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Pierre Liscia : « Mais comment expliquer qu’avec 500 millions d’euros engloutis chaque année dans la propreté, Paris soit aussi désespérément sale ? »
Pierre Liscia : « Mais comment expliquer qu’avec 500 millions d’euros engloutis chaque année dans la propreté, Paris soit aussi désespérément sale ? »
©Bertrand GUAY / AFP

#SaccageParis

Anne Hidalgo a répondu ce jeudi sur RTL aux attaques et aux critiques de ces derniers jours sur les réseaux sociaux concernant notamment la saleté de Paris à travers le hashtag #SaccageParis. Anne Hidalgo a évoqué une « campagne de dénigrement » et une « proximité » avec l’extrême-droite. Pierre Liscia, porte-parole du mouvement Libres !, s'interroge sur la gestion de la Mairie de Paris sur la question de la propreté, de la conservation du patrimoine et du budget.

Pierre Liscia

Pierre Liscia

Pierre Liscia est porte-parole du mouvement Libres ! de Valérie Pécresse et auteur de La Honte (Albin Michel).

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Atlantico : Dans une interview à RTL, Anne Hidalgo vous cite nommément comme étant parmi les personnes à l’origine de #SaccageParis, mentionnant aussi une proximité des internautes y participant avec l’extrême droite. Êtes-vous d’une manière ou d’une autre à l’initiative de ce hashtag ?

Pierre Liscia : J’ai été très surpris qu’elle me charge aussi frontalement et personnellement. Ma première réaction a été de me dire qu’elle me considérait comme son premier opposant. On a le sentiment en l’écoutant que je suis le grand organisateur de ses malheurs. Elle a surtout été très méprisante à mon égard et à l’égard de celui de toutes celles et ceux qui se sont retrouvés derrière ce hashtag lancé le 21 mars dernier et qui l’ont fait vivre pendant plusieurs semaines. J’aurais adoré pouvoir être à l’initiative d’une opération de cette envergure mais je n’y suis pour rien. J’ai d’ailleurs découvert son existence quand il était dans les tendances de Twitter. Mon premier tweet sur le sujet date de samedi et c’était pour démentir être l’initiateur de l’opération mais que je trouvais la démarche intéressante et que je la soutenais. C’est très regrettable que le premier réflexe d’Anne Hidalgo est de chercher à éviter d’avoir à répondre sur le fond en agitant l’épouvantail de l’extrême droite. Associer dans une même phrase « Pierre Liscia, proche de Valérie Pécresse » et « extrême droite », ce n’est crédible pour personne sauf dans un esprit étriqué et sectaire. Je ne suis franchement pas d’extrême droite et je n’ai même pas à me justifier sur le sujet, mais c’est trop facile d’accuser les Parisiens qui se plaignent du délabrement de Paris qu’ils sont des suppôts de l’extrême droite. Anne Hidalgo parlait de « Trumpisation du débat politique », pourtant s’il en est bien un qui pendant des années a cherché à diaboliser ses contradicteurs en les accusant d’être de dangereux gauchistes, c’est bien Donald Trump ! Elle utilise exactement les mêmes méthodes pour éviter de rendre des comptes aux Parisiens sur sa mauvaise gestion. La première responsable de ce hashtag, c’est elle. Si les rues de Paris étaient belles et propres, il n’aurait jamais émergé sur les réseaux sociaux. C’est elle et elle seule qui a la compétence exclusive en matière de propreté et d’entretien des rues de Paris et de la préservation du patrimoine.

Le hashtag est #SaccageParis. Est-ce que le terme de saccage n’est pas un peu fort ?

