Petit mémo sur l’autodestruction de Marine Le Pen en 2017<!-- --> | Atlantico.fr
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Marine Le Pen et Emmanuel Macron, lors du débat pour le second tour de l'élection présidentielle en 2017.
Marine Le Pen et Emmanuel Macron, lors du débat pour le second tour de l'élection présidentielle en 2017.
©STRINGER / AFP

Bonnes feuilles

Frédéric Micheau publie « Le sacre de l'opinion, Une histoire de la présidentielle et des sondages » aux éditions du Cerf. De Charles de Gaulle à aujourd'hui, en passant par François Mitterrand, Jacques Chirac ou Nicolas Sarkozy : l'Élysée et les sondages, c'est toute l'histoire de la Ve République. Éléments-clés de la dramaturgie électorale, les sondages font et défont les destins. Extrait 2/2.  

Frédéric Micheau

Frédéric Micheau

Directeur général adjoint d'OpinionWay et enseignant à Sciences Po, Frédéric Micheau est spécialiste des études d'opinion. Il est l'auteur, au Cerf, de La Prophétie électorale.

 

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Au soir du premier tour, Emmanuel Macron célèbre sa victoire à La Rotonde, une brasserie prestigieuse située au carrefour Vavin. Alors que les intentions de vote lui sont très favorables, puisqu’elles lui accordent un score de 60% (Ifop) à 64 % (Elabe), le candidat se voit reprocher de fêter son élection par anticipation, au mépris du suffrage universel.

Ces réjouissances sont d’autant plus malvenues que 71% des inscrits sur les listes électorales ne sont pas satisfaits de l’identité des deux finalistes, ce qui laisse redouter une forte abstention. Quinze ans après le 21 avril 2002, l’opposition au Front national n’a plus la même vigueur. Seuls 52% des Français souhaitent que Marine Le Pen soit battue. Une majorité estime que «le FN devrait être considéré comme un parti comme les autres» (54%).

Lors de la première semaine après le premier tour, la candidate frontiste occupe le terrain médiatique. Elle tient notamment une conférence de presse avec Nicolas Dupont-Aignan, qu’elle présente comme son futur Premier ministre. 60 % des Français estiment qu’elle effectue « une bonne campagne d’entre-deux tours» (contre 48 % à propos de son adversaire). Plusieurs instituts la créditent d’un score de 41%.

Contrairement à Jacques Chirac en 2002, Emmanuel Macron a accepté un débat télévisé, que 65% des électeurs ont l’intention de regarder. Marine Le Pen pense prendre l’ascendant sur «l’euromondialiste». Mais le débat tourne pour elle à une opération d’autodestruction en direct. Vindicative et sardonique sur la forme, elle fait preuve sur le fond d’une intense confusion dans les dossiers, notamment en économie. L’ancien locataire de Bercy voit la faille et l’exploite à son profit.

L’attitude de Marine Le Pen est lourde de conséquences. 56% des Français qui ont vu ou entendu parler du débat déclarent que la présidente du FN les « a plutôt inquiétés ». Sa performance a mis en pleine lumière son incapacité à dépasser la fonction protestatrice et ruiné son entreprise de présidentialisation. Sanction immédiate, elle perd en moyenne 2 points dans les intentions de vote. Les derniers chiffres publiés le vendredi précédant le second tour lui attribuent 37% (Ifop) à 38% (OpinionWay).

Le même jour a lieu une ultime opération de déstabilisation : les courriels de la campagne d’Emmanuel Macron sont diffusés illégalement sur Internet et les réseaux sociaux. Ces fuites (#MacronLeaks) révèlent notamment plusieurs études qualitatives confidentielles conduites par Ipsos et par Kantar Sofres.

Cette action subversive est sans conséquence. Le 7 mai 2017, Emmanuel Macron est vainqueur. Un candidat sans parti et n’ayant jamais été élu auparavant devient le plus jeune Président de l’histoire de France, toutes républiques confondues. Mais son résultat (66,1%) est très inférieur à celui de Jacques Chirac en 2002.

Le score de Marine Le Pen (33,9%) a été surévalué par les instituts pour la première fois. La candidate du FN a mal évalué son enjeu, qui consistait à dépasser le seuil symbolique des 40% afin d’être légitime pour prendre la tête de l’opposition.

Alors qu’elle avait chuté après le 21 avril 2002, l’abstention a progressé dans l’entre-deux tours de 2017. Décompté pour la première fois des suffrages nuls, le vote blanc (8,51% des votants) explose. Jamais l’offre électorale de l’élection présidentielle n’avait suscité une telle insatisfaction.

Une fois les résultats des instituts confirmés, Emmanuel Macron traverse avec solennité la cour du Louvre, siège multiséculaire de l’autorité royale, en longeant la grande pyramide, symbole napoléonien. Le nouveau président de la République cherche d’emblée à s’inscrire dans l’histoire de France.

A lire aussi : Campagne électorale de 1995 : comment Jacques Chirac et Edouard Balladur sont devenus des frères ennemis

Extrait du livre de Frédéric Micheau, « Le sacre de l'opinion, Une histoire de la présidentielle et des sondages », publié aux éditions du Cerf

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