Manuel Valls Premier ministre : un choix loin de faire l'unanimité à gauche, l'UMP émet aussi des doutes, le FN critique déjà<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande a nommé Manuel Valls comme nouveau Premier ministre.
François Hollande a nommé Manuel Valls comme nouveau Premier ministre.
©Reuters

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François Hollande a nommé l'ex-ministre de l'Intérieur à Matignon pour "ouvrir une nouvelle étape" de son quinquennat. Une décision qui ne plaît à tout le monde, y compris dans son propre camp.

L'échec a été si cuisant que François Hollande se devait de réagir. Si dans son esprit le président de la République ne voulait pas se passer de Jean-Marc Ayrault à Matignon, la débâcle des municipales a changé la donne. Le remaniement était nécessaire, le départ de son fidèle lieutenant aussi. Dès lors, qui nommé nouveau Premier ministre ? Toute la semaine dernière et jusqu'à lundi matin, le chef de l'Etat a multiplié les rencontres, écouter les avis des uns et des autres. Finalement, son choix s'est porté sur Manuel Valls. Une décision lourde de sens car l'ancien ministre de l'Intérieur a souvent choqué la gauche à son poste de premier "flic" de France.

Conséquence immédiate de cette désignation : les départs des deux ministres écologistes du gouvernement. En effet, Pascal Canfin (Développement) et Cécile Duflot (Logement) ont prévenu d'emblée qu'ils n'entendaient pas "participer à ce nouveau gouvernement"."Les idées portées par le nouveau Premier ministre depuis plusieurs années, notamment lors de la primaire du Parti socialiste ou comme ministre de l'Intérieur, ne constituent pas la réponse adéquate aux problèmes des Françaises et des Français (...) Avec franchise et lucidité, nous en tirons donc toutes les conséquences et n'entendons pas participer à ce nouveau gouvernement, que nous assurons de notre vigilance la plus haute mais aussi de notre solidarité, chaque fois que le cap choisi sera le bon", écrivent-t-ils dans un communiqué.


C'est peu dire que la nomination de Manuel Valls à Matignon inquiète l'aile gauche de la majorité. Mais pour tenter de la rassurer François Hollande  a annoncé aussi un "pacte de solidarité", qui est le pendant du pacte de stabilité. D'ici 2017, les cotisations sociales des salariés vont baisser. Le président de la République François Hollande a donné trois priorités au nouveau Premier ministre, : l'économie, la justice sociale et le rassemblement. Bref, l'ancien maire d'Evry, âgé de 51 ans, est à la tête d'un gouvernement "de combat". Pas de quoi apaiser Europe Ecologie-Les Verts (EELV) pour autant. Le parti, par le biais de sa secrétaire nationale Emmanuelle Cosse, a indiqué tard dans la soirée "attendre une clarification" de Manuel Valls "sur l'orientation du nouveau gouvernement" avant de décider de lui apporter ou non son soutien.

La patronne des Verts souligne aussi que la décision des deux ministre écologistes, Cécile Duflot et Pascal Canfin, de ne pas participer au futur gouvernement relève de la "cohérence politique". Elle estime aussi que l'allocution télévisée du président François Hollande et les "orientations présentées" montrent "qu'il n'a pas entendu le message des électeurs" lors des municipales. "Le choix de Manuel Valls est assez surprenant, compte tenu de l'analyse que l'on peut faire du scrutin (municipal) et de l'indéniable besoin de gauche qui s'est exprimé à l'occasion de cette élection", a réagi de son côté Emmanuel Maurel, figure de l'aile gauche du parti socialiste.

Car si Manuel Valls a toujours bénéficié d'une forte popularité chez les Français, il est considéré comme peu consensuel au PS en raison de ses prises de positions antérieures et le nombre de ses fidèles dans le parti reste minoritaire. Ainsi, il n'avait recueilli que 5% des voix à la primaire PS pour la présidentielle de 2012, se classant avant-dernier devant Jean-Michel Baylet (PRG). Immigré catalan tenant d'un socialisme français à la Tony Blair, il est en réalité bien plus populaire à droite qu'à gauche.

Autre preuve que le choix de Manuel Valls est mal perçu à la gauche de la gauche, la réaction cinglante de Jean-Luc Mélenchon. Le président du Front de Gauche a estimé lundi soir que François Hollande "n'a rien compris au message qui lui a été adressé". "Il confirme son alliance préférentielle avec le Medef" et "nomme le plus grand commun diviseur possible de la gauche, Manuel Valls". Et d'assurer qu'il s'agit tout bonnement d'un "suicide politique". Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, abonde dans le même sens :  "À part le premier ministre, rien ne change. Une nouvelle fois, François Hollande tourne le dos à la gauche." Selon lui, François Hollande "n'entend que de l'oreille droite".

