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Quelques secondes après la nomination officielle de Rachida Dati au poste de ministre de la Culture, le président des LR Eric Ciotti a annoncé qu'elle était exclue du parti.
Quelques secondes après la nomination officielle de Rachida Dati au poste de ministre de la Culture, le président des LR Eric Ciotti a annoncé qu'elle était exclue du parti.
©Ludovic MARIN / AFP

Une seule Rachida vous manque et tout est dépeuplé

Pour certains, la nomination de Rachida Dati, membre éminent des Républicains, au ministère de la Culture, est un coup porté aux LR.

Jean Petaux

Jean Petaux

Jean Petaux, docteur habilité à diriger des recherches en science politique, a enseigné et a été pendant 31 ans membre de l’équipe de direction de Sciences Po Bordeaux, jusqu’au 1er janvier 2022, établissement dont il est lui-même diplômé (1978).

Auteur d’une quinzaine d’ouvrages, son dernier livre, en librairie le 9 septembre 2022, est intitulé : « L’Appel du 18 juin 1940. Usages politiques d’un mythe ». Il est publié aux éditions Le Bord de l’Eau dans la collection « Territoires du politique » qu’il dirige.

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Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet est essayiste et auteur de nombreux ouvrages historiques, dont Histoire des présidents de la République Perrin 2013, et  André Tardieu, l'Incompris, Perrin 2019. 

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Atlantico : Rachida Dati vient d’être nommée au ministère de la Culture. Ayant accepté ce maroquin, l’ancienne garde des Sceaux rejoint de facto la majorité présidentielle et, pour beaucoup, c’est un assaut qui pourrait faire office de coup de grâce aux Républicains. Qu’en est-il en vérité ? Quel est le coût que le parti de la droite républicaine aura à payer après ce départ ?

Maxime Tandonnet : Ce ralliement est au premier degré un très mauvais coup pour la droite LR sur le plan symbolique. Il est littéralement stupéfiant de constater que la plupart des personnalités emblématiques de la période UMP/LR ou Chirac/Sarkozy se sont ralliées au macronisme soit en rejoignant carrément ses rangs soit en lui apportant un soutien : Le Maire, Woerth, Bachelot, Sarkozy, Copé, Raffarin, Juppé, etc.  L’entrée au gouvernement de Mme Dati, qui s’était imposée surtout depuis 2012 comme une figure de proue de la droite classique, représente une étape supplémentaire dans ce grand basculement. A cela s’ajoute le modération ou la collaboration avec des autres composantes de la droite LR, non ralliées officiellement, sur plusieurs grands dossiers emblématiques du macronisme comme la réforme des retraites ou la loi immigration. A deux reprises, le parti s’est arrangé pour sauver l’équipe au pouvoir de la catastrophe. Alors, le message global, reçu dans l’opinion, est dramatique : la droite LR dans son ensemble est désormais associée à l’image du macronisme. Elle a renoncé à être une opposition et une alternative possible. Elle a délaissé à d’autres (notamment le RN) le rôle d’opposition principale et d’alternance éventuelle. C’est bien cela que ressent le pays dans ses profondeurs, même si les leaders de LR refusent de le voir et de l’admettre.

Jean Petaux : Que le parti Les Républicains soit bien mal en point, nul n’en doute. Qu’il connaisse, comme le Parti socialiste, l’autre grand parti de gouvernement de la Ve république, une crise majeure confirmée (amplifiée ?) par leurs scores respectifs au premier tour de la dernière élection présidentielle de 2022, c’est une évidence. Concevoir pour autant que le « coup » de Rachida Dati serait fatal à la formation de la droite républicaine, c’est faire trop honneur à Rachida Dati et trop injure à ce parti politique. Pour paraphraser Staline qui s’y connaissait en matière de cynisme et de réalisme, (il parlait du Vatican) : « Rachida Dati ? Combien de divisions ? ». Être maire d’un des arrondissements parmi les plus bourgeois et conservateurs de Paris (le VIIe) n’est pas synonyme d’une force de frappe politique et populaire. Débiter des sornettes à longueur de plateaux télévisés (Dati et Royal sont les deux « reines » de ce genre de tréteaux), cultiver la petite musique du « clash » et de la « petite phrase » qui fait le bonheur des réseaux sociaux ne doit pas être confondu avec un appareil politique fait de cadres, de relais partisans. Madame Dati ne représente rien, c’est un électron libre affranchi de toute forme de loyauté à qui que ce soit, hormis à un seul : Nicolas Sarkozy, son créateur, son mentor et, toujours, son tuteur. Au risque de la décevoir, je pense que son départ des rangs de la droite républicaine ne pèse rien. Preuve qu’un coup peut avoir un faible coût pour celui qui en est la cible (LR). Et que son auteure, à l’inverse, risque de le payer plutôt cher.

Rachida Dati ressortira-t-elle renforcée de ce transfert ? Quel a été le sort des transfuges politiques par le passé ?

Jean Petaux : André Labarrère, député-maire de Pau, socialiste, ancien ministre de François Mitterrand, premier homme politique français à assumer publiquement son homosexualité, élu et réélu dans la « ville des Parachutistes » (catégorie professionnelle assez peu réputée pour être favorable à la gauche et encore moins « gay friendly »), avait coutume de dire des dauphins politiques qu’ils étaient voués, comme les sympathiques mammifères marins, à venir s’échouer et mourir sur les plages.

On peut transposer cet aphorisme aux transfuges politiques. Le transfuge est littéralement « celui qui fuit, celui qui fugue, en traversant une frontière réelle ou symbolique, en changeant de camp ». Le terme désigne en premier le militaire qui déserte et « passe à l’ennemi ». L’espion, qui est une sorte de militaire en civil, un « combattant de l’ombre », peut aussi être un transfuge qui emporte dans sa fuite des secrets stratégiques (la liste des agents infiltrés, les plans d’une arme secrète ou d’une future invasion…). Une fois qu’il a franchi la frontière, le transfuge ne peut revenir en arrière : son pays d’origine le considérant comme un traitre, il encourt une condamnation des plus sévères, très souvent d’ailleurs le prix de sa vie ou de celle de ses proches.  Le nouvel Etat qui l’accueille, le reçoit, qui « le traite », n’en fait pas pour autant un héros. On l’a vu avec les fameux espions britanniques passés à l’Est  dans les années 60 autour de Philby, Burgess, MacLean et les autres : ils ont fini leur vie à Moscou, sans grand relief, condamnés à une forte exclusion sociale. Leur traitrise les exposait à la vengeance des « services occidentaux », leur adhésion à la cause communiste, eux qui avaient tant goûtés aux « délices capitalistes »,  ne pouvait qu’être suspect pour leurs « nouveaux maîtres ». 

Voilà exactement le sort qui sera celui de Rachida Dati. En 2007, à l’occasion d’une campagne présidentielle qui l’a vue prendre ses premiers rayons de lumière médiatiques, Rachida Dati a croisé la trajectoire d’un « transfuge » ayant connu son « quart d’heure de notoriété politique warholienne » : Eric Besson. Secrétaire national du PS, cet homme politique va démissionner avec fracas de ses fonctions dans l’équipe de campagne présidentielle de la candidate socialiste Ségolène Royal pour annoncer son soutien à Nicolas Sarkozy au soir du premier tour.

Le nouveau président élu en mai 2007 aime beaucoup les transfuges : ceux qui partent d’ailleurs pour venir le rejoindre. Il les aiment autant qu’il n’apprécie pas les immigrés qui font pourtant le même trajet…. Mais c’est un autre sujet ! Besson va être récompensé pour son « transfert » (le terme est adéquat ici car Sarkozy et lui ont une passion commune : le football) et gagner, au passage, une « titularisation » comme secrétaire d’Etat d’abord après la présidentielle de 2007 puis comme ministre, au total pendant cinq années. Il faut croire que son parcours a été apprécié par sa collègue Rachida Dati qui n’a pas été insensible non plus au fait qu’il est né à Marrakech au Maroc, pays natal du père de la nouvelle Garde des Sceaux. C’est Rachida Dati qui va marier, en tant que maire du VIIe arrondissement de Paris, en 2010, son collègue ministre Besson avec l’arrière petite-fille du père de l’indépendance tunisienne, Habib Bourghiba. Tout comme son maitre politique, Rachida Dati aime les transfuges, c’est sans doute son côté « transfuge de classe ». Il n’y a donc rien de surprenant à ce qu’elle ait franchi le rubicon politique séparant son parti d’un autre…

Elle gagnerait à méditer sur le destin d’un Besson, sur celui d’un Kouchner, sur celui d’une Fadela Amara, tous ministres venus de la gauche et qu’elle a fréquentés au moins une fois par semaine en les côtoyant autour de la grande table du conseil des ministres, dans le salon Murat de l’Elysée : ils ont disparu des écrans radars à la fin du mandat de leur « protecteur ». Et on pourrait multiplier les exemples, de la droite vers la gauche, de la gauche vers la droite, et même… du centre droit vers le centre gauche et inversement. Contrairement à ce que l’on croit, rares sont celles et ceux qui parviennent à relancer leur carrière politique après un tel « coup ». Edouard Philippe est peut-être une exception, encore que son départ de LR a eu lieu lors du grand tremblement de terre qui a agité et bouleversé le petit théâtre politique avec l’élection de l’OPNI (Objet Politique Non Identifié) Macron en mai 2017. Toutes choses égales par ailleurs, ce « moment politique » a été l’équivalent d’une de ces guerres dont on sait (on l’a vu lors de la défaite française de 1940) qu’elles sont propices aux transfuges et aux recompositions d’importance. On a rappelé récemment, à l’occasion de sa disparition, le parcours politique de Jacques Delors. D’aucuns y verront un contre-exemple de ma proposition : parti de la CFTC, un des acteurs de la création de la CFDT, l’homme a été le conseiller social d’un premier ministre de droite, le gaulliste historique Jacques Chaban-Delmas, de 1969 à 1972 avant de rejoindre les rangs du PS en 1974, après la campagne présidentielle, et d’être ministre de l’Economie et des Finances en 1981 puis président de la Commission européenne pendant dix ans, de 1985 à 1995. Autrement dit : un cursus honorum impeccable, couronné de succès malgré un passage de la droite à la gauche. Mais peut-on parler de transfuge à son sujet ? Non ! Il n’était pas un homme politique élu avant une étiquette de droite quand il a rejoint le PS en 1974, ni même et encore moins adhérent à l’UDR. Il n’a d’ailleurs jamais vraiment prisé les élections avant 1981. Après moult refus d’obstacles de sa part (à Créteil, à Roanne, en Corrèze), il va tout juste accepter d’être présent sur la liste PS lors de la première élection au suffrage universel du Parlement européen, en 1979… Delors n’a pas été un transfuge, il a simplement évolué. Ce qui est tout à fait logique et possible en politique.

Rachida Dati, pour sa part, en rejoignant le gouvernement Attal et la majorité présidentielle, a bel et fort bien d’ailleurs, trahi son camp. Elle l’a fait dans la confidentialité qui sied aux accords secrets et avec la soudaineté qui va aux opérations clandestines. Comme elle a bien réussi son coup, elle va, probablement, connaître le sort que l’histoire réserve aux vrais traitres : l’isolement prélude à l’oubli… Et comme elle n’a strictement aucune compétence ni expertise dans le domaine ministériel qui est désormais le sien, elle va y ajouter le ridicule. Lequel est d’ailleurs déjà en train de poindre dans un milieu culturel qui n’aime rien moins tant que les vacheries ironiques, les critiques virulentes et les petits meurtres entre « amis ».

Maxime Tandonnet : Sa nomination au ministère de la culture paraît à contre-emploi de sa personnalité telle qu’elle était perçue par l’opinion : une femme de terrain énergique libre dans sa parole et proche du peuple. On ne l’imagine pas forcément dans un rôle qui consiste à s’occuper des artistes et la parole cadenassée par la solidarité gouvernementale. Peut-être en espère-t-elle un tremplin pour la mairie de Paris où elle réunirait les voix de Renaissance et de LR ? Cependant, la concurrence sur ce créneau sera rude par exemple avec le Premier ministre qui n’a pas caché ses ambitions parisiennes. Et surtout, en se fondant dans la macronie, elle perd son image d’icône populaire qui aurait pu, par-delà les logiques partisanes, entraîner une dynamique en sa faveur. Elle se normalise alors que la ville de Paris aime traditionnellement les rebelles… Le sort des transfuges n’est jamais très enviable. Sur le fond, le reproche d’avoir tourné casaque est toujours latent dans l’image que l’opinion se fait d’eux. On pense à M. Kouchner rejoignant Nicolas Sarkozy en 2007. Ou bien à l’inverse, Mme Bachelot à la culture : on ne peut pas dire que son image en ait été grandie. Edouard Philippe est un contre-exemple, certes populaire alors que passé de LR à Premier ministre de M. Macron en 2017, mis il n’était pas vraiment connu ni identifié – jamais ministre – dans les rangs de la droite auparavant. Mme Dati est certes une prise de guerre de la macronie qui montre une fois de plus le génie  politicien du président Macron. Mais le sensationnel n’a qu’un temps, souvent bref. Une fois passé, le risque pour elle est celui de la banalisation et même de la marginalisation.  

S’il est évident que LR apparaît aujourd’hui fragilisé, peut-on vraiment dire que c’est ce genre de manœuvres qui ont abîmé le parti, à la base ? Ne dispose-t-il pas, par ailleurs, des outils pour se reconstruire ?

Maxime Tandonnet : Le problème de LR dépasse celui des transfuges. Le parti bénéficie sans doute d’un potentiel considérable. La droite classique est la formation la plus proche, au fond de la sensibilité de la grande majorité des Français. Elle est l’héritière naturelle des républicains nationaux que sont Gambetta, Waldeck-Rousseau, Clemenceau, Poincaré, Tardieu, de Gaulle et Pompidou. Elle répond à l’attente des Français qui aujourd’hui ne se reconnaissent ni dans le narcissisme illusionniste ni dans les aventures démagogiques et extrémistes. Mais la droite classique n’est pas à la hauteur de son destin. Non seulement les multiples trahisons dont elle est victime mais ses complaisances avec le macronisme et sa logique de mépris anti-peuple – notamment son soutien à l’impopulaire, absurde et inutile réforme des retraites – l’ont gravement discréditée. Alors, il lui faudrait changer dans les profondeurs, symboliquement changer de nom – pour se dissocier d’un passé abîmé par la succession des félonies – changer les hommes et les femmes, changer totalement de ligne politique. Il lui faut absolument rompre radicalement avec le macronisme, entrer dans une logique d’opposition ferme, sans la moindre concession et de projet d’alternative en s’adressant au pays dans les profondeurs, un pays qui souffre de l’arrogance et de l’entre-soi de ses élites dirigeantes et se réfugie aujourd’hui dans l’abstention. La voie est étroite, ni macronisme, ni aventure extrémiste et démagogique… Mais le renouveau vient toujours, dans l’histoire, d’une infime minorité qui a se tenir debout, envers et contre tout, dans la tempête.

Jean Petaux : Il est manifeste qu’il est préférable d’être une formation politique qui attire des militants et des cadres ou des électeurs et des personnalités politiques d’expérience, plutôt qu’un parti qui perd tous ses adhérents, de la salle des machines à la cabine du capitaine. J’ai déjà dit combien les deux grands partis de gouvernement ont explosé en 2017. Les Républicains ne sont pas entrés en crise seulement par la défaite de François Fillon en 2017 faisant suite à celle du président sortant Nicolas Sarkozy en 2012. Le PS n’a pas atteint le score microscopique de la « meilleure ennemie » de Rachida Dati à la mairie de Paris, Anne Hidalgo, par hasard en 2022. Ce résultat a fait suite, en 2017, à la campagne médiocre d’un idéologue incompétent, apparatchik d’arrière-salle de congrès du MJS, Benoit Hamon, vague créature de Martine Aubry et d’un avatar de Berny Sanders, doté d’un charisme voisin de celui d’une huitre, et qui a réussi à effondrer le score du parti refondé par François Mitterrand en 1971.

Alors il est bien évident, pour Les Républicains, que ce ne sont pas des départs comme le dernier en date, celui de Rachida Dati, qui ont coulé le navire. Le mal est bien plus profond et multicausal : crise de la représentativité politique, crise de l’engagement militant, crise du projet, crise de la formation idéologique, crise de la sélection des cadres, crise du processus de désignation des candidats à tous les étages de la mécanique électorale, crise de l’incarnation, etc. On pourrait multiplier les « crises »… On comprend bien ici que les petites aventures de « Rachida fait de la politique » pèsent bien peu en regard de ces difficultés et de ces soucis profonds. Même s’il est juste de dire que cela n’aide pas non plus à se reconstruire. L’avenir dira justement si Les Républicains vont retrouver une dynamique et des ressources propres à favoriser leur retour à leur statut de « parti de gouvernement »… Ce sera de toute manière et désormais sans Rachida Dati. Et ce n’est pas là le principal handicap de LR. Au contraire.

En laissant dire de la loi immigration qu’elle est une victoire idéologique pour le RN, les dirigeants de LR font-ils montre de la bonne initiative ? N’est-ce pas là, au contraire, un argumentaire qu’il faut rejeter ?

Maxime Tandonnet : Les politiques n’ont pas perçu, pas senti l’effet délétère de cette prétendue réforme de l'immigration. Elle s’est imposée comme un incroyable symbole de la tambouille actuelle, votée par la majorité présidentielle, la droite LR et le RN de Mme le Pen. Elle est un parfait emblème de l’entre-soi politicien. Elle permet à l’Elysée et à la majorité présidentielle de sauver la face, à LR d’en revendiquer la paternité et au RN d’y voir un triomphe de ses idées et un atout dans sa course à la dédiabolisation ou respectabilité… Tout le monde est content. Même l’Elysée se tire de ses contradictions par une pirouette, en se réjouissant du vote de la loi tout en appelant le Conseil constitutionnel à la censurer. Le fond du problème est que cette loi, sérieusement analysée point par point, ne sert strictement à rien. Elle est dans la pure logique des gesticulations et de l’esbroufe inutiles. Elle est chargée de symboles de fermeté (à l’image de la « déchéance de la nationalité » pour les meurtriers de policiers) certes populaires selon les sondages, mais ne comporte pas une once  - pas une once - de contenu utile pour la maîtrise de l’immigration ou l’intégration. Là encore, la droite LR a perdu l’occasion de sanctionner le macronisme, de parler un discours de vérité et de tendre une main franche au pays. 

Jean Petaux : Ce sont plus les opposants de gauche qui ont développé cet argumentaire que les cadres dirigeants de LR. Et on le comprend. Cette rhétorique de « la victoire de l’extrême-droite », développée par des adversaires du RN, à bien y réfléchir, est proprement surréaliste tellement elle politiquement stupide et tactiquement contre-intuitive. Où a-t-on déjà vu, où que ce soit d’ailleurs, en politique, en sport, dans le commerce ou l’industrie, à l’école primaire sur la cour de récréation, une équipe répéter comme un refrain : « Ils ont gagné, ils ont gagné !... On a perdu, on a perdu !... ». En règle générale, quand on est à peu près doué de raison, on ne crédite pas ses adversaires, ses concurrents, voire ses ennemis, de la victoire. Surtout quand elle se confond avec sa propre défaite. Même si c’est la réalité on ne le dit pas tout simplement. Il faut avoir une singulière pratique du tir au fusil à tirer dans les coins pour se mettre ainsi une balle dans le pied. En l’occurrence d’ailleurs la loi immigration n’est, en rien, une victoire du RN. Raison de plus pour ne pas en faire des tonnes et « accorder le point à la formation » de Marine Le Pen. Les Républicains ont plutôt été moins malhabiles que d’autres formations politiques en l’occurrence. La palme du n’importe quoi est revenue, c’est désormais une coutume, aux « Insoumis canal historique ». Comprendre ici les membres de la secte adeptes du gourou Mélenchon et pas celles et ceux qui ont su prendre leur distance par rapport « au grand homme »…

S’il fallait tirer une leçon de toute cette séquence politique qui a débuté avec le débat sur la loi « immigration » pour s’achever avec les premières heures du gouvernement Attal ce serait peut-être, modestement, celle-ci : « C’est quand ils cessent d’être eux-mêmes, qu’ils changent de doctrine, qu’ils changent de couloir, que les politiques, individus ou groupes, se perdent eux-mêmes. Ils raccourcissent ainsi forcément et fortement la distance qui sépare la Roche Tarpéienne du Capitole. Qui, comme chacun le sait, est déjà bien courte. Leur chute ne sera pas immédiate. Juste retardée. »

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