Les risques à ne pas suivre son ambition : la résignation, une vie étriquée, le harcèlement<!-- --> | Atlantico.fr
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Etre ambitieux, c'est tout un art
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Bonnes feuilles

Notre société se méfie autant de ceux qui ont de l’ambition que de ceux qui paraissent en manquer. Paradoxe ? Apparemment. C’est que le mot ambition se limite souvent à la seule notion de réussite sociale. Pourtant, l’ambition ne la résume pas, même si elle ne se l’interdit pas. En réalité, l’ambivalence du terme traduit surtout nos mouvements psychiques inconscients, une crainte profonde d’aller vers son ambition, comme l’entendent Sophie Cadalen et Bernadette Costa-Prades dans leur livre "La belle ambition" aux éditons JC Lattès. (1/2)

Le risque de la résignation

Le premier stade du renoncement se traduit souvent par une attitude résignée. Au lieu de vivre notre vie, nous la subissons, avec le sentiment de n’avoir aucune prise sur elle. La personne abonnée à la résignation est souvent mal dans son travail, soupire qu’elle n’a pas le choix, même si le secteur dans lequel elle travaille embauche. Sous couvert d’être intègre, loyal, le résigné accepte souvent l’inacceptable, quitte à ruminer dans son coin. Ah, il n’est pas comme tous ses collègues qui partent à dix-huit heures tapantes, en lui laissant les dossiers à finir ! Ah, il ne sait pas faire des sourires à la hiérarchie, lui, pour obtenir de l’avancement ! Qui reconnaît ses efforts ? Personne ! Même s’il ne s’imagine pas acteur de sa vie, il n’est pas forcément passif, dépensant même souvent une énergie folle à démontrer aux autres qu’il est irréprochable, sans aucun écho ni valorisation, aucune reconnaissance ne pouvant, de toute façon, compenser ses efforts démesurés, le poids de ses frustrations. De quoi effectivement baisser les bras… Mais en adoptant cette attitude de bon élève soumis cherchant à plaire au maître, ce sont ses propres désirs qu’il méconnaît, ce qui est bien plus ennuyeux.

Le risque du harcèlement

La résignation est la porte ouverte au harcèlement. En effet, ces personnalités sont la proie de ceux qui jouissent d’avoir les autres sous leur coupe. Il suffira d’un regard noir, d’une remarque acerbe, pour que l’employé s’effondre, tente de se racheter, dans un jeu pervers sans fin, comme le décrit si bien Delphine de Vigan dans son roman Les Heures souterraines (Lattès). De temps en temps, lassés d’être malmenés, certains ont un sursaut, se rebiffent, en ont assez de passer à côté de ce qui est important pour eux, mais le soufflet retombe très vite, car au fond d’eux, ils s’interrogent : « Qui suis-je pour oser prétendre dire non à ce qui me déplaît ? » Cette position de passivité justifie toutes les litanies de résignation que nous avons déjà longuement évoquées dans le chapitre sur l’ambition frileuse. Quel dommage, car s’ils acceptaient d’entendre leur petite voix, ils constateraient très vite un changement d’attitude à leur égard. S’ils pouvaient retrouver l’audace de s’écouter, même modestement, de faire comme ils le sentent, au risque de ne pas être aimés par tous, leur situation serait bien plus confortable. Sauf qu’il faudrait qu’ils s’affirment, au risque de s’exposer peut-être à des commentaires désobligeants, à des rejets, ou tout simplement à la surprise de leur interlocuteur. Mais parallèlement, ils y retrouveraient une dignité, la force de se faire respecter, infiniment plus précieuses que cette approbation qu’ils recherchent en vain, malgré leur dos courbé et leur compromission. Hélas, la plupart vont préférer rester « dans le rang » – ce fameux rang imaginaire – sans se rendre compte du mal qu’ils se font à marcher à contre-courant d’eux, de leurs désirs, de leur ambition.

Le risque d'une vie étriquée

Notre époque n’a que le mot « désir » à la bouche, mais il n’est pas sûr qu’elle l’encourage autant qu’elle le clame. Revenons encore sur cette vogue du zen, où une supposée sagesse consisterait à nous contenter de ce que nous avons, sans en vouloir plus, au risque de nous exposer à la frustration. En fait, nous deviendrons enfin sage quand nous n’aurons plus envie de rien ! Une telle interprétation erronée du zen nous encourage à nous contenter de petits plaisirs, à ne viser que ceux qui sont à portée de main. Une exhortation qui, au passage, ne nous empêche nullement d’envier ou d’être agacés par ceux qui osent en vouloir toujours plus et font ce qu’ils veulent avec humour et légèreté. Observons encore le succès phénoménal du livre Indignez-vous de Stéphane Hessel : avons-nous vraiment besoin de l’autorisation d’un vieux monsieur de quatre-vingt-quatorze ans, qui était charmant au demeurant, pour nous révolter de certaines évidences ? Le plus suspect est le consensus autour de sa lecture qui, avouons-le, ne nous engage guère. En nous indignant à tout propos, et sur tous les sujets, n’oublions-nous pas au passage que nous contribuons, par nos actes et nos attitudes, à ce monde qui nous révolte tant ? Mais de cette responsabilité-là, qui nous engagerait autrement, nous ne voulons rien savoir…

Extraits de "La belle ambition" de Sophie Cadalen, Bernadette Costa-Prades pubié aux Editions JC Lattès. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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