Nos réseaux électriques ne sont pas taillés en l’état pour la transition énergétique et personne ne s’en préoccupe vraiment <!-- --> | Atlantico.fr
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Quand on parle de fermes éoliennes, principalement pour les éoliennes offshore, cela se caractérise par des connexions directes au réseau de transmission d’électricité.
Quand on parle de fermes éoliennes, principalement pour les éoliennes offshore, cela se caractérise par des connexions directes au réseau de transmission d’électricité.
©Scott Eisen / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Enjeu majeur

Les retards de connexion au réseau constituent désormais le "principal obstacle" au déploiement des projets d'énergie renouvelable, non seulement en Europe, mais aussi aux États-Unis et en Australie, entre autres.

Damien Ernst

Damien Ernst

Damien Ernst est professeur titulaire à l'Université de Liège et à Télécom Paris. Il dirige des recherches dédiées aux réseaux électriques intelligents. Il intervient régulièrement dans les médias sur les sujets liés à l'énergie.

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Atlantico : Matthias Taft, directeur général de BayWa RE, qui opère dans plus de 30 pays, affirme que les retards de connexion au réseau constituent désormais le "principal obstacle" au déploiement des projets d'énergie renouvelable, non seulement en Europe, mais aussi aux États-Unis et en Australie, entre autres. Est-ce préoccupant ?

Damien Ernst : C’est très préoccupant. Dans l’article, est cité notamment le problème que lorsqu’on construit un gros parc photovoltaïque et un gros parc éolien, alors la connexion physique au réseau principal peut tarder pour des raisons de délivrance de permis. Mais il est possible aussi que le réseau manque de robustesse en aval. Il ne suffit pas d’avoir une ligne électrique pour connecter ces parcs au réseau principal. Il faut aussi que sur le réseau principal, l’électricité puisse s’écouler vers les consommateurs finaux. Cela conduit à devoir souvent renforcer les réseaux électriques en de nombreux endroits.

Comment se caractérisent ces connexions ?

Quand on parle de fermes éoliennes, principalement pour les éoliennes offshore, cela se caractérise par des connexions directes au réseau de transmission d’électricité. Pour les éoliennes terrestres, ce sont des connexions au niveau du réseau de distribution. Pour les installations photovoltaïques, les plus grosses peuvent se connecter au réseau de transmission mais ce sont maintenant les petites installations domestiques qui posent problème au niveau du réseau basse tension. Elles causent des surtensions significatives et renforcer ces réseaux basse tension est extrêmement coûteux. 

"Je ne connais aucun pays où le réseau n'est pas un obstacle à la transition énergétique", déclare Mark Hutchinson, directeur pour l'Asie du Global Wind Energy Council, l'association commerciale internationale. Les files d'attente augmentent alors que les projets d'énergie propre cherchent à se connecter. A quel point cela va-t-il retarder la transition énergétique ?

Les aspects « réseau électrique » sont l’aspect bloquant de la transition énergétique. Ce n’est pas la vitesse de la construction des fermes photovoltaïques ou des éoliennes qui poseront souci mais bien celle de l'adaptation des réseaux électriques. Si on avait la capacité de créer toutes les connexions électriques nécessaires, la transition énergétique serait grandement accélérée. Les trois problèmes sont : les méga connexions entre pays qui manquent, le renforcement des réseaux de transmission existants au sein des pays et les réseaux de distribution qui sont incapables d'accommoder les dispositifs de capture d'énergie renouvelable et les nouvelles charges électriques. 

Les chiffres de l'Agence internationale de l'énergie montrent qu'au lieu d'augmenter les investissements dans les réseaux à l'échelle mondiale à la suite de l'accord de Paris, ils ont chuté entre 2017 et 2020 et n'ont retrouvé leur niveau de 2016 qu'en 2022, à 330 milliards de dollars. En Europe, les investissements dans les réseaux ont stagné entre 2015 et 2020 à environ 50 milliards de dollars par an, et n'ont repris que légèrement au cours des deux dernières années. Pourquoi les gouvernements ne prennent-ils pas la mesure de la situation ?

Quand il s’agit de renforcer les réseaux de transmission, ce sont souvent les lignes aériennes qui sont évoquées, donc ce ne sont bien évidemment pas des projets populaires. La population est rétive à l’idée de les accueillir et cela prend plusieurs années pour avoir des permis de construire.

Sur l’aspect technologique, avec les méga connexions par les câbles sous-marins, en construire et les entretenir coûte cher et même technologiquement, ce n’est pas encore très bien maîtrisé. Pour ce qui est du financement, la question se pose de savoir qui paye quoi pour ces grandes interconnexions.

Au niveau des réseaux de distribution, plus spécifiquement des réseaux basse tension, ce ne sont pas seulement les dispositifs de capture d'énergie renouvelable qui y posent des problèmes mais aussi les nouvelles charges électriques comme les pompes à chaleur ou les véhicules électriques.

Il faudrait un plan d’investissement ambitieux en matière de distribution d’électricité, de transmission d'électricité et de supra réseaux pour qu'ils soient en adéquation avec les besoins de la transition énergétique. 

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