Du côté des proches du président de la République justement, l'arrivée de Manuel Valls est plutôt bien accueillie. Ainsi le maire de Dijon François Rebsamen, qui ne cache pas ses ambitions ministérielles, loue chez le futur résident de Matignon "un professionnel" qui "fait les choses de manière sérieuse". "Il a beaucoup de qualités, il mettra en œuvre la politique décidée par le président de la République". A l'aile droite, le député de Paris Jean-Marie Le Guen estimait que cela promettait "une nouvelle donne sur l'action, sur le rythme". "Nous allons avoir une nouvelle dynamique", a-t-il insisté.

Car Manuel Valls est un homme à l'ambition assumée, au ton parfois cassant et qui sait faire preuve de fermeté. A l'inverse de Jean-Marc Ayrault, il n'a pas peur de la polémique. Ainsi, au sein du gouvernement, il s'est à plusieurs reprises opposé à la ministre de la Justice Christiane Taubira dont il conteste le projet de réforme pénale, mais aussi à sa collègue écologiste, la ministre du Logement Cécile Duflot. Son énergie au ministère de l'Intérieur et la médiatisation de ses interventions ne sont d'ailleurs pas sans rappeler un prédécesseur de droite devenu président : Nicolas Sarkozy.


Montebourg : "Je soutiens Manuel Valls"by France Inter

Et c'est finalement à droite que Manuel Valls, ardent défenseur de l'ordre républicain, plaît le plus. La preuve, dans un récent sondage, 41% des sympathisants de droite le choisissaient comme Premier ministre parmi les personnalités socialistes, contre seulement 20% des sympathisants de gauche. Pour autant à l'UMP on ne se satisfait pas de sa nomination. Ainsi, le président du parti Jean-François Copé a assuré que "le limogeage" de Jean-Marc Ayrault "ne suffira pas à régler les problèmes" de la France. "Ce n'est pas en changeant les hommes et en gardant la même politique" qu'on règle les problèmes, a-t-il fait valoir.

L'ancien Premier ministre François Fillon a de son côté déclaré sur France 2 : "Je veux souhaiter bonne chance à Manuel Valls parce que je souhaite qu'il réussisse, je ne souhaite pas l'échec de mon pays. J'espère simplement qu'il fera un peu moins de communication et qu'il aura un peu plus de résultats qu'au ministère de l'Intérieur." Il n'y a guère que Patrick Devedjian à se satisfaire de cette désignation. "Après un tel échec, il est normal, souhaitable que le Premier ministre démissionne. [Le choix de Manuel Valls à Matignon], c'est plutôt un coup de barre à droite et d'ailleurs, il avait même été envisagé qu'il puisse être un ministre d'ouverture avec Nicolas Sarkozy" a-t-il fait savoir.



Ce remaniement "ne changera rien car (...) c'est un changement de politique que les Français attendent et pas tant un mercato gouvernemental", a réagi pour sa part Marine Le Pen, la présidente du Front national. Et celle-ci de donner son avis sur la personnalité de Manuel Valls : "Cet homme est dangereux, il n'a aucun respect pour les libertés publiques et les libertés individuelles des Français, il y a tout à craindre de sa nomination à un poste aussi important que Premier ministre". Ce mardi, sur France 2, la présidente du Fn en a même remis une couche. "François Hollande est un ultralibéral honteux tandis que M. Valls est un ultralibéral décomplexé. C'est d'ailleurs un européiste convaincu. Le signal est très clair: la cure d'austérité va s'aggraver, elle va être évidemment massive. (...) C'est l'UMPS personnifié" a-t-elle indiqué.

Nommer Manuel Valls ? Un choix "suicidaire" a enfin jugé le président d'honneur du Front national Jean-Marie Le Pen. Invité du Grand Journal, il a fait part de son sens de la formule pour qualifier cette nomination à Matignon : "Je crois que c'est un clin d’œil à la droite. Notre président a une réaction un peu de fille de joie par rapport à son souteneur. Elle prend un coup de pied aux fesses, se retourne vers lui, et lui fait un clin d’œil amoureux".  

Pour rappel, un sondage BVA pour Le Parisien/Aujourd'hui en France, près des trois quarts (74%) des Français ne souhaitaient pas que Jean-Marc Ayrault reste Premier ministre. Et c'est Manuel Valls qui arrivait en tête des personnalités préférées des Français pour lui succéder (31%), loin devant Martine Aubry (17%) et Laurent Fabius (16%). Dès lors, la cérémonie de passation de pouvoirs entre les deux hommes aura lieu ce mardi. Première mission, et non des moindres, pour le nouveau Premier ministre : former un nouveau gouvernement.

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