Le coup de coeur de la semaine : "Les Frères Sisters", aussi fort que les Américains<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Culture
Le coup de coeur de la semaine : "Les Frères Sisters", aussi fort que les Américains
©Reuters

Atlanti-Culture

Bravo à Jacques Audiard: son western est une chevauchée fantastique, spectaculaire, sauvage, mais aussi un film profondément intimiste, chargé de sens et humaniste.

Dominique Poncet pour Culture-Tops

Dominique Poncet pour Culture-Tops

Dominique Poncet est chroniqueuse pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
Voir la bio »

CINEMA

« Les Frères Sisters » 
de Jacques Audiard. 
Avec Joaquin Phoenix, John C. Reilly, Jake Gyllenhaal et Riz Ahmed.

RECOMMANDATION

EN PRIORITE

THEME

Dans l’Oregon de 1851,  Charlie et Eli  Sisters (Joaquin Phoenix et John C. Reilly) sont  deux frères qui ont pas mal de sang sur les mains. Ce sont deux tueurs à gages qui vendent sans état d’âme leurs services  au plus offrant. Quand le film commence, ces deux là, commandités par un mystérieux  Commodore, et qui ont toujours « travaillé » en tandem, cavalent après un type qu’ils doivent d’abord faire parler avant de le tuer. L’homme en  question (Riz Ahmed)  est un chimiste qui aurait mis au point une formule  magique pour détecter l’or…Un quatrième  personnage va bientôt entrer en jeu : un chasseur de primes (Jake Gyllenhaal), chargé par le « patron » de l’expédition   de surveiller la cible, mais sans l’approcher…

Dans des paysages grandioses  (qu’on suppose appartenir à l’Ouest américain, mais qui sont en fait espagnols), ce qui débute comme un western  va petit à petit s‘affranchir des codes du genre  et virer au récit initiatique et sentimental.

A travers le portrait de deux frères qui partagèrent une enfance tourmentée mais  que désormais tout oppose, exceptée la nature de leur boulot, Jacques  Audiard va s’interroger sur la relation fraternelle et le poids de l’héritage familial. Cela,  sans abandonner  un seul instant le récit de sa mortelle randonnée.

POINTS FORTS

-Tiré d’un roman de Patrick De Witt, le scénario est d’une densité et d’une habileté époustouflantes, alternant - sans jamais que le suspense en pâtisse- scènes spectaculaires et séquences intimistes ; séquences durant lesquelles les personnages, et surtout les deux frères, s’interrogent et se dévoilent, faisant affleurer sinon leur humanisme, au moins leur désarroi.

 -Entièrement américain, le casting est cinq étoiles, avec en tête quatre pointures, qui occupent l’écran comme peu : Joaquin Phoenix, John C. Reilly, Jake Gyllenhaal et Riz Ahmed… Si la réussite du film ne doit pas tout  à ces quatre là, en tous cas, elle leur doit beaucoup.

- Placé sous la responsabilité d’un des meilleurs chefs opérateurs du moment, l’ultra-doué  Benoit Debie, le filmage est, formellement, magnifique.

-Quant à la musique, qui donne à « entendre » la singularité de ce Frères Sisters,  elle mériterait de rapporter à son  auteur, Alexandre Desplat, un troisième Oscar et/ou un quatrième César.

POINTS FAIBLES

 Je n'en ai pas trouvé. Les nostalgiques des films de cow-boys à l’ancienne trouveront  peut-être  que par moments, Les  Frères Sisters manque un peu de rythme. Ce à quoi on répliquera que les ralentis ou les pauses dans son action, participent, justement à sa singularité, le teintent de nostalgie sentimentaliste et  de fraternité, malgré la cruauté de son sujet, la chasse à mort d’un homme.

EN DEUX MOTS

En s’engageant dans un genre mythique du cinéma hollywoodien, le français  Jacques Audiard avait fait un sacré pari. On constate avec un vrai plaisir qu’il le gagne haut la main !  Si Les Frères Sisters parcourt, à grand galop, les « terres » très codifiées du western, il réussit à prendre la tangente et à nous entrainer dans les  jardins secrets de son  réalisateur, cela, sans que , pas un instant, les mots trahison  ou détournement ne viennent à l’esprit.  On est impressionné par cette chevauchée fantastique, à la fois spectaculaire et sauvage, qui, pourtant, ose l’humanisme, la poésie et même, la métaphysique.

Les Frères Sisters a commencé à rafler la mise, en décrochant le Lion d’argent du meilleur réalisateur à Venise et en recueillant tous les dithyrambes au Festival de Toronto. Le film sort en France ce mercredi 19 septembre, puis le 21 sur les écrans américains. Une excellente date pour décrocher une nomination aux Golden Globes, dont on sait qu’ils sont l’anti-chambre des Oscars.  

UN EXTRAIT

« Aujourd’hui un western, c’est quoi ? Pour simplifier, on peut distinguer deux tendances. D’un côté un versant néo-classique- Appaloosa, Open Range- des films qui ont pour principe de réactiver une mythologie, avec une certaine révérence pour les archétypes…Et de l’autre, l’approche d’un Tarantino : ironie, ultra-violence, application des codes de violence du cinéma contemporain sur le western. Nous sommes allés vers une troisième voie, il me semble : le western apaisé » (Jacques Audiard, cinéaste).

LE REALISATEUR

Fils de Michel Audiard, Jacques Audiard, né le 30 avril 1952 à Paris, commence d’abord par des études de lettres. Mais il est vite rattrapé par le démon du cinéma.  Il devient d’abord l’assistant de Roman Polanski sur  le Locataire, puis de  Patrice Chéreau sur Judith Therpauvre. Après avoir fait un détour par le montage, il se lance, au début des années 80, dans l’écriture de scénarios, dont, entre autres, ceux de Mortelle Randonnée (co-écrit avec son père) et Le Professionnel ( co-écrit avec Georges Lautner).En 1994 , il  s’essaie  à la réalisation avec Regarde les hommes tomber, dont il est l’auteur. Dans le Landerneau cinématographique, ce road movie entre deux truands minables fait l’effet d’une bombe. Le film est sélectionné pour Cannes et remporte trois Césars. Deux ans plus tard,  le cinéaste sort Un Héros très discret, qui va rafler, toujours à Cannes, le  prix du scénario.  Cinq ans plus tard, son  Sur mes lèvres, avec Emmanuelle Devos et Jean Pierre Cassel se verra encore gratifier de trois Césars. Cinq de moins que le film suivant du réalisateur,  De battre mon cœur s’est arrêté .

Aujourd’hui, Jacques Audiard a, en tout, à son actif, huit longs métrages, dont, pour en nommer encore deux, Un Prophète, Grand Prix du Jury à Cannes et Dheepan, qui, en 2015, obtint la Palme d’Or.

A ce jour il est la personnalité la plus récompensée aux Césars.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !