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Le chômage français au-dessus de 10% jusqu’en 2017
©Reuters

L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

Après Moody’s, c’est l’agence Standard & Poor’s qui s’apprête à sermonner sévèrement la gestion de l’économie française. Au mieux, l’agence maintiendra la France sous surveillance négative et cela malgré le pacte de responsabilité proposé par François Hollande et qui aurait dû changer la donne.Selon l’agence S&P, le taux de chômage en France restera supérieur à 10% de la population active au moins, pendant les deux prochaines années et probablement jusqu’ à la fin du quinquennat.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Dans sa note parue en début de semaine et adressée à ses abonnés, S&P explique que la situation de l’emploi est tellement dégradée qu’elle détruit l’équilibre socio-politique et rend très fragile un soutien de l’opinion à des réformes de structures qui  seraient nécessaires mais impossible à appliquer, d’où l’affaiblissement de perspectives de croissance et d’activité". En clair, le pays est malade, il pourrait évidemment se soigner mais il n’a plus ni l’envie, ni la force de supporter un traitement de choc. Donc il baisse les bras ou alors il risque de se révolter. C’est exactement la thèse de Nicolas Baverez, dans La France qui tombe,édité chez Tempus. 

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Ça veut dire que les mesures annoncées par François hollande correspondent à ce qu'il faudrait faire, mais la majorité politique  ne les acceptera pas, parce que l’opinion n’a plus confiance dans le médecin qui essaie désormais de soigner le pays.

Cette analyse rejoint celle qui est faite par la plupart des experts de bonne foi. Les mesures ne seront pas suffisantes pour enrayer un mal structurel, dans lequel nous nous sommes laissés piéger, à savoir la désindustrialisation progressive du pays et le chômage endémique. Pour quelles raisons ? Trop souvent pour des raisons idéologiques (la pensée  keynésienne qui domine encore aujourd’hui les élites françaises n’aime pas l’entreprise), mais aussi pour des raisons corporatistes qui nous font préférer la rente (des revenus de l’épargne ou rentes d’état liées aux redistributions et allocations de toutes sortes, aux revenus de production). Ce qui est logique, n’aimant pas l’entreprise, on n’ira pas chercher spontanément des revenus du travail de production. On lui préférera  l’État-providence. Si l’État-providence était coté en bourse, il serait champion du Cac40.

Ce phénomène-là, alimente une tendance lourde en Europe et particulièrement en France. Il est fondé sur trois erreurs d’analyse.

La première est de considérer le plein emploi comme l’objectif premier et prioritaire des politiques au pouvoir, des syndicats et de beaucoup  d’économistes nourris à la social-démocratie et au clientélisme.  A partir de ce raisonnement, on sermonne les chefs d’entreprise, on les culpabilise, on bride le progrès technique et les délocalisations, on passe aux 35 heures pour soi-disant partager le travail, on crée beaucoup d’emplois aidés et publics etc., etc. Rien n’est plus faux. L’emploi est une conséquence de l’activité. L’objectif premier d’une gouvernance devrait être de créer les conditions pour  optimiser la croissance. C’est la croissance des richesses produites qui a besoin d’emplois et non l’inverse.

La deuxième erreur est de penser que l’activité a pour principal moteur la consommation. A partir de cette idée toute faite, on réclame une « relance de la consommation », on réclame une politique de soutien , un redistribution de revenus , on facilite le crédit pour solvabiliser la demande… Et au final on ne relance que le déficit budgétaire, le déficit extérieur par les importations, on fait la fortune des hypermarchés,  et quand on est très malin comme les américains , on invente même les subprimes en essayant de s’arranger pour ne pas en porter les risques.  Bravo ! On voit le résultat.

La consommation  n’est pas le moteur premier de la croissance. Ça se saurait. Le moteur, c’est la consommation future, celle qu'on n’a pas forcément identifiée.  Dans les pays développés, la consommation est quasiment saturée. Il y a certes des parties entières de la population dans la misère, mais la grande majorité a saturé ses besoins connus. Difficile de conduire deux voitures à la fois (le secteur automobile n’a donc plus d’avenir), les habitations sont pour la plupart équipées, les TGV et les avions sont pleins tous les vendredis, etc. Il existe des besoins de consommation non satisfaits dans l’éducation, la santé. Il existe des désirs, mais on doit inventer les produits et les services pour satisfaire les consommateurs nouveaux.

Les produits de technologie de communication n’existaient pas, il y a 20 ans.  Personne n’en avait besoin jusqu’au jour où le portable et le mobile sont arrivés sur le marché et où ils sont devenus indispensables. Incontournables. Le moteur de l’activité et de la croissance, c’est l’innovation dans tous les domaines, donc l’investissement, donc l’entreprise et la liberté du chef d’entreprise.

C’est lui le chef d’entreprise qui va créer de la richesse en combinant du talent (son talent et celui de ses collaborateurs) et du travail. On n’a pas trouvé dans l’histoire économique de système plus efficace que celui-là.

Il faut certes que l’entreprise soit compétitive, pour affronter la concurrence et exporter éventuellement, encore que l’exportation ne soit qu'un moteur secondaire et pas pour tous les pays.  

Le problème dans cette affaire, c’est que pour plein de raisons, les économies modernes auront du mal à organiser le plein emploi. La productivité considérable depuis 20 ans économise de la main d’œuvre dans le monde entier. La spécialisation internationale spécialise l’emploi ; elle remplit des secteurs entiers et en vident d’autres. Certaines cultures européennes sont peu enclines à produire et à consommer des services (notamment de proximité) dont les emplois sont mal considérés et peu rémunérés au regard des allocations allouées aux victimes de fermeture d’usine.

Pour réduire le chômage, il faudrait donc, d'une part mettre le paquet au service des entreprises, de leur compétitivité, de l’investissement et de l’innovation et d'autre part favoriser au maximum la formation pour élever en gamme les emplois et la mobilité géographique internationale. Comme le dit l’écrivain  Éric Orsenna,  "pourquoi a-t-il a fallu attendre qu’un brillant énarque, diplômé d’HEC soit élu président de la République pour mettre les pieds en Chine ?" Il doit y avoir des formations moins longues et moins coûteuses.

Mais il faudrait aussi que les élites cessent d’opposer en permanence des logiques de demande au logiques d’offre.   Opposition stupide et stérile relayée par des médias qui en rajoutent sans cesse. La logique de demande serait de Gauche parce qu'elle favorise plutôt  la redistribution de revenus, et qu’elle tolère (et encourage) les déficits de finances publiques, le crédit, ou l’inflation. Sortes de drogues inventées après 1968, comme disait Raymond Barre.   

Et de l’autre cote cette logique d’offre, qui elle serait de Droite parce qu’elle reconnait à l’entrepreneur un rôle moteur dans la création de richesse, et qui promeut la rigueur dans la gestion des affaires publiques. D’un côté les bons et les gentils de Gauche. De l’autre, les méchants et les affreux capitalistes de Droite.  L’opinion publique, qui n’a lu ni Ricardo, ni Stuart Mill, ni Keynes et encore moins Schumpeter, s’en moque complètement. Il n’y a que de bonnes logiques adaptées au pays et au moment de son histoire.   

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