Pourquoi l'appel à "l'Union sacrée" n'empêche pas de critiquer la politique du gouvernement <!-- --> | Atlantico.fr
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L'ancien chef de l'Etat a multiplié les attaques envers la politique de François Hollande.
L'ancien chef de l'Etat a multiplié les attaques envers la politique de François Hollande.
©REUTERS/Philippe Wojazer

Leçons d'Histoire

A sa sortie de l'Elysée dimanche 15 novembre où le Président devait recevoir toute la journée les chefs de partis, l'ancien chef de l'Etat a multiplié les attaques envers la politique de François Hollande. Mais quelque soit la valeur des critiques de Nicolas Sarkozy envers le gouvernement, celui-ci, président des Républicains, est dans son rôle de chef de l'opposition lorsqu'il propose des alternatives.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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Après une attaque comme celle que nous venons de subir, nombreux sont les appels à "l'Union sacrée", et la patrie doit effectivement être unie pour combattre le terrorisme. Mais pour certains, l'Union sacrée voudrait également dire qu'on n'a pas le droit de critiquer l'action du gouvernement. Ainsi, on a dit que les critiques de Nicolas Sarkozy envers la politique du gouvernement "enterrent l'unité nationale".

Mais c'est mal connaître l'Histoire. Pendant la Première guerre mondiale, là où ce terme d'Union sacrée est née, le gouvernement n'était pas exempt de critiques. 

L'Union sacrée, d'abord, c'était l'entrée au gouvernement de tous les partis favorables à la guerre. 

Ensuite, c'est quelques principes fondamentaux : le refus d'une paix négociée séparée avec l'Allemagne, le maintien de la Triple Entente - l'alliance, au départ, entre France, Royaume-Uni et Empire de Russie -, la reconquête de l'Alsace-Lorraine. Bref, la guerre.

Mais pendant l'Union sacrée, le gouvernement fait néanmoins l'objet de critiques - les critiques les plus dures venant de Georges Clémenceau, exclu du gouvernement jusqu'en 1917, où il deviendra président du Conseil et gagnera ses lauriers de "Père la Victoire."

Clémenceau, patron de presse, dirige le journal "L'Homme libre", qui critique durement la menée de la guerre par le gouvernement, par exemple sur le ravitaillement de l'armée ou encore la manière dont les blessés sont traités. Tant et si bien que le journal est, grâce aux lois de guerre, interdit de publication -Clémenceau alors le publie de nouveau, sous le titre de "L'Homme enchaîné", puis de nouveau saisi, puis reparu, puis saisi à nouveau. Une fois le journal définitivement interdit, Clémenceau en enverra les feuilles aux parlementaires. Au Parlement, il devient président de la Commission des Armées du Sénat et utilise ce poste pour visiter le front et critiquer fortement le Gouvernement. 

Et pourtant, lorsqu'en 1917 Raymond Poincaré nomme Clémenceau président du Conseil, celui-ci proclame que l'Union sacrée continue, et la revendique--tout en demandant au Parlement de le contrôler, tout comme il avait contrôlé le gouvernement en tant que parlementaire. Pour Clémenceau, il n'y a pas de contradiction.

Plus généralement, il suffit de remarquer qu'au cours de la Première guerre mondiale, la France a eu cinq présidents du Conseil, ce qui montre bien que la classe politique française ne pensait pas que l'Union sacrée empêchait de critiquer le gouvernement, voire même de le remplacer. 

Tout cela pour dire que, quelque soit la valeur des critiques de Nicolas Sarkozy envers le gouvernement, celui-ci, président des Républicains, est dans son rôle de chef de l'opposition lorsqu'il critique le gouvernement et propose des alternatives à la politique du gouvernement.

L'Union sacrée est là : si une chose est sûre, c'est que toute la classe politique est unie dans son hostilité à Daesh et au terrorisme islamiste. Le fait qu'il y ait des désaccords sur le moyen d'atteindre l'objectif de combattre le terrorisme est tout simplement le débat démocratique qui a lieu normalement en République, qui a même eu lieu dans des circonstances encore plus tragiques.

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