Pologne : Rien ne vaut la menace d'une bonne guerre pour gagner les élections !<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Pologne : Rien ne vaut la menace d'une bonne guerre pour gagner les élections !
©

Crise de l'euro

Rostowski, le ministre polonais du budget, a évoqué mercredi le risque d'une "guerre" en Europe si la crise de l'euro devait conduire à l'éclatement de l'UE. "Si la zone euro se fissure, l'UE ne sera sans doute pas en mesure de survivre avec toutes les conséquences dramatiques que l'on peut imaginer", a-t-il déclaré devant le Parlement européen à Strasbourg. Rassurez-vous, la guerre n'est pas pour demain ! La seule guerre se jouera dans les urnes car la campagne législative vient de commencer en Pologne...

Eryk  Mistewicz

Eryk Mistewicz

Eryk Mistewicz est polonais francophone, consultant politique et conseiller en communication institutionnelle et politique en Europe de l’Est.

Voir la bio »

"La grande réalisation de l'Europe, c'est la paix politique, mais elle n'est pas éternelle. Si on ne prend pas les bonnes décisions, l'Histoire peut se retourner contre nous dans le mauvais sens", a conclu Jan Vincent-Rostowski. Le message est bien passé et a été très commenté en Europe – chaque pays a ainsi pu rappeler à quel point il était solidaire, etc.  Mais c’est aussi – et surtout - une déclaration très bien reçue et très bien comprise pour les téléspectateurs en Pologne : il faudra se mobiliser pour le 9 octobre 2011 et voter contre “le mauvais sens”. Il faudra mobiliser la population, et surtout l’électorat de Plateforme Civique, parti au pouvoir (avec le Premier ministre Donald Tusk). Il faudra se mobiliser contre les ennemis de Plateforme Civique.

La stratégie électorale de la Plateforme Civique est fondée sur “le mauvais sens” et “le management des ennemis” - un moyen pas compliqué pour mobiliser ses électeurs. Mais, l’idée de « management par des ennemis" n’est pas neuve. L’ennemi principale de la Plateforme Civique en Pologne c’est Droit et Justice, dirigé par Jaroslaw Kaczyński.

Mais voilà la question : la crise de la zone Euro va-t-elle affaiblir les leaders d’aujourd’hui ? De mon point de vue : non. Elle ne va pas affaiblir leurs partis non plus. Elle ne va pas provoquer une série de démissions dans les gouvernements européens. Au contraire : elle va les renforcer. Voici pourquoi.

Les mécanismes du marketing politique sont sans pitié. Le peuple veut un leader, un homme à qui il peut faire confiance. Comme Tusk, Rostowski, Sarkozy. Un homme à qui il demandera des comptes – mais seulement après la crise. Les partis de l’opposition qui voudraient profiter de la crise pour s’emparer du pouvoir ne parviendront à rien. Le marketing politique se sert des émotions et de la psychologie humaine. Il dit qu’un "Européen de base" ne veut pas de révolution quand les temps sont incertains. Il ne veut pas de changement de gouvernement, pas d’expérimentation. Ce qu’il veut, c’est un LEADER.

Je ne suis pas étonné par une étude récente d’IPSOS qui montre que la cote de popularité de Sarkozy monte de 3 points et atteint 37% de satisfaits. Les gens ont besoin d’un leader, particulièrement en temps de crise. Je prends connaissance de ce sondage en observant la situation en Pologne. Leurs partis réciproques (celui de Tusk et celui de Sarkozy) viennent du PPE - le Parti Populaire Européen. Tant UMP que la Plateforme Civique se revendiquent du centre-droit.

Ce qui différencie Sarkozy et Tusk est le fait que Sarkozy doit attendre jusqu’à 2012 pour se faire réélire, tandis que Tusk sera confronté aux élections parlementaires dès le 9 Octobre 2011. Aujourd’hui, je fais un par i: la crise de  la zone Euro ne va pas seulement affaiblir Tusk, mais au contraire, elle va renforcer le Premier ministre.

Premièrement : si ce n’est pas lui, qui d’autre pourrait prendre le pouvoir ? Ces dernières années, il n’y avait qu’un seul parti – la Plateforme Civique de Donald Tusk – qui se disait proche des problèmes économiques du pays. C’est aussi ce parti qui était le berceau des meilleurs économistes. C’est lui qui était soutenu par des experts, des chefs d’entreprise et des banquiers. Il a fallu de longues années d’efforts pour acquérir cette image. S’il y a donc un seul politique capable de faire face à la crise économique, c’est le Premier ministre actuel. Deuxièmement, les partis de l’opposition sont quasi n’existants en matière d’économie. En écoutant les média polonais, on constate assez facilement que tous ceux qui comprennent les mécanismes économiques sont proches de Plateforme Civique. Ni le PiS (Droit et Justice), le parti social-conservateur de Jaroslaw Kaczynski, ni la SLD (Alliance de la Gauche Démocratique) n’ont selon les medias de politiques légitimes dans les problématiques économiques.

Ce qui compte aujourd’hui, c’est de démontrer, via la communication, qu’on garde la maîtrise totale de la situation qui devient de plus en plus compliquée. C’est savoir imposer des décisions radicales, ne serait-ce qu’en matière de communication. C’est à dire faire venir à l’Elysée François Fillon et les ministres en charge du budget « en urgence » ; ou bien interrompre les vacances de Jan Vincent-Rostowski, le ministre des finances polonais, avant son intervention devant le Parlement Européen à Strasbourg.

L’opposition qui attaque Sarkozy et Tusk oublie une chose essentielle : les électeurs perçoivent le pays comme une communauté. Et ceux qui, pendant l’action de sauvetage, empêchent la lutte contre la crise, ne méritent ni leur respect, ni leurs voix d’électeur. Ce qui importe, ce n’est sont pas tant les propositions de Tusk ou de Sarkozy – mais de savoir qui les empêche de les réaliser. Présenter la situation de cette manière fait partie des grands classiques du marketing narratif.

Ce qui compte, dans une stratégie de communication, c’est la précision du message. Cependant, en attaquant la Plateforme Civique, les partis adverses ne font que mobiliser les supporters de celle-là. Dans cette situation, la crise de l’Euro n’affaiblira pas le leader, mais au contraire: elle renforcera le premier ministre et aidera le parti au pouvoir. Elle mobilisera le soutien pour le leader qui défend le portefeuille des électeurs. Voilà, l’idée profonde d’intervention de Jan Vincent-Rostowski a Strasbourg.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !