Patatras ! Les Pays-Bas réalisent qu’ils se sont complètement plantés sur la mesure de l’inflation. Et probablement la France aussi…<!-- --> | Atlantico.fr
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La ministre néerlandaise des Finances, Sigrid Kaag, lors d'une réunion de l'Eurogroupe au siège de l'UE à Bruxelles, le 16 janvier 2023.
La ministre néerlandaise des Finances, Sigrid Kaag, lors d'une réunion de l'Eurogroupe au siège de l'UE à Bruxelles, le 16 janvier 2023.
©Kenzo TRIBOUILLARD / AFP

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Les Pays-Bas vont modifier leur méthodologie pour mesurer l’inflation et pour mieux refléter les prix de l’énergie, selon l’agence de statistiques CBS.

François Geerolf

François Geerolf

François Geerolf est économiste, professeur à l'Université de Californie (UCLA).

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Atlantico : L'agence de statistiques néerlandaise (CBS) a déclaré en novembre qu'elle examinait un problème lié à la mesure des prix de l'énergie, qui aurait conduit le pays - et peut-être d'autres en Europe - à surestimer l'inflation. Début mars, l'agence a déclaré qu'à partir de la première estimation de l'inflation pour le mois de juin, qui sera publiée le 30 juin, elle commencerait à utiliser les données de transaction des fournisseurs d'énergie pour déterminer les coûts réels pour les consommateurs. Dans le calcul de l’inflation, la France s’est-elle également trompée ?

François Geerolf : Comme les Pays-Bas, la France ne prend pas en compte les offres de marché historiques dans son indice des prix à la consommation (à partir de 2019 pour l’indice des prix du gaz de ville et à partir de 2020 pour l’indice des prix de l’électricité), et vu que les nouveaux contrats sont davantage touchés par l’inflation, ne prendre en compte que ceux-là favoriserait a priori une surestimation de l’inflation dans le contexte inflationniste actuel. Car de nombreux ménages ont en réalité toujours des contrats plus anciens conclus à un prix inférieur. C’est un problème parce qu’au niveau européen, certains pays les prennent en compte, d’autres ne le font pas. Peu d'informations publiques ont fuité à ce sujet, mais il parait très probable que l'Italie soit dans la même situation.

L’agence de statistiques néerlandaise (CBS) a déclaré de manière publique qu'elle pensait prochainement modifier la façon dont elle mesure les prix de l'énergie payés par les consommateurs afin d'améliorer les estimations de l'inflation. C'est heureux car elle est tout de même la cinquième économie de la zone euro, donc son poids n'est pas négligeable dans l'indice des prix. Sur la base de ses estimations actuelles, l'inflation a culminé à 14,5 % en septembre de l'année dernière, alors qu'elle aurait été comprise entre 7,6 et 8,1 % selon la nouvelle méthode. 

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Quelles en sont les conséquences ?

Pour la France, la surestimation de l'inflation liée à ce problème est quantitativement bien moins importante, car la hausse des prix de l’électricité aux Pays-Bas était de 188% en septembre dernier tandis qu’elle n’était qu'environ 11% en France. En revanche, la hausse mesurée des prix de l'électricité en Italie par exemple était également de l'ordre de 200% à l'automne, et là aussi on a des raisons de se demander si ces chiffres sont fiables. 

On a donc potentiellement un gros problème au niveau européen, surtout si l'Italie se trouve dans la même situation, car les chiffres très élevés de l’inflation totale ont participé à justifier par exemple une forte augmentation des taux de la part de la Banque centrale européenne (BCE) alors que l’inflation était beaucoup moins importante que ça. 

De manière peut-être plus importante, les chiffres de l'inflation publiés par Eurostat sont également utilisés pour déterminer les paiements aux investisseurs sur les obligations indexées sur l’inflation. Cela veut dire que la France a payé beaucoup plus cher pour s’endetter que ce qu’elle aurait dû si l'inflation n'était pas surestimée. Si les Pays-Bas (et potentiellement l'Italie) ont mal calculé leur inflation, cela joue sur une partie de notre endettement. Si on suppose que la valeur des OAT indexées sur l'inflation de la zone euro est de l’ordre de 150 milliards d’euros, alors un point d’inflation supplémentaire en zone euro, c’est quand même environ 1.5 milliards supplémentaires sur ces obligations indexées... 

Que faudrait-il faire ?

Idéalement, il faudrait prendre en compte tous les contrats, mais l’INSEE n’a pas forcément toutes les informations qui permettrait de le faire. En effet, avec la déréglementation des marchés de l'énergie, l'information est devenue beaucoup plus lacunaire: beaucoup de contrats se font de gré à gré et non plus aux tarifs réglementés, entre des fournisseurs nombreux et les consommateurs. Il est donc potentiellement difficile pour les instituts statistiques d’obtenir toutes les informations à ce sujet.

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