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Le Père Noël est vraiment une ordure : quand les cadeaux nous abîment les yeux, les oreilles, les muscles ou mettent en jeu notre santé psychique...
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Cadeaux empoisonnés

Nos cadeaux de Noël à la pointe de la technologie peuvent parfois être très dangereux pour notre santé.

Catherine Jegat,Sylvie Royant Parola,Jean-Michel Klein,Dan Véléa et Philippe Kahane

Catherine Jegat,Sylvie Royant Parola,Jean-Michel Klein,Dan Véléa et Philippe Kahane

Catherine Jegat est responsable des opérations et de la communication à l'Association nationale pour l'amélioration de la vue (ASNAV).

Sylvie Royant Parola est psychiatre, et responsable du centre d’exploration du sommeil à la clinique médicale du Château de Garches.

Jean-Michel Klein est Oto-rhino-laryngologue (ORL) et secrétaire-général du Syndicat national des médecins spécialisés en O.R.L. 

Dan Véléa est psychiatre addictologue à Paris. Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur les addictions, dont Toxicomanie et conduites addictives (Heures-de-France). Avec Michel Hautefeuille, il a co-écrit Les addictions à Internet (Payot).

Philippe Kahane est médecin neurologue, et responsable du laboratoire de physiopathologie de l'épilepsie au centre hospitalier de Grenoble.

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Nouveaux smartphones, baladeurs mp3, nouvel ordinateur ou encore derniers jeux vidéos, voilà tous les cadeaux que vous pourrez retrouver cette année sous votre sapin. Toutefois, aussi alléchants qu'ils puissent paraître, il semblerait qu'ils n'épargnent pas notre santé. Entre problème d'audition, de vue ou encore risque d'épilepsie, des professionnels de la santé exposent les risques de nos futurs nouveaux joujoux.

Les problèmes de vue causés par les écrans en tout genre (smartphones, télévision, ordinateur)

Catherine Jegat :Plusieurs études ont démontré que les personnes qui passaient beaucoup de temps devant les écrans étaient plus exposés aux problèmes de myopie. Cela est principalement lié aux usages que nous faisons des écrans car les problèmes de vue se développent car nous regardons les écrans de trop près. La vision de loin est très peu sollicitée, ce qui permet une extension de la myopisation.

Les smartphones et les ordinateurs sont principalement concernés. L'ASNAV a réalisé un baromètre sur le temps passé par l'ensemble de la population sur les écrans en général et cela a montré que l'ensemble des Français passait 27 minutes et les jeunes de 16 à 24 ans 96 minutes. Ce phénomène peut donc provoquer une fatigue croissante de l’œil qui mène à des problèmes de vue.


Pour pallier ses problèmes, il est nécessaire d'encourager les jeunes et autres consommateurs d'écrans de passer du temps à l'extérieur afin de développer sa vision de loin car elle permet de reposer sa vue. En outre, pour éviter les conséquences néfastes du regard statique, il est préférable de volontairement cligner des yeux pour humidifier l’œil et de faire des pauses régulières, particulièrement pour les porteurs de lentilles qui sont déjà fragilisés.

Les troubles du sommeil liés à la consommation d'écrans (smartphones, ordinateurs, tablettes)

Sylvie Royant Parola : On peut distinguer plusieurs effets et conséquences selon les types d'écrans.

Pour ce qui est du téléphone : Quand l'utilisation du portable est importante, c'est-à-dire environ deux heures dans la soirée, il existe un retentissement sur le sommeil, plus particulièrement un fractionnement de celui-ci et d'une diminution du sommeil profond. En outre, de plus en plus de jeunes utilisent leur portable pour envoyer des SMS le soir et tard dans la nuit. Le fait d'avoir le téléphone à portée de main s'accompagne la plupart du temps d'une diminution du temps de sommeil. En effet, il existe un effet direct du GSM sur la structure du sommeil mais aussi un effet comportemental qui est lié au fait de communiquer tard avec ses amis et de retarder l'heure du coucher.

Concernant la télévision : les émissions tardives peuvent bien sur contribuer à retarder les heures de sommeil chez les plus jeunes. En revanche, les adolescents sont de moins en moins consommateurs de télévision car ils regardent les émissions en replay sur les ordinateurs.

Concernant les ordinateurs et des tablettes : Nous sommes très proches des écrans d'ordinateurs et des tablettes, environ entre 40 et 50 centimètres de l'écran. Ils délivrent une lumière assez forte qui crée un retard assez net de l'endormissement. En effet, certains photorécepteurs rétiniens vont être stimulés et les rythmes de sommeil vont par conséquent être décalés.

Concernant les jeux vidéos : les effets sont liés aux aspects addictifs de certains jeux, notamment ceux qui développent des aspects interactifs. Les jeux en ligne sont notamment en cause et, étant de plus en plus mondialisés, les rythmes des jeunes sont souvent décalés et certains n'hésitent pas à couper leur sommeil pour retrouver leurs partenaires de jeu situés à l'autre bout du monde. Dès lors que l'on fait partie d'un réseau, l'offre de stimulation qui détourne du sommeil est d'autant plus importante.