Au contraire, je trouve plutôt ce terme très à propos. Paris, ce sont « les joyaux de la couronne ». C’est une ville magnifique, la plus belle du monde. Depuis quelques années - et je ne parle pas de saleté seulement – il n’y a aucune volonté d’entretien, de préservation et de valorisation de ce joyau. C’est catastrophique. On peut parler du mobilier urbain et des installations à l’esthétique plus que discutable, mais le vrai saccage de Paris est dans tout ce qui fait le charme et la beauté de la capitale au quotidien : les monuments et bâtiments historiques sont laissés à l’abandon et se détériorent chaque jour comme c’est le cas des 96 églises, temples et synagogues de Paris qui y sont pour la plupart inscrits ou classés au titre des monuments historiques ainsi que les 40.000 œuvres d’art qu’ils abritent et sont la propriété exclusive de la Ville de Paris. On peut également citer les fontaines Wallace qui sont hors d’eau, les kiosques à journaux de Gabriel Davioud remplacés par des abris au design impersonnel, les serres chaudes classées du jardin botanique d'Auteuil, construites à la fin du XIXe siècle qui étaient une richesse patrimoniale aussi prestigieuse que les ouvrages métalliques de Gustave Eiffel ou de Victor-Louis Baltard, et qui ont purement et simplement été rasées pour permettre l'extension du stade de Roland-Garros… Tout l’héritage d’Haussmann est saccagé petit à petit. Il n’y a pas d’autres mots. La Ville de Paris a également autorisé la démolition complète de la piscine Molitor, construite en 1921 par Lucien Pollet dans le plus authentique style Art Déco et inscrite aux monuments historiques depuis 1990, pour en faire un complexe hôtelier de luxe. Je ne demande pas de réinventer Paris, mais de le restaurer. La Mairie a tordu le bras au PLU pour des réalisations douteuses – comme pour la démolition des immeubles classés de la Samaritaine – et sous couvert de végétalisation on enlaidit la ville. Paris est une ville dégradée et délabrée. Je demande simplement une ville propre, nous sommes nombreux à le vouloir. Des personnalités médiatiques de gauche ont elles aussi exprimé leur mécontentement, et ça ne fait pas pour autant d’elles de dangereux extrémistes.

Les reproches que vous faites sur l’état de Paris sont-ils tous imputables à Anne Hidalgo et son mandat à la mairie de Paris ?

Je vais avoir la sévérité de dire que oui. C’est imputable à Anne Hidalgo et à sa gestion et surtout à son manque de vision. Je crois qu’elle n’a pas de vision pour Paris. Elle est acculée car son budget ne lui permet plus de rien faire sauf à augmenter les impôts donc elle rogne sur les budgets les plus élémentaires. Celui de la voirie a été sabordé et on a vu, par exemple, l’apparition de nids de poule à Paris. Pour les cyclistes, comme moi, c’est une mise en danger de la vie d’autrui ! La Maire préfère dépenser l’argent du contribuable dans le spectaculaire et le récréatif plutôt que dans la propreté, la voirie et l’entretien du patrimoine qu’elle doit considérer comme des préoccupations réactionnaires et conservatrices. Pourtant, la propreté, ce n’est ni de gauche, ni de droite.

Dans son interview Anne Hidalgo évoque sa volonté de mettre en place la déconcentration des questions de propreté aux maires d’arrondissement, cela va-t-il dans le bon sens selon vous ?

La décentralisation des compétences de propreté aux maires d’arrondissement ça fait très longtemps que je la demande, tout comme une partie de la droite parisienne. Anne Hidalgo a évoqué mon livre, si elle l’avait lu elle aurait vu que la proposition y était formulée. Jusqu’à maintenant, elle s’y était toujours refusée. Pourtant c’est une mesure d’un bon sens implacable. Je suis ravi qu’elle entende enfin raison sur cette question. Mais il faut faire plus. Il y a aujourd’hui quatre directions différentes qui agissent dans le champ de la propreté et du nettoiement des rues. C’est incompréhensible. Il est urgent de les fusionner pour n’en créer qu’une seule, lisible et placée sous la direction d’un unique adjoint. Enfin, dès lors que la Mairie de Paris considère que les Parisiens sont sales et inciviques – ce qui est très méprisant pour les Parisiens – pour mieux se défausser de ses responsabilités, elle doit donc en tirer les conséquences en sanctionnant les comportements déviants. Il n’y a pas besoin de nouvelles lois, ni d’augmenter les impôts pour le faire. Les 5000 agents de la DPSP qui sont placés directement sous son autorité sont assermentés pour cela, mais la Mairie préfère les concentrer sur d’autres missions comme la verbalisation des stationnements gênants ou des étals et terrasses des restaurants et des commerces. C’est un choix politique délibéré. Enfin, il faut aussi considérer le recours au privé. Dans de nombreuses villes de France, les délégations de services publics fonctionnent très bien. Pourquoi pas à Paris ? Là encore, par idéologie, le mot « privé » est devenu un gros mot, mais c’est au détriment des Parisiens. Au total, ce sont 500 millions d’euros qui sont engloutis chaque année dans la propreté de la ville, c’est colossal ! Pourtant Paris est désespérément sale. La question n'est pas de savoir combien la Ville dépense chaque année mais comment elle dépense.

Pierre Liscia est porte-parole du mouvement Libres ! de Valérie Pécresse et auteur de La Honte (Albin Michel).

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