Otages au Mali : révélations sur la stratégie des autorités françaises<!-- --> | Atlantico.fr
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Aqmi menace de mort six otages français détenus au Mali.
Aqmi menace de mort six otages français détenus au Mali.
©DR

Casse tête malien

Six otages français détenus au Mali par Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) sont menacés de mort dans un message présumé de ce mouvement. Deux ans après leur capture, leur salut pourrait venir du Burkina Faso, qui s'est lui aussi engagé dans des pourparlers avec les ravisseurs.

Gérard de Villiers

Gérard de Villiers

Gérard de Villiers, est un journaliste, écrivain et éditeur français. Il est diplômé de l'IEP Paris et de l'ESJ Paris. Il a été reporter à Rivarol, Paris-Presse, France-Dimanche. Il est célèbre dans le monde entier pour ses romans d'espionnage S.A.S, traduits en plusieurs langues. Son dernier ouvrage, récemment paru, s'intitule Le chemin de Damas[1].


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Six Français sont retenus en otage par Al Qaïda au Maghreb islamique, dont quatre depuis deux ans. Depuis lors, les négociations n’ont pas cessé.Le changement de présidence n’a rien changé, le dossier étant géré directement à l’Elysée par la cellule anti-terroriste. Cette dernière tient évidemment le ministère des Affaires étrangères informé. 

Ce dossier est doublement  traité, car les négociations, du côté du gouvernement français, sont menées par notre ambassadeur au Burkina Faso, le Général Beth, nommé il y a deux ans. En effet, un élément sur place peut faciliter le déroulement des négociations. Depuis 8 mois, le frère du Général Beth a été nommé directeur de cabinet de la DGSE, ce qui peut donc faciliter la communication.

Pourquoi les négociations ont-elles lieu au Burkina Faso ?

Tout simplement parce que le président Blaise Compaoré a d’étroits contacts avec les islamistes. C’est lui, il y a quelques mois, qui a fait libérer une Suissesse qui était restée à Tombouctou

Ces négociations ne sont pas simples. D’abord, de multiples intermédiaires basés à Bamako et au Niger tentent de « polluer » les négociations. En plus, Areva, employeur de quatre des otages, négocie aussi de son côté par un canal différent de celui du gouvernement français. Jusqu'à ces deux dernières semaines, les négociations étaient au point mort. Aqmi avait dispersé les otages en différents lieux, les confiant à un cousin de Abou Zeidd (le kidnappeur) et à un certain Yahia Abou el Ammam.

Depuis le début des négociations, le montant de la rançon réclamée n’a pas changé : 90 millions d’euros pour les six otages. Jusqu'ici, tout le monde était persuadé qu’Aqmi avait mis un prix aussi élevé parce qu’il ne souhaitait pas rendre les otages immédiatement. En effet, ceux-ci représentent un bouclier humain pour Aqmi, qui sait que toute action militaire de la France est freinée par la présence des otages.

Il y a 10 jours, le mouvement a diffusé sur un site Internet des images des otages séparés. Ce message réclamait que la France paie la rançon. C’est une accélération. Il y a deux jours, Aqmi a posté une nouvelle vidéo des otages. Cette fois-ci, les otages sont réunis, la situation a donc évolué (le fait de disposer les otages dans des lieux séparés permet de se protéger d’une action globale de libération). 

Cette vidéo est accompagnée d’un ultimatum assez confus. Aqmi réclame toujours 90 millions, mais cette fois-ci, il menace d’exécuter les otages, car la France aurait le projet d’envahir le nord du Mali. C’est là que la situation se complique. En effet, Abou Zeid, chef d'Aqmi, a quitté la zone montagneuse des Adrar au nord du Mali pour s’installer à Tombouctou, à environ 800 kilomètres de Bamako, où il a pignon sur rue.

A-t-il besoin d’argent pour acheter de nouvelles armes ou craint-il vraiment que la France envahisse le nord Mali ? Si c’est la deuxième hypothèse, Abou Zeid est mal informé. Actuellement, la France est incapable de mener une action militaire pour libérer les otages, pour deux raisons :

  • On ignore la localisation des otages avec précision,
  • Malgré les éléments de la DGSE, nous n’avons pas le matériel militaire nécessaire, notamment pour une action au sol.

Que veut dire cet ultimatum ?

Dans les affaires d’otages, le terme ultimatum recouvre une étape de la négociation. On attire l’attention pour demander une accélération. Aqmi n’a rien à gagner à liquider les otages. Un otage mort ne vaut plus rien. Peut-être le gouvernement veut-il de l’argent ? Dans ce cas, s'il s’adresse au gouvernementfrançais, cela signifie qu’Areva refuse de payer la rançon ou alors, il rappelle à la France qu’il ne faut pas qu’elle mène une action militaire contre eux, sous peine de mettre la vie des otages en danger. 

Sauf si une opération totalement secrète menée à partir du Burkina Faso est en préparation, ce que j’ignore, il s’agit seulement d’un signal rappelant à la France qu’elle n’est pas en position de force.

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