Mgr Podvin : "Être solidaire des chrétiens du Nigeria, oui. S'en mêler, non"<!-- --> | Atlantico.fr
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Les violences contre les chrétiens se prolongent au Nigéria, sans que la communauté internationale n'intervienne.
Les violences contre les chrétiens se prolongent au Nigéria, sans que la communauté internationale n'intervienne.
©Reuters

Martyrs

Les violences contre les chrétiens se prolongent au Nigéria, sans que la communauté internationale n'intervienne. Les chrétiens de Kano peuvent-ils, en revanche, compter sur le soutien de l'Eglise ? Interview avec le porte parole de la Conférence des évêques de France.

Monseigneur   Podvin

Monseigneur Podvin

Monseigneur Podvin est porte-parole des évêques de France

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Atlantico : Que fait la Conférence des Évêques de France pour soutenir les chrétiens du Nigéria, victimes depuis plusieurs mois de violences et de tueries ? Quelle est votre réaction face à ce drame ?

Monseigneur Poidvin : Nous sommes très attentifs à l'ensemble de la situation en Afrique. La relation entre ce continent et la France est très forte. A la Conférence des Évêques de France, il y a un service, baptisé le Service universel, qui s'occupe de la situation de l'Eglise partout dans le monde. Nous gardons un œil sur le Nigéria, très grand pays fort d'une grande richesse humaine et de traditions.

Nous nous sentons impuissants parce que nous ne voyons pas de levier direct d'action. C'est une vraie douleur de voir comme de nombreux facteurs participent au déchirement interne au Nigéria. Nous sommes convaincus, du fait des informations qui nous viennent de nos réseaux, qu'il y a une vraie sagesse populaire dans ce pays qui souhaite une réelle entente. Les tensions sont attisées par des choses aussi exogènes que les groupes terroristes et certaines véléités culturelles. La tendance nomade de telle religion opposée à la tendance agraire de telle autre peut donner lieu à des conflits d'ordre humain.

Ce n'est pas avec le Nigéria que nous avons les liens les plus privilégiés mais avec d'autres pays d'Afrique. Nous sommes malgré tout particulièrement attentifs à la situation. En France, nous travaillons à une entente interreligieuse et au dialogue. Si on peut faire quelque chose. Mais en même temps, nous restons prudent pour ne pas attiser les violences.

Le Vatican essaie aussi d'user de ses canaux diplomatiques pour soutenir le Nigéria. Pourtant, il faut prendre la sensibilité africaine en compte : être solidaire, oui, s'en méler, non. Il faut ainsi dénoncer le terrorisme mais pas s'ingérer dans la politique interne du pays.

Les religieux nigérians ont-ils des attentes de la part du reste de l'Eglise ?

Je le pense. Plusieurs échanges de lettres le prouve. Le cardinal Vingt-Trois a voulu marqué sa solidarité auprès du président des évèques du Nigéria. La population attend beaucoup de la communauté internationale et pas que des chrétiens. Cela a été vrai en d'autres circonstances pour Haïti. Souvent, hélas, il faut reconnaître que nous ne sommes pas à la hauteur. Ni la communauté internationale, ni nous, les chrétiens d'Occident, n'arrivons à relever ces défis.

Des missionnaires anglophones tentent d'avoir une action directement sur le terrain. Ils usent de leurs relations pour apporter une aide tout en veillant à ne pas aggraver encore plus la situation. La vraie priorité, c'est d'identifier les sources d'armements et de les neutraliser. Le Nigéria est une grande nation mais ne pourra pas s'en sortir seul.

Les croyants, les chrétiens du Nigéria, ne risquent-ils pas de se sentir abandonnés par l'Eglise ?

J'espère que non. C'est une très bonne question mais j'espère que nous n'atteindrons pas une telle désespérance. Je reste optimiste même si je vois défiler les drames dans les dépèches des agences de presse.

Nous craignons surtout qu'un climat de vengeance ne s'instaure. L'Eglise s'oppose à cette idée mais en même temps, difficile de juger de loin les frères chrétiens qui veulent se défendre et risquent de se laisser aller à certains amalgames. Il ne faut pas perdre de vue que la vraie menace, c'est le terrorisme.

En France, les relations entre chrétienté et islam sont très bonnes. Mais partout, certains cherchent à nuire à ces relations et à semer le trouble. Il faut aller aux racines de cette violence.

L'Eglise a-t-elle un rôle a jouer ? 

Aussi difficile soit le dossier nigérian, nous sommes les témoins de modérations par des délégations religieuses. Dans l'histoire des relations internationales, les actions officielles ou officieuses de l' Eglise ont souvent permis de faire avancer les choses. Les moyens que l'Eglise déploie, son influence, ne sont pas négligeables.

Il y a des ONG chrétiennes très actives. Au Nigéria, ce sont plus ces associations que des organisations trop officielles et institutionnelles qui peuvent jouer un rôle.

Propos receuillis par Romain Mielcarek

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