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Pour Frédéric Mitterrand, la numérisation n'est pas la fin du livre
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Americano

En visite dans la Silicon Valley, le ministre de la Culture a rencontré les responsables de Google et d'Apple. Il s'est montré ouvert à la discussion sur les droits d'auteur et en a profité pour rappeler la profondeur des liens culturels qui lient la France et les Etats-Unis.

Marylène Delbourg-Delphis

Marylène Delbourg-Delphis

Marylène Delbourg-Delphis est l'une des premières femmes européennes à s'installer dans la Silicon Valley, elle a aussi été P-D.G. de deux autres sociétés américaines (Exemplary, acquise par Persistent Systems et Brixlogic, acquise par Diebold).

Consultante en stratégie et management, facilitatrice M&A, membre du conseil d'administration, advisor ou P-D.G. intérimaire, elle a assisté comme une trentaine de start-ups (infrastructure, cloud, services en ligne et social media).

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Comme j'habite à côté de l'Université Stanford, je suis allée écouter le discours qu'y prononçait notre ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand. Comme toute française devenue américaine, je redoute un peu le style abstrait et volontiers cocoriquant des officiels de l'héxagone. Mais tel n'a pas été le cas, ce qui a donc été une bonne surprise. Frédéric Mitterrand s'est exprimé en anglais, avec un accent qui n'est pas pire que celui de bien des Français de la Silicon Valley (et parfois meilleur), et tout l'esprit de son message était positif et constructif.

De nos jours, un ministre de la Culture et de la Communication se doit de connaître les géants de la high-tech. Frédéric Mitterrand revenait d'une réunion chez Apple où il avait rencontré le Senior Vice President of Software Engineering, Bertrand Serlet et il s'apprêtait à aller chez Google. En jeu, comme chacun sait, sont le respect des droits d'auteur et, d'une manière générale, de la propriété intellectuelle à l'ère de la numérisation massive, mais aussi la préservation de la pluralité et la diversité culturelles et la richesse de notre patrimoine (qu'on peut découvrir en consultant Gallica). Le contentieux entre la France et Google n'est pas nouveau. Il est parfois d'autant plus complexe à gérer que, sur ces points, la France a une position plus rigoureuse que la plupart de ses homologues européens. Il était néanmoins très frappant de voir que Frédéric Mitterrand, pour être ferme sur les principes, est sincèrement ouvert à la recherche de solutions. De fait, si la justice doit suivre son cours, un processus amplement décrit par la presse française, la discussion permet parfois de trouver des terrains d'accord plus rapidement. Entrons dans l'"Internet civilisé", rappelle-t-il, reprenant un thème de Nicolas Sarkozy qui sera de nouveau débattu au G20 en novembre. En tout état de cause, aussi amoureux des livres qu'il soit, Frédéric Mitterrand ne voit pas la numérisation comme la fin du livre, pas plus que la télévision n'a été la fin du cinéma.

Une chose est claire aussi, c'est que Frédéric Mitterrand n'est pas enclin à se répandre en diatribes sur l'"impérialisme américain" ou en rodomontades franco-françaises. Dieu merci, il est trop cultivé pour cela (et aime depuis trop longtemps les classiques des studios américains!). Il nous a aussi épargné
la dette éternelle des Etats-Unis vis-à-vis de Lafayette et a préféré rappeler la profondeur des liens culturels et esthétiques entre les deux pays, par la voix d'Ernest Hemingway (Paris est une fête) ou du premier Américain élu à l'Académie française, Julien Green, qui écrivait en francais, tout en admettant
le "malentendu incessant" sur lui, "passant aux yeux des Américains pour un Français et aux yeux des Français, pour un Américain". En quelques mots Frédéric Mitterrand a donné à son audience l'envie de relire (ou peut-être de lire), Terre Lointaine. S'il est vrai qu'on peut regretter que les éditeurs américains ne traduisent pas autant de livres français (ou européens, d'ailleurs) qu'on pourrait le souhaiter, j'ai trouvé particulièrement bienvenu que Mitterrand, parlant à Stanford, reconnaisse ce que nos têtes pensantes doivent à cette université, et cite les cas de René Girard, Michel Serres et Jean-Pierre Dupuy.

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