire les transmissions par voie aérosol, nous serions probablement capables de réduire de plus de 90% les risques de contamination du coronavirus, et probablement d’autant toutes les autres viroses respiratoires, dont la grippe. Il faut voir combien se sont effondrées les contaminations par le virus de la grippe et le virus respiratoire syncitial, deux grands pourvoyeurs de « maladies de l’hiver », durant les trois premières années de la pandémie, car nous avons porté massivement des masques en lieux clos et appliqué des gestes barrières qui se sont avérés efficaces à en réduire le risque.


A mesure que la pandémie a duré, l’acceptation sociale du masque a diminué. Pourtant il est utile pour bien plus que le Covid. Comment le rendre plus acceptable ? Peut-on restreindre son usage à certains cas ?

Antoine Flahault : Des anthropologues pourront probablement apporter de meilleurs éléments de réponse à votre importante question que les miens. Porter un masque n’est pas très plaisant, c’est vrai, mais on peut s’étonner que face aux risques de COVID-19 qui sont loin d’avoir disparu, et comme vous le dites face à bon nombre d’autres viroses saisonnières, on ne voie pas davantage de personnes porter le masque en lieux clos et notamment dans les transports publics, souvent bondés, insuffisamment ventilés. Il serait peut-être utile que l’on se penche sur la fabrication de masques en tissu qui seraient homologués aux normes élevées de filtration (de type FFP2), ce qui permettrait de fournir à la population des masques lavables, plus confortables, esthétiquement plus plaisants, et qui pourraient être moins onéreux et de moindre empreinte écologique que les masques jetables.

Les efforts de ventilation, qui se font encore tant attendre pour le Covid, seraient-ils une arme efficace pour les maladies saisonnières en général ?

Antoine Flahault : En 2019, est survenue une épidémie de tuberculose dans un campus de Taïwan. Le bacille de la tuberculose est connu pour être transmis comme le SARS-CoV-2, c’est-à-dire quasi-exclusivement par voie aérosol. Lorsque des équipes d’intervention sont venues sur le campus universitaire taïwanais, elles ont tout d’abord constaté le très mauvais niveau de ventilation des locaux. La concentration de CO2 mesurée par des capteurs était souvent au-dessus de 3000 ppm. Les équipes ont alors aéré massivement les locaux universitaires et lorsque la concentration de CO2 est passée sous les 1000 ppm, on a constaté que plus de 95% des contaminations avaient été réduites. Mais l’on a accentué la ventilation, et au dessous de 600 ppm dans les locaux du campus, plus aucune contamination n’a été observée. Nous pourrions probablement faire des gains substantiels en matière de contrôle du COVID-19 si nous décidions de nous atteler à l’amélioration de la qualité de l’air intérieur. Il a fallu assainir tout le circuit de distribution de l’eau de nos robinets pour parvenir à éliminer le choléra, à tel point que ne subsistent aujourd’hui des cas de choléra que là où l’on n’a pas encore réussi à conduire ces travaux d’assainissement. Il me semble que, si nous voulons éliminer le Covid-19, nous ne pourrons pas faire l’économie de travaux d’assainissement d’envergure similaires à ceux de l’eau, concernant désormais la qualité de l’air intérieur, pour les lieux clos recevant du public incluant les transports publics.

Lorsque l’on est malade, quelle que soit la cause, quels sont les bons comportements à adopter, pour soi et pour les autres ?

Antoine Flahault : La première mesure est d’avoir un schéma vaccinal complet à jour, car le vaccin évite au moins les formes graves et réduit les risques de Covid longs et probablement, dans une certaine mesure, les transmissions, ou au moins la dose infectante en cas de transmission. Aujourd’hui, il convient de se tester lorsque l’on a des symptômes mêmes légers et peu spécifiques, comme un vague rhume, des salves d’éternuements non explicables, une toux persistante, ou encore des signes digestifs. Les CDC nord-américains recommandent de s’autotester trois fois à 48 heures d’intervalle ou de pratiquer un test PCR. Si l’on est négatif, cela ne prouve pas l’absence d’infection. Si l’on est positif on se sait contaminé par le SARS-CoV-2. Lorsque l’on est positif, un isolement de cinq jours est requis en France. Même négatif, tant que l’on a des symptômes on devrait continuer de porter un masque pour éviter de contaminer son entourage, quel que soit le virus en cause. En famille on peut chercher à éviter les clusters. Il n’est certes pas aisé de porter un masque en permanence, mais les mesures combinant le port du masque autant que possible, l’aération avec un taux de CO2 inférieur à 600 ppm, et les repas fenêtres ouvertes peuvent éviter les contaminations.

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