Quand Marie Lebey ouvre le débat sur la valeur d’une œuvre d’art<!-- --> | Atlantico.fr
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Le commissaire priseur Georges Delettrez préside une vente aux enchères le 06 juillet 2006 à Paris.
Le commissaire priseur Georges Delettrez préside une vente aux enchères le 06 juillet 2006 à Paris.
©OLIVIER LABAN-MATTEI AFP

Atlantico Business

Quand un romancier passionné par les œuvres d’art se lance à la recherche de la valeur d’une œuvre d’art, ça donne un très joli roman qui plonge dans l’actualité du marché international de l’art et nous invite à partager ses passions et ses rêves.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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C’est drôle, très bien écrit et pédagogique en évitant d’être cynique, d’autant que Marie Lebey connait bien ce marché, comment il fonctionne. Elle connait ce monde un peu fermé des commissaires-priseurs et toutes les coutumes, les codes et les combines qui se trament autour d'une œuvre d’art.

Le personnage principal de ce roman, c’est Moustipic, un chef d’œuvre d’Alexander Calder. Une œuvre monumentale qui a passé des années dans le parc d’un club de vacances du midi où il servait surtout à étendre les maillots de bain des enfants de cette colonie de vacances. Lucie de Clichy, personnage qui pourrait être l’auteur (mais non), sera chargée par Simon Bres, un commissaire-priseur un peu particulier c’est à dire fantasque dans ce milieu très secret, d’enquêter sur cette oeuvre. On va donc suivre Lucie dans la recherche des origines de cette sculpture faite de fer et de boulons, pourquoi et quand a-t-elle été récupérée par ce club de vacances, qui l’avait acheté ou commandé et à qui sinon à Calder lui-même. Mais il faut le prouver. C’est donc un jeu de piste, une enquête policière ou journalistique, qui nous emmène là où Calder a travaillé, dans l’atelier de construction métallique qui a pu le fabriquer, chez Aime Maeght, aussi célébrissime collectionneur d’œuvres d’art contemporain de la Côte d’azur qui connait les moindres détails de ce qui s'est passé sur ce marché pendant presque un siècle. Et surtout, tous les artistes qui ont traversé ce siècle. Pourquoi ? Parce que la valeur de ce Calder, sur lequel au départ on ne sait rien, dépend de ce jeu de piste.

Marie Lebey nous fait entrer dans ce milieu très particulier où les échelles de prix et de valeur dépendent de la notoriété des uns et des autres. On croisera même Michel Houellebecq en compagnie de Serge Gainsbourg. Pourquoi eux ? Parce qu'ils sont, à leur manière, des artistes, et qu’ils appartiennent à une espèce d’humains qui comprennent ce que sera la vie. On ne sait pas très bien pourquoi, sauf qu’ils connaissent ce marché où brule parfois un bûcher des vanités, comme le disait Tom Wolf qui n’apparait pas dans le roman mais qui aurait pu…

Alors on ne saura qu’à la fin, bien sûr, si cet incroyable Moustipic n’est qu’un tas de ferraille destinée la rouille du temps ou alors un véritable trésor.

Au bout de ce destin, sait-on comment se fabrique le prix d’une œuvre d’art ? Sans doute un peu mieux. Ce que l’on comprend en revanche, c’est pourquoi une œuvre d’art peut atteindre des montants vertigineux… Ce n’est pas le prix qui fait l’œuvre d’art comme le croient certains, c’est l’œuvre d’art reconnue par le marché à un moment donné qui génère son prix.  Et l’œuvre d’art agrège une somme de travail, une intuition, une vision et une passion de l’artiste et offre un rêve bien sûr. D’où le titre du roman : « la valeur du rêve ». Marie Lebey nous démontre là que l’histoire que l’objet d’art raconte est souvent plus importante que l’objet lui-même.

A lire absolument : la scène des enchères. C’est merveilleusement rapide, efficace et haletant comme une séquence de film parce que jusqu’au coup de marteau final, on ne saura rien sur le prix du rêve et supplice ultime, on ne saura même pas qui se l’est offert. Mais…  

A lire aussi les allusions à peine voilées à l’actualité géopolitique. Quand Marie Lebey nous rappelle que très peu d’artistes ont réussi à émerger dans des pays soumis à des régimes autoritaires. Parce que les artistes ont besoin de liberté pour créer et pas seulement d’un marché pour prospérer. Elle ouvre là un autre débat où elle brule d’envie de nous emmener. Un autre jour peut-être. 

Marie Lebey vit a Paris, dans ce monde de l’art dont elle connait toutes les arcanes.

La Valeur des rêves est son 7e roman, Editions Leo scheer. 

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