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Mais qui est Margrethe Vestager, la commissaire européenne qui fait trembler Google, Starbucks, Apple et Amazon ?
©Reuters

Dame de fer

Commissaire européenne à la concurrence depuis novembre 2014, Margrethe Vestager fait beaucoup parler d'elle ces derniers temps. Et pour cause, cette Danoise au parcours politique brillant ne compte pas se laisser faire face aux multinationales qui veulent dicter leurs règles.

Claus Kragh

Claus Kragh

Journaliste au journal danois Mandag Morgen.

Claus Kragh est spécialisé sur les questions européennes. Il intervient régulièrement sur RFI.

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Atlantico : Margrethe Vestager fait beaucoup parler d'elle : après avoir lancé un acte d'accusation contre des firmes comme Apple, Amazon ou encore Gazprom, la Commissaire européenne à la concurrence s'en est récemment pris à Google pour abus de position dominante. Quel est le parcours de ce responsable politique, souvent qualifiée de nouvelle héroïne de Bruxelles ?

Claus Kragh : Ce que l'on peut déjà dire, c'est qu'elle a été ministre très jeune. Elle est fille de pasteurs, a fait des études en science politique et en économie, et était déjà très douée quand elle était étudiante. On a remarqué dès le début que c'était quelqu'un de très fort. Elle a été ministre entre 1998 et 2001, à 30 ans. Elle est issue d'un petit parti membre de la coalition ALDE au Parlement européen (Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe), un parti social-libéral qui se situe au centre sur l'échiquier politique danois. Cette formation fait très souvent partie des gouvernements au Danemark : un petit parti avec peu de parlementaires mais beaucoup d'influence sur ce qu'il se passe dans le pays.

Elle était dans le Gouvernement de Helle Thorning-Schmidt de 2011 à 2015. C'est une très forte personnalité, qui connaît très bien tous ses dossiers dans les détails. Elle a des facultés intellectuelles et des capacités de travail qui dépassent largement ses concurrents dans la politique danoise. Certaines personnes disent qu'elle peut être arrogante, ce qui est souvent le cas avec des personnalités si fortes que cela.

Elle est souvent décrite dans les presses européenne et américaine comme une femme qui fait trembler les multinationales telles que Google, Amazon ou Starbucks. Pourquoi dit-on cela ? Quel a été son parcours depuis qu'elle est à la Commission ?

Ce dossier est lié aux Luxleaks avec le Luxembourg et ses arrangements avec certaines multinationales. Parce que Jean-Claude Juncker ne pouvait pas gérer lui-même ce dossier-là, Margrethe Vestager en a hérité. Sur ce coup-là, elle a eu un rôle semblable à celui du président de la Commission. Elle était très au courant des pouvoirs inhérents au poste de Commissaire à la concurrence. On voit aujourd'hui qu'elle est en train d'élargir ces pouvoirs en s'appropriant le dossier relatif aux impôts et aux taxes, même si ce n'est pas normalement dans ses prérogatives.

Elle dit toujours ne pas avoir de problèmes particuliers avec les multinationales spécifiquement américaines et s'intéresser à toutes les multinationales. Elle attache beaucoup d'importance à ce qu'il y ait une concurrence libre et loyale entre les grosses sociétés, et ce pour le bien des consommateurs.

Vous faisiez référence à ses parents qui étaient tous les deux pasteurs luthériens. En quoi cela a-t-il pu jouer sur sa capacité à tenir bon face aux nombreux lobbies qui existent à la Commission européenne et à ces grandes multinationales très influentes ?

Il y a en effet beaucoup de pasteurs luthériens au Danemark, puisque l’Église d’État est luthérienne. De nombreux prêtres sont très libéraux. Ce genre de prêtres ne sont pas vraiment austères, au contraire : ce sont des gens certes bien enracinés dans le milieu ecclésiastique, mais qui sont très ouverts et libéraux, à l'image de l'Eglise danoise. Margrethe Vestager n'est pas une personne religieuse, je ne sais même pas si elle est mariée avec le père de ses trois filles. C'est quelqu'un de féministe, très moderne, qui a toujours bien fait ses devoirs à l'école... Cela a dû être dur pour ceux qui étaient dans la même classe qu'elle ! Elle est très douée dans tout ce qu'elle fait.

L'Union européenne traverse une crise politique actuellement. Ce genre de personnalités faisant parler d'elles et semblant porter un projet politique qui vise à défendre les citoyens européens peuvent-elles susciter une plus forte adhésion au projet européen ?

Il est certain que Margrethe Vestager est très respectée au Danemark, mais elle est aussi vue comme un peu élitiste. Le Parti populaire danois, notamment, ne l'apprécie pas : élitiste, douée, libérale sur les questions de société telles que l'accueil des réfugiés... Si l'on compare son action avec celle de son prédécesseur espagnol qui s'occupait avant elle du dossier de la concurrence, Joaquin Almunia, on constate qu'elle est beaucoup plus forte. Elle a décidé dès le début de faire bouger les lignes sur tous les dossiers (Apple, Google, Gazprom...), alors qu'Almunia avait un peu fait traîner tous ces dossiers, à la recherche d'arrangements qui n'incluaient pas de décisions fortes. Ce n'est pas le style de Vestager. Elle veut prendre des décisions, elle veut agir pour montrer que l'Union européenne ne se laisse pas faire.

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