Les troubles auditifs liés à l'utilisation des casques et écouteurs mp3

Jean-Michel Klein :Il y a deux façons d'endommager durablement l'ouïe d'une personne : tout d'abord le traumatisme sonore pur lié à un bruit extrêmement fort qui peut avoir un impact sur l'oreille interne irréversible. Puis, il existe également des traumatismes à répétition qui sont moins violents mais plus répétés. L'oreille est un système de décodage du son qui comporte des cellules au niveau de l'oreille interne qui ont des cils. Quand des a coups de pression auditives se font ressentir, les cils s'écrasent et cassent. Le décodage du son devient donc de plus en plus difficile et une baisse auditive se fera sentir.

« Qui veut voyager loin ménage sa monture ». L'excès de bruit peut donc être dangereux. Particulièrement, pour ce qui est des mp3, la compression du son est particulièrement néfaste. En effet, pour faire entrer une musique dans un mp3, le son doit être comprimé pour tenir sur un volume plus faible. L'oreille humaine est sensible à la variation des sons. Toutefois, la compression fait perdre en variation du son. Par conséquent, l'écoute va donc se faire à un volume plus fort pour trouver une sensation plus forte. Peuvent donc en résulter des traumatismes sonores.

En outre, le son est une pression. Quand on envoie 100 décibels dans l'espace d'une pièce, les conséquences seront évidemment moindre pour le tympan par rapport à l'envoi des mêmes décibels directement dans l'oreille. Pour pallier cela, certains casques sont vendus avec des évents pour qu'une partie du son s'évacue.

Les risques d'addictions liés à l'excès de jeux vidéos et à la consommation d'écrans

Dan Véléa: L'addiction peut naître à cause de plusieurs facteurs :la fragilité psychique de l'individu, le besoin de reconnaissance, les failles narcissiques (absence d'amour, sentiment d'abandon ressenti par l'enfant).Chez certains patients, le jeu et les écrans représentent une manière de fuir la réalité, le vide existentiel et surtout le sentiment d'ennui. L'échappatoire dans le virtuel permet à l'individu de ressentir un sentiment de protection et d'assurance, cette fuite amenant aussi du plaisir, accompagnée d'un faux sentiment de maîtrise et de contrôle du temps, et des autres adversaires. Beaucoup décrivent une décharge d'adrénaline - dans la confrontation aux autres, mais surtout à soi. Dans le cas de jeux d'argent, les mises et les gains passent au second plan, il s'agit dans ces cas de lutter contre l'ennui, mais aussi de faire durer l'attente et le stress de ces moments.

D'autres catégories de joueurs décrivent une manière efficace - au moins au début - de lutter contre ce même stress. Un aspect beaucoup plus dramatique - surtout à notre époque moderne, est la banalisation de la violence dans les jeux, mais aussi films. Cette dernière s'accompagne d'une perte de repères et des limites, avec le risque de passage à l'acte sur fond de déshumanisation des victimes. Elles apparaissent comme des personnages de jeu, dépourvues de notion de mal, et de souffrance. Certains joueurs, fort heureusement pas tous, s'identifient et incorporent leur avatar de jeu, ramenant cette virtualité dans la réalité et dans la relation avec les autres.

L'addiction a des conséquences que l'on recense à long terme sur la vie personnelle (abandon des conjoints dans d n ombreux cas), professionnelle (perte d'emploi, désinvestissement), mais aussi sociale : le jouer tombe dans le piège de la fausse socialisation dans les réseaux de jeux. Dans le cas des jeux d’argent, on assiste souvent à des conséquences anxio-dépressives, sur fond d'endettement massif, ainsi qu'à la perte de réseaux social et familial.

Et l'épilepsie dans tout ça ?

Philippe Kahane :Le risque d'épilepsie est très, très faible. Il faut savoir qu'il y a certaines formes d'épilepsie très rares, dites photosensibles.Dans ce cas, les crises peuvent être déclenchées par des stimuli visuels répétés. Ils sont présentés à des fréquences de l'ordre de 20 ou 25 cycles par seconde. A une époque, regarder la TV pouvait déclencher ces crises, les écrans étaient à balayage. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas car les écrans sont digitaux, il n'y a donc plus ce problème. Cependant, dans des situations très particulières où les jeux vidéos ont des systèmes de balayage d'écran, et des petites lignes qui peuvent créer des stimuli visuels, on peut déclencher des crises. Il faut comprendre que ces dernières ne se déclenchent que chez les malades épileptiques. En aucun cas quelqu'un qui n'est pas sujet ne peut avoir une crise en jouant aux jeux vidéos.

Ces crises photosensibles représentent 1% de toutes les formes d'épilepsie, même un peu moins, soit 5000 patients-risque sur 500 000. Cela ne justifie pas l'interdiction de jouer aux jeux vidéos aux patients épileptiques, pour lesquels on n'a pas établi la preuve que les stimulations lumineuses pouvaient provoquer des crises.

Au plan neurologique, il n'y a pas de maladie susceptible d'être aggravée, ou favorisée par les jeux vidéos, mis à part le fait que jouer peut être fatigant. Dans ce cas-là, on retrouve les cas où certaines maladies susceptibles d'empirer à cause de la fatigue, le stress, les privations de sommeil, mais ce n'est pas propre aux jeux vidéos ou aux écrans.

La mise en garde systématique sur les jeux n'a donc pas lieu d'être. Il y a 15 ans, elles avaient aussi pour but d'éviter l'invasion des consoles de jeux japonaises sur le marché européen. Ca n'a pas toujours été utilisé à des fins purement médicales.

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