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Macron a sans doute tout pour réussir... sauf les contre-pouvoirs
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Atlantico Business

Les trois planètes alignées peuvent donner raison à Emmanuel Macron. Quel que soient le résultat final des législatives et l’ampleur de sa majorité, Emmanuel Macron se retrouve avec un alignement qui peut lui donner raison.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les fans du nouveau président de la République lui trouvent toutes les qualités possibles. Il est jeune, brillant, moderne, ouvert sur le monde et le progrès technologique. Certains politologues considèrent qu’il répond à une demande qui traduit des changements profonds de l’opinion publique. C’est possible, sauf que la société française n’a pas évolué dans de telles proportions du jour au lendemain. La preuve, l’exceptionnel taux d’abstention de plus de 50%.

L’opinion a pu faire une overdose des pratiques politiques classiques et des conservatismes trop solidement enracinés.

En réalité, la société française était paniquée par les effets de la crise économique et surtout par l’incapacité des dirigeants à trouver des solutions, alors que la plupart de nos voisins les avaient découvertes, mises en place et que le monde entier était sorti de la dépression.

Emmanuel Macron est arrivé sur le marché politique avec une offre un peu nouvelle dans un packaging rénové, que les autres, à droite comme à gauche, n’ont jamais eu l’idée ou l’aplomb de présenter.

A partir de là, l’immense chance d’Emmanuel Macron aura été de se retrouver dans un alignement de planètes hyper favorable, son talent sera de ne rien faire qui puisse gaspiller ou hypothéquer cette chance. Jusqu'à maintenant, il n’a pas fait beaucoup d’erreurs. Celles qu’il a pu commettre ont glissé sur lui comme si de rien n’était.

Première planète, la conjoncture mondiale. L’OCDE l’a encore rappelé la semaine dernière, tout va bien mieux dans les pays émergents, le prix du pétrole, les taux d’intérêt et le calme relatif sur les monnaies ont fait repartir des machines économiques dopées au digital. Du coup, tout va mieux aussi dans les pays développés, y compris aux USA et en Europe. Par malice, plus que par nécessité, l’OCDE a cru bon de rappeler que la seule puissance économique qui avait du mal à redémarrer, c’était l’économie française, pour cause de compétitivité insuffisante. Histoire de rappeler une fois de plus, la nécessité de faire des réformes.

Ceci étant, la Banque de France a précisé que si la France restait en retard sur l’Allemagne, la situation française avait tendance à s’améliorer. Les prévisions de croissance pour la France sont de 1,4 % en 2017, puis  1,6 % en 2018 et 2019, en raison principalement de « l'embellie de l'environnement international ». Ce « regain de croissance mondiale » devrait donc stimuler l'activité, en favorisant notre commerce extérieur par un « rebond des parts de marché à l'exportation », soulignait l'institution monétaire dans ses projections macroéconomiques semestrielles.

Très logiquement, on va donc profiter de la conjoncture mondiale. Pas autant qu’on le pourrait, mais ça peut encore s’améliorer.

2e planète, l’Europe. Jusqu'à une époque très récente, l’Europe a été vécue comme un boulet pour l’économie française, un bouc émissaire, la cause de tous nos ennuis avec une discipline de fer qui nous était imposée. D’où les pressions protectionnistes et souverainistes. Depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron, une série d’évènements a redonné de la force et de la crédibilité au projet de l’Union européenne. Outre le discours et les convictions affichées par Macron, la campagne faite par Marine Le Pen qui a eu du succès jusqu’à l’accident industriel du grand débat où elle a échoué, la campagne anti-européenne a mis en lumière les difficultés que nous aurions eu à vivre en dehors de l’Europe. L’extrême gauche et l’extrême droite réunies ont paradoxalement renforcé la confiance dans l’euro. Les difficultés rencontrées par la Grande Bretagne, embourbée dans son Brexit, ont elles aussi redonné des couleurs à l’Europe. D’autant que si Brexit il y a, l’Union européenne continentale récupèrera des activités que la Grande Bretagne va devoir abandonner. Ajoutons à cela une prise de conscience en Allemagne qu‘il va falloir modifier le modèle économique pour le rendre plus solidaire et éviter la montée des populismes partout en Europe.

La politique américaine, de son côté, n’offre pas d’autre choix aux Européens que de se regrouper pour faire face à l’offensive protectionniste de Donald Trump. Le projet du président américain est de tout faire pour fragiliser l’Union européenne, mais il va réussir à ressouder les partenaires de l'Union autour d’une ambition commune qui leur avait échappé un peu. Celle de se regrouper pour affronter la concurrence mondiale dans une économie désormais globalisée.

3e planète alignée sur l’écran radar du changement : les réformes de structure. Emmanuel Macron, après 25 ans de résistance française à la modernité dans ses structures et ses fondements. 25 années de résistance sur l’idée que la France restait une grande nation, compte tenu de son histoire et de sa culture. Mais 25 ans d’échecs et d’affaiblissement économique. La nouvelle gouvernance n’a pas eu de mal à convaincre l’opinion que la clef de l’indépendance et du progrès se situait plus dans la puissance économique et financière que dans la qualité des défilés militaires du 14 juillet. Cet environnement et cette pédagogie des réformes qui a été rabâchée et refoulée pendant tant d’années peuvent commencer à porter leurs fruits. D’où la « facilité » apparente avec laquelle le gouvernement a ouvert des chantiers de réforme que même la droite la plus libérale n’avait jamais osé envisager. Il y a dans la réforme du travail actuellement discutée des points qui étaient déjà dans le projet Fillon et que la droite traditionnelle s’est empressée de retirer pendant cette campagne des législatives en estimant qu’ils étaient trop durs.

Cela dit, tous les experts le savent. Il ne manque à la France qu’à faire sauter quelques verrous qui bloquent l’initiative pour permettre à l’activité de se redresser. Encore fallait-il le faire.

Beaucoup de ces verrous étaient trop durs pour la gauche sociale libérale classique, trop durs pour la droite conservatrice.La plupart de ces verrous ne sont plus bloquants pour la droite moderne alliée à la gauche moderne qui s’installe à l’Assemblée. Cette majorité peut faire sauter tout ce qui freinait l’activité. Elle en aura les moyens.

Il faut dire que les conditions de l’élection présidentielle et le résultat des législatives, avec une vague qui donnera sans doute une majorité absolue, apportent une légitimité extrêmement forte au gouvernement. Pour l’instant, ni les syndicats, ni les insoumis de Jean-LucMélenchon ne se risqueront à essayer de coaguler dans la rue une opposition qui a été complètement laminée par les urnes. Mais l’absence d’une opposition structurée peut donner de la force à des contre pouvoirs en dehors du champ politique.

Politiquement, c’est une force évidemment qui dégage la visibilité sur la conjoncture et sur les réformes. Mais l’absence de contre pouvoirs est évidemment source de faiblesse ou de fragilité.